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L’Aut gard
Si Dieu l’avait voulu il aurait fait
de vous une seule communauté. S5v48

Mensuel d’informations islamiques et générales - N°035 du 5 février au 5 mars 2016

TERRORISME

Se poser les bonnes
questions

Prix : 300 F

LUTTE CONTRE LES TERRORISTES

DJIHADISTES OU
TERRORISTES ?

Ne pas tomber
dans le piège P.12

ASSASSINAT
DE KHADAFI P.10

Les vraies raisons se
précisent peu à peu
ISRAEL

Un plan P.14
pour détruire la
mosquée d’ Al Aqsa

« Les savants ont
« Le mal n’a ni
un grand rôle religion, ni couleur,
ni race, ni sexe »,
à jouer»,
P.6

Cheikh Rabo

DR Mohammed Kindo

P.9

MAHAMADY OUEDRAOGO,
VICTIME DES ATTAQUES

L’imam Ilboudo
témoigne de la
qualité de l’homme
P.4

« La France sans les musulmans ne serait pas la France »
P.9

Editorial
TERRORISME

L

Se poser les bonnes questions

’enlisement du monde dans la terreur ne connait
décidément pas de limite. Les Burkinabè avaient
l’habitude de voir sur leurs petits écrans la violence et le martyr dans d’autres pays. Tel un phénomène
implacable, la capitale burkinabè a connu son tour en ce
début de la nuit du vendredi 15 janvier 2016. Nous assistons impuissamment au basculement de notre monde
dans un engrenage de tueries sans qu’une lueurd’espoir
de solutionnement soit présentée.
En début de nuit du vendredi, une panique saisit Ouagadougou. Des échos font état de coups de feu nourris sur
l’avenue Kwamé Nkrumah. Sans savoir exactement de
quoi il est question, chacun prend ses jambes au cou pour
se mettre en lieu sûr. On apprendra dans la foulée, qu’il
s’agit d’un attentat mué en prise d’otage en cours à l’hôtel Splendid et au Café Cappuccino. Deux bâtisses séparées par l’avenue et se faisant face. Les forces de
l’unité d’élite de la gendarmerie e et des forces étrangères (françaises et américaines) donneront l’assaut pour
libérer les otages. De source sécuritaire, trois preneurs
d’otages sont tués. Et en définitive, les assaillants abattent une trentaine de personnes de 18 nationalités. Le
lendemain,tout le pays est sous le choc face à une scène
de violence mortelle rarement vue dans la capitale.
Jusque-là, le Burkina connaissait des attaques isolées
dans quelques villes frontalières. Mais cette fois, c’est
Ouagadougou qui vient de découvrir le mode opératoire
de groupes djihadistes ayant leur base arrière au Sahel.
L’attaque est revendiquée par le groupe Al mourabitoune
deMocktarBelmoktar. Le mode opératoire fait penser à
celui de l’attaque de l’hôtel Radisson de Bamako perpétrée le 20 novembre 2015. L’attentatde Ouagadougou a
été précédé d’une autre attaque le même jour à l’intérieur du paysà Tin-Abao dans la région du Sahel. La psychose est généralisée et bonjour à la cacophonie.
Cacophonie et supputation
Tout observateur averti savait que le Burkina Faso était
dans la ligne de mire des groupes djihadistes du nord
Mali. Ces derniers avaient menacé de représailles en
2013 tous les pays qui se sont coalisés pour les attaquer.
Le Burkina y avait des éléments. Deuxième fait, ces personnes frappent là où elles trouvent. Et dans une telle situation, aucun pays ne se fait des illusions en s’estimant
à l’abri d’attentats. La funeste attaque de Ouagadougou
a donné libre cours à toutes sortes de supputation. Certains ont vite fait d’établir un lien entre l’attentat et l’arrestation des deux généraux (Diéndéré et Djibril
Bassolé). D’autres brandissent l’affaire des écoutes téléphoniques entre Soro et Djibril. Des doigts accusateursdésignent Blaise Compaoré… Le bouc émissaire en
tant que complice ou instigateur était recherché partout.
Amalgame et stigmatisation

2

Dans la logique de désignation du complice ou de l’instigateur, femmes en voile (singulièrement celles en voile
intégral) et hommes barbus étaient la cible de stigmatisation. Bien que des chefs religieux musulmans ont sévèrement condamné l’attentat, bien qu’aussi l’attentat a
été revendiqué par MoktarBelmoktar. Certains n’ont
trouvé mieux que d’accuser des hommes et femmes se
singularisant par leur religion. L’Islam. Si les groupes
djihadistes se réclament de l’Islam, cela ne veut pas dire
que c’est au nom de l’Islam ou de tous les musulmans
qu’ils commettent leur forfait. Sinon, si l’on devrait
comprendre les choses de la sorte, les actions de terreur
d’autres personnes se réclamant d’une communauté devraient aussi être mises sur le compte de cette communauté.Il est tout de même difficile de comprendre
comment peut-on focaliser le débat sur le terrorisme sur
des choses comme la barbe, le voile, le pantalon raccourci en occultant les moyens avec lesquels ces groupes
sévissent. Nous voulons parler des armes hautement sophistiquées que ces personnes utilisent. Jusqu’à preuve
du contraire, aucune usine de fabrication d’armes n’a été
découverte comme appartenant à ces groupes. Comment
ces derniers parviennent-t-ils à s’armer de façon importante. Ce sont entre autres des questions de fond que
nous devons explorer si nous voulons mener une réflexion assez pertinente sur ce monstre qui menace tout
le monde.Il faut peut-être voir en ces actions les effets de
psychose qu’a engendrés l‘attentat. Heureusement que
les actions de stigmatisation n’ont pas pris une envergure importante. Il faut cependant que chacun prenne
conscience pour éviter le syndrome centrafricain. L’état
de notre monde marqué par la violence qui gagne en ampleur et en cruauté nousimpose des attitudes et actions
pour le réduire de façon significative. Ce que le Burkina
a connu en quelques heures, c’est ce que d’autres pays
comme l’Irak, la Palestine occupée, le Yemen, la Syrie,
la Libye, etc. connaissent pendant des années et dans la
plupart des cas par le fait de dirigeants occidentaux qui
cherchent à soumettre les richesses de nombre de pays à
leurs multinationales. Le terrorisme prend ainsi plusieurs
facettes. Certains le pratiquent pour piller des richesses,
s’accaparer des terres ou imposer la démocratie. D’autres s’inspirent également de cette méthode pour se faire
entendre. Sans vouloir justifier les tueries d’innocentes
personnes par les groupes djihadistes, il est tout de même
important de reconnaitre que les victimes de violence
d’Etat de pays occidentaux sont de loin plus importantes
que celles de ces groupes. « La guerre contre » le terrorisme lancéepar des dirigeants occidentaux notamment
Georges W. Bush ne fait que péjorer la situation. N’y at-il pas d’autres solutions pour enrayer ce fléau ? Que
chacun commence à balayer devant sa porte 1

RECEPISSE
Arrêté : n°2613/P/12/CAO/TGI/PF
Siège social : Ouagadougou
Secteur 10 - 01 BP 2481 Ouaga 01
Portable : 76 93 60 93 / 79 91 05 66
Directeur de Publication :
Guigma Arounan
Rédacteur en chef :
Mohammed Djamil
Tél. : 76 00 73 34
Equipe de rédaction :
Mohammed Djamil
Guigma Arounan
Guiro Sayouba
Abdoul Hamid Traoré
Maquette & Montage PAO :
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Pour tous renseignements,
veuillez vous adresser à Rachid-production
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La rédaction

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

Chez-nous
CEREMONIE D’HOMMAGE

Les messages des communautés

La Nation a rendu hommage le 25 janvier dernier aux victimes à la place de
la « Révolution ». Nous vous publions
l’intégralité des messages des différentes autorités religieuses.

Message de la communauté
musulmane
Nous sommes réunis ici pour sauver
notre monde du flot du terrorisme et de la
violence extrémiste. Le véritable test
pour la croyance n’est ni les slogans,
mais c’est de vivre en conformité avec
les principes fondamentaux que prônent
toutes les religions du monde. Sur le caractère sacré de la vie humaine et le respect de la dignité humaine, nous devons
tous condamner avec énergie, ce qui est
prôné par les terroristes. Nous devons organiser nos énergies à l’échelle communautaire afin de lutter contre tous les
facteurs qui favorisent le recrutement des
terroristes. Nous avons besoin de mettre
en place des cadres nécessaires pour détecter les gènes à désirance terroristes et
empêcher tous ceux qui s’y aventurent à
emprunter les chemins qui emmèneront
à leur perte.
Nous devons accompagner les familles
en les soutenant en conseil et de diverses
manières. Nous devons promouvoir l’engagement positif des citoyens musulmans afin qu’ils ne puissent jamais
s’asseoir sur la table où les terroristes se
retrouvent pour partager leurs idées. Audelà de nos identités ethniques ou religieuses, il y a d’abord notre identité
commune et c’est elle qui souffre chaque
fois qu’un acte barbare est commis. Ces
actes ignobles sont à la fois opposés à la
foi islamique car l’islam place l’homme
au-dessus de tout. Le coran condamne
fermement le fait d’ôter la vie à une personne et quiconque ôte la vie à un
homme, agit comme s’il avait ôté la vie
à tous les hommes. Les terroristes ne lâchent personne sur leur chemin pervers.
Même les grands pays musulmans
comme la Malaisie, le Pakistan, l’Arabie
Saoudite et j’en passe, sont les cibles de
ces hommes sans foi ni loi. Au nom de
tous les musulmans du Burkina Faso, je
présente les condoléances les plus attristées aux parents des disparus et souhaite
prompt rétablissement aux blessés. Que

les âmes des martyrs reposent en paix et
qu’Allah veille sur le Burkina Faso.
Message de la communauté
catholique
Notre nation burkinabè et ses amis qui
ont perdu les leurs dans une immense
peine, douloureux et prématuré de leurs
frères et sœurs suite aux attentats terroristes, au nom de toute l’église catholique, nous souhaitons à tous la paix dans
les cœurs de la part de notre seigneur
Jésus christ, notre sauveur. Aux familles
éplorées, nos sincères condoléances et
notre compassion ; aux blessés, prompt
rétablissement. A tous ceux qui ont perdu
la vie, que la terre du Burkina leur soit

Félix Kinda,
frère cadet de Pascal Kinda
Malgré les efforts du nouveau gouvernement pour relancer les activités,
il se trouver des gens méchants qui
veulent toujours marcher à contre
courant de la volonté du peuple. Cela
est vraiment déplorable et condamnable. Nous apprécions la cérémonie qui
vient de se dérouler ce matin en mémoire des victimes et remercions les
plus hautes autorités pour avoir permis cela. Cette date du 25 janvier a
été une journée très mémorable et restera à jamais dans les cœurs. Dans son
message, j’ai été édifié par l’appel à
la vigilance lancé par le président du
Faso pour faire face à ces mécréants
de terroristes.

légère.
Croyant ou incroyant, la mort est toujours une dure épreuve pour la foi et en
de pareilles circonstances, la foi sombre
et le désespoir semble prendre le dessus.
C’est pourquoi nous demandons au créateur et tout puissant, sa force. Dans la foi,
ceux que la mort nous enlève restent toujours présents car dit-on, le vrai tombeau
d’un mort, c’est le cœur des vivants.
Même si la foi et l’espérance n’abolissent pas la souffrance ni la peine, elles
leur donnent un sens nouveau, et la pensée de BiraogoDiop selon laquelle ; « les
morts ne sont pas morts », était une promesse d’immortalité. Ainsi donc, nos
frères et sœurs ne sont pas morts mais ils

Idrissa Ouédraogo,
parent de victime
Je voudrais dire merci aux autorités et
leur dire que nous, parents des victimes, sommes très contents. C’est le
même sentiment que je voudrais aussi
au nom des parents de tous les blessés, dont certains sont toujours dans
les hôpitaux. Je voudrais saisir l’occasion pour inviter les populations à
une collaboration franche pour qu’on
puisse dénoncer tous les cas suspects.
C’est ensemble que nous allons de
concert avec nos autorités et les forces
de défense, lutter efficacement contre
le terrorisme. Que cette barbarie ne se
passe plus jamais sur notre territoire
et même partout ailleurs.

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

sont nés dans une autre vie, la vie en
Dieu. Si la loi de la mort nous inflige la
promesse de l’immortalité, que le christ
nous apporte la consolation. Pour tous
ceux qui croient en Dieu, la vie n’est pas
détruite mais elle est transformée.
Lorsque prendra fin leur séjour sur la
terre, les hommes que tu as créé ont déjà
une demeure dans les cieux. En ces instants d’épreuve, nous te supplions seigneur de les accueillir auprès de toi.
Seigneur exhausse nos prières de ce jour.
Que Dieu bénisse le Burkina Faso. Livre
de la sagesse : « Dieu a créé l’homme
pour une existence impérissable et a fait
de lui une image de ce qu’il est lui-même.
La vie des justes est dans la main de Dieu.
Aucun du monde n’a la main sur eux.
Quand ils nous ont quittés, on les croyait
anéantis alors qu’ils sont dans la paix.
Aux yeux des hommes, ils subissaient un
châtiment mais par leur espérance, ce
qu’ils ont eu à souffrir était peu auprès
du bonheur qu’ils ont été comblés. Dieu
les a mis à l’épreuve et les a reconnu
digne de lui-même… Ceux qui mettent
leur confiance au seigneur comprendront
la vérité. Ceux qui sont fidèles resteront
avec lui dans son amour car il accorde à
ses élus, grâce et miséricorde ». Que Dieu
tout puissant accorde au peuple burkinabè, grâce, miséricorde et paix
Message de la communauté protestante
Le vendredi 15 janvier 2016, des mécréants s’en sont pris au peuple burkinabè
en commettant un acte diabolique, et de
surcroit, un jour sacré et béni pour nos
frères musulmans. J’ai foi que quoi qu’il
se fasse, la justice leur sera appliquée dans
toute sa rigueur. La parole de Dieu déclare dans le livre de chronique, 2 chr714. Ce matin je voudrais humblement dire
que le Burkina Faso a été durement
frappé mais nous allons toujours continuer à prier pour ce pays. « Seigneur, j’ai
deux vœux à te formuler : je t’implore
d’essuyer les larmes de tous ceux qui ont
été endeuillés par ce drame et d’apaiser
leurs cœurs. Que tous ceux qui ont été
blessés recouvrent la santé. Deuxièmement, seigneur, ces abrutis pensent qu’ils
nous ont causé du tord parce qu’ils se disent que nous ne les voyons pas, mais toi
seigneur, tu les vois. C’est pour cela, je
t’implore de tendre ta sainte main sur
tous tes enfants pour que ce genre de
drame n’arrive plus jamais. Que ton nom
soit loué à jamais au nom de Jésus christ
ton fils ; Amen ».

3

Chez-nous
MAHAMADY OUEDRAOGO, VICTIME DES ATTAQUES DU 15 JANVIER

L’imam Ilboudo témoigne de la qualité de l’homme

On se souvient comme si c’était hier, de
l’attaque terroriste qui a frappé le Burkina
Faso dans la soirée du 15 janvier 2015.
Cette attaque abominable a endeuillé des
familles et la nation burkinabè. Dans cette
foulée, l’Association des élèves et étudiants
musulmans au Burkina Faso « AEEMB » a
perdu un de ses valeureux militants du
nom de Mahamady Ouédraogo. Dans cet
entretien, Imam Ilboudo nous en parle de
l’engagement de cet homme pour la cause
de la religion. Puisse Allah lui accorde le
paradis, à notre frère qui nous a devancé
dans l’autre monde.

nager ou de transporter quelque chose, il se
mettait à la disposition de la mosquée pour
faire ce travail.

L’AUTERGARD : Salam Imam. Pouvezvous faire votre présentation à nos lecteurs ?
Je suis AlidouIlboudo, instituteur de profession, et Imam de l’Association des élèves et
étudiants musulmans au Burkina Faso
« AAEMB ».

Quinze ans au sein de l’AEEMB, en quelle
année exactement a-t-il intégré la structure ?
Comme il a commencé à militer dans sa région d’origine, et nous, à Ouagadougou, je ne
saurais dire en quelle année il a intégré
l’AEEMB.

Lors des attentats terroristes du 15 Janvier,
l’AEEMB a perdu un de ses militants.
Pouvez-vous nous en parler ?
Je remercie Allah. Tout d’abord, je m’incline
devant la mémoire de tous ceux que nous
avons perdus ce jour-là. Je demande à Allah
qu’il assiste notre paysdans ces durs moments
que nous traversons ; et que ensemble nous
puissions dépasser cela et renouer avec les espoirs de développement que nous nourrissons
après les élections avec le nouveau gouvernement que nous venons d’avoir. C’est vrai
que c’est une période difficile, et parler de
quelqu’un que l’on a perdu, c’est difficile
pour nous, d’autant que son souvenir,nous
reste dans une douleur. MahamadyOuedraogo, nous l’appelons affectueusement
Mady. Il travaillait avec nous depuis une
quinzaine d’années, et il est de profession
chauffeur de taxi, il conduisait parfois les véhicules de location, des services particuliers
des organismes. Particulièrement à la mosquée, il s’occupait de la quête de vendredi.
Et les autres grandes prières, il nous aidait à
organiser la quête, car c’est un ancien de
l’école Franco-arabe. Il a milité dans la structure de l’AEEMB dans sa région de Kaya. Et
à Ouagadougou quand il a intégré l’association, il pouvait nous aider à organiser la
quête.C’est à ce poste qu’on l’a affecté depuis
une quinzaine d’années. Au sein de la mosquée, nous avons également des personnes
très âgées, etparfois c’est Mahamady qui les
conduisait pour la prière de Vendredi. Il faisait
ce travail de façon bénévole. Comme il est
un conducteur, lorsqu’on a besoin de démé-

Quela été le but de sa présence à Cappuccino ?
Comme je l’avais signifié plus haut, Mady
était un chauffeur ; et c’est dans le cadre de
son travail qu’il s’y était rendu. Il conduisait
un véhicule d’une ONG, qui se trouve être
Amnesty International. Et sa patronne, Leila
Alawy,a préféré prendre un pot à Cappuccino.
C’est donc dans le cadre de son travail qu’il
a croisé son destin.

Quel mots avez-vous au regard des attentats ?
D’abord, c’est que nous sommes profondément attristés, consternés que des gens, des
humains puissent commettre de telles
choses.Quelle que soit la cause qu’ils revendiquent, qu’ils défendent, nous pensons que
c’est déplorable que de tels actes produisent
dans un pays hospitalier qu’est le nôtre. Cela
crée un climat de suspicion et aussi un malvivre dans les communautés, surtout que nous
avons des réfugiés d’autres pays qui sont là.
Et il faudrait que les gens aient beaucoup de
retenue, qu’ils se surpassent afin que la nation

Qu’est-ce que l’AEEMB a fait à son endroit ?
C’est dès le vendredi soir que sa femme a signalé que Mady, qui était en voyage, n’est
pas rentré. Mais on n’avait pas lié son absence
à cela. Ça commencé à inquiéter son grand
frère qui travailleétroitement avec nous. Et le
lendemain samedi, on s’est rendu dans les différents sites où on pouvait cueillir des informations, notamment sur les lieux du drame,
qui étaient encerclés, ensuite à Yalgado, à
l’hôpital Blaise Compaoré, à la clinique
Souka ; mais on n’avait pas obtenu d’informations pertinentes. On soupçonnait que le
propriétaire du véhicule qu’il avait conduit a
reconnu son véhicule calciné à Cappuccino.
On disait qu’il y avait des corps calcinés et
méconnaissables. Effectivement, Mahamady
y était.
En dehors de cela, il s’agissait aussi d’assister la veuve et les enfants. Et nous avons délégué des personnes ressources auprès de la
famille éplorée. Quand il nous a été possible
d’avoir la dépouille mortelle, nous avons procédé comme l’islam nous a enseigné, jusqu’à

Ceci est un communiqué d’Amnesty international sur le décès de Leila et de Mahammadi.
C’est avec une immense tristesse qu’Amnesty International a appris la mort tragique
de la photographe Leila Alaoui et du chauffeur Mahamadi Ouédraogo, victimes de l’attentat perpétré par al Qaïda à Ouagadougou
vendredi 15 janvier.
Leila a reçu deux balles, dans la jambe et le
thorax, avant d’être rapidement conduite à
l’hôpital. Après avoir été opérée, elle se
trouvait tout d’abord dans un état stable. Les
préparatifs pour son rapatriement sanitaire
étaient en cours, mais elle a succombé à une
crise cardiaque.
Leila était une photographe franco-marocaine talentueuse, qui était partie dans le
cadre d’une mission d’Amnesty International au Burkina Faso pour réaliser un reportage photo sur les droits des femmes.
Mahamadi Ouédraogo a été tué dans sa voiture. Père de quatre enfants, c’était un grand
ami d’Amnesty International : il accompa-

4

l’inhumation
au cimetière de Bogré.
L’AEEMB et le CERFI ont aussi organisé
plusieurs cérémonies chez le défunt et à la
mosquée, en sa mémoire. Actuellement, il est
prévu que les uns et les autres puissent cotiser
quelque chose pour soutenir la veuve et les
enfants.

continue d’être une terre hospitalière.
Après ces attentats, on assiste à des stigmatisations qui tendent à une discrimination vis-à-vis de certains religieux ?
Au regard de l’identité des terroristes et
même de leur provenance, on ne peut pas incriminer l’apparence physique de nos populations. D’autant plus que ces terroristes
n’avaient pas cette apparence dont on parle.
Et il faut comprendre que le criminel peut
prendre n’importe quel camouflage qui lui
permettrait de se fondre rapidement dans une
société.
Donc, c’est pour dire que nous devons développer des stratégies de riposte pertinentes
pour contrer ces malfaiteurs et non tomber
dans la stigmatisation qui tue la cohésion.
Quand les gens ont tendance à en vouloir aux
musulmans barbus, il faut reconnaitre que ces
musulmans sont pleins à œuvrer au développement de notre pays. Ils sont des operateurs
économiques et des grands commerçants. Ils
sont loin d’être terroristes. Ils fécondent plutôt notre système.
Votre mot de la fin ?
Comme dernier mot, je pense que dans toutes
les couches sociales, nous devons être objectifs et avertis pour condamner le terrorisme.
C’est d’abord une position, et ensuite une
éducation des enfants que nous mettons à la
disposition de la société. Il ne faudra pas laisser à ces terroristes une parcelle d’espoir pour
qu’ils trouvent un quelconque terreau dans
nos milieux. Puisque c’est nous ou eux ;
c’est une guerre et nous devons la mener.

Amnesty international sans voix

gnait depuis 2008 le personnel et les
conseillers venus en mission dans le pays.
Nos pensées vont à son épouse, à ses enfants
et à sa famille. Il va nous manquer terriblement. La priorité absolue d’Amnesty International est d’apporter le meilleur soutien
possible aux familles de Mahamadi et de
Leila. Des représentants d’Amnesty se trouvent à l’hôpital et assurent la liaison avec sa
famille, les médecins et tous les organismes
nécessaires. Mahamadi et Leila étaient garés
devant le café Cappucino, en face de l’hôtel
Splendid, lorsque l’attentat a eu lieu.
Ouagadougou n’était pas considérée comme
une destination à haut risque et Leila était
soutenue par les collègues de notre bureau
national au Burkina Faso durant sa mission
et était accompagnée par Mahamadi, ressortissant du Burkina Faso. Amnesty International condamne l’attaque violente contre
les civils à Ouagadougou, qui a tué et blessé
des dizaines de personnes de différentes nationalités et religions.
Amnesty International

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

Chez-nous
CERFI

Koné Souleymane est
le nouveau président

C’est une équipe de 15 personnes qui
conduira la marche du Cercle
d’Etude, de Recherche et de Formation Islamiques (CERFI) pour les trois
ans à venir. Investi ce dimanche 10
janvier à la Maison de la Femme à
Ouagadougou, le nouveau président
place son mandat sous le signe du développement socio-économique.

U

n nombre considérable d’invités, de militants et de sympathisants, d’associations sœur est
venu assister à l’installation de la nouvelle escouade. On pouvait voir des invités comme le docteur Doukouré;
Zougmoré Chrysogome, président du
MBDHP, Baba Hama ancien ministre
sous l’ère Compaoré ; des président
d’association sœur ; Tahirou Barry responsable politique mais aussi ancien militant de l’Association des Elèves et
Etudiants au Burkina (AEEMB) ; etc.
La cérémonie a été ponctuée essentiellement de deux discours. Celui du président sortant et celui de l’entrant. Le
nouveau président a salué le travail
abattu par l’ancienne équipe qui était dirigée par Nombo Moussa. Il s’est engagé
à travailler à consolider et renforcer les
acquis mais surtout à leur apporter une
plus-value. Le CERFI a plusieurs projets
de construction de structures sociales
comme des écoles, des centres de santé.
Certains de ces projets ont bien démarré
et sont en train d’être achevés. D’autres
sont en stand-by par défaut de moyens.
Au regard de la très forte demande de la
population burkinabè sur ces questions,

le nouveau président inscrit leur réalisation comme une priorité de son mandat.
C’est ainsi qu’il a manifesté comme
souci majeur la mobilisation de ressources conséquentes notamment financières pour l’érection des infrastructures.
Séance tenante, il a aussitôt invité ceux et
celles qui ont eu confiance en lui pour le
placer à la tête de la structure à l’accompagner avec des invocations et concrètement avec des appuis matériels et
financiers. Par ailleurs, le président entrant a laissé entendre qu’il veillera au
renforcement de la collaboration du
CERFI avec les associations sœurs pour
que le « vivre ensemble soit une valeur
partagée par tous les habitants du Burkina Faso ». Dans cette logique, comme
par prémonition, Koné Souleymane a
saisi l’occasion pour appeler à plus de
cohésion, de tolérance et de concorde
pour que notre pays soit un havre de
paix.
Hamidou TRAORE

MARCEL TIGAWENE, SG APRJL

« Nous sommes de cœur
avec les journalistes
Depuis son lancement, cette association se bat en sa manière pour améliore le circuit de distribution des
journaux et des livres au Burkina
Faso. L’APRJL-B ne peut pas exceller dans son domaine et faire la promotion de ses activités sans le
concours des hommes de médias.
Lesquels, le secrétaire général remercie et souhaite par-dessus la
franche collaboration avec les journalistes. Et c’est dans la journée de
mardi 2 février 2015, qu’il s’est livré
à notre micro.
AR : Pouvez-vous vous présenter à
nos lecteurs ?
Tigawene Marcel : Je suis le secrétaire
général de l’Association Professionnelle des Distributeurs et Revendeurs
des Journaux et Livres du Burkina Faso
( APDRJL-B ). Notre association a vu
le jour en juin 2013. Nous sommes non
lucratifs et sans aucune appartenance
religieuse.
Votre lecture de l’actualité nationale ?
Comme tout le monde, nous condamnons certains faits qui depuis l’insurrection populaire
ont émaillé
l’actualité. Nous rejetons aussi l’agression sous toutes ses formes vis-à-vis
des médias, et rappelons aux journalistes que nous sommes de cœur avec
eux.
Quel resumé faites-vous de vos activités de Mai 1015 ?

Bien qu’il y ait eu des insuffisances, il
faut reconnaitre que ce fut un succès
grâce à la presse. Les soutiens furent
multiformes de la part des hommes de
medias.
Les médias ont été et demeurent nos
porte-voix pour que la parole de
l’APDRJL-B s’élargisse. Nous leur accordons beaucoup de crédit et demandons en retour leur confiance. Puisque
nous travaillons ensemble (Journalistes
et revendeurs), c’est pourquoi je trouve
qu’il faut raffermir nos relations.Nous
demandons à la presse de nous aider à
grandir dans l’innovation sur le plan
aussi bien national qu’international. Ce
nouveau-né demande surtout leur soutien afin de grandir.
GUIRO SAYOUBA

103.4
L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

5

Entretien
LUTTE CONTRE LES TERRORISTES

« Les savants ont un grand rôle à jouer», DR Mohammed Kindo

Le Burkina Faso a été frappé au cœur
par des attentats terroristes qui ont endeuillé la nation toute entière. Des ennemis venus de l’extérieuront tué, sans
état d’âme, des personnes innocentes,
blessé des dizaines d’autres et provoqué
de nombreux dégâts. Dans le jour qui a
suivi ces actes odieux, des groupes terroristes logés au Sahel, notamment
AQMI et Al Mourabitoune, ont revendiqué ces attaques et ont fait savoir que
ces attaques ont été perpétréescontre
les politiques occidentales et en guise de
soutien au prophète (Paix et Salut de
Dieu sur lui), pour avoir été caricaturé
par Charlie Hebdo. Face à ces accusations portées sur la religion musulmane, nous avons donné la parole à un
savant musulman pour qu’il puisse apporter une réplique. L’éminent Cheick
Dr. Muhammad IshaqKindo du Mouvement Sunnite, le 18 Janvier
2016,nous a accordé cet entretien à son
domicile. Avec ce Savant connu de tous,
le visage réel de ces terroristes... ? Il a
également fait des propositions afin
qu’on puisse véritablement lutter
contre ces groupes.
AR : Quelles sont vos sentiments pour
ce qui vient de se produire, entendez les
attentats des 15 et 16 janvier 2016 ?
DK : J’entame mes propos en commençant par louer Allah (Pureté et gloire à lui)
et que ses salutations soient sur le noble
des prophètes, Muhammad. En réponse à
votre question, c’est dire que mes sentiments sont ceux d’un être humain, au détriment des impressions animales. Un
homme normal en dehors de la
religion,sait bien distingué le mal du bien.
Ces attaques terroristes montrent sont des
actes inhumains ; un être humain ne pose
pas des actions de ce genre, qui ôtent la
vie d’autrui. De la même manière que l’on
jouit de sa propre vie, celui qui est tué
jouissait également de la même vie. Celui
qui ne souhaite pas voir sa vie gâchée ne
doit pas non plus vouloir intenter à la vie
de l’autre. C’est bien vrai que le mal était
l’extérieur et aujourd’hui, on est frappé de
plein fouet et en plein cœur. Nous
condamnons ces actes terroristes bien
avant que n’en soyons victimes. Cette
fois-ci, c’est nous qui sommes victimes,

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donc la tristesse est grande.
Pour terminer sur cette question, je suis
musulman, chose qui signifie que la
condamnation est encore plus ferme, et la
tristesse plus grande. Tout musulman doit
s‘écarter de ces actes et de ceux qui les
posent etpromeuvent. Cautionner d’une
manière ou d’une autrele terrorisme, c’est
aller à l’encontre des valeurs de l’islam,
et cela vous exclus de la foi musulmane.
D’aucuns estiment que les musulmans
sont pris entre le marteau et l’enclume.
Condamner ces attaques sous-entendrait une certaine reconnaissance de
l’islam et ne pas condamner aussi relèverait de la reconnaissance. Dans ce cas
précis, qu’est-ce qu’il faut faire ?
Ceux qui disent qu’il ne faut pas parler de
ce problème en tant que musulman parce
que cela reviendrait à être pris entre le
marteau et l’enlune, n’ont pas compris
notre religion. Je rappelle simplement que
la loi musulmane nous exige à combattre
le mal dès lors qu’il se manifeste.
Donc, se taire, ce n’est pas un acte islamique?
Tout à fait. Quel est la place d’un tel acte
en islam si ce n’est le mal. C’est un acte
abominable et détestable. Et ildoit être
combattu à trois niveaux : par des moyens
matériels et physiques, par la voie de la
communication et, enfin, par la condamnation interne quand on est impuissant

face à la situation.Les gens qui sont tués,
qu’ont-ils fait pour mériter la mort subite ? Donc, c’est vous dire que cela ne
trouve aucune explication en dehors du
mal, qui nécessite une lutte farouche. Les
moyens matériels, sécuritaires et défensifs
reviennent à l’Etat, mais quant aux
moyens de la communication, ils nous reviennent au premier chef en tant que musulmans, puisque ces gens utilisent le nom
de l’islam pour s’exécuter. Je ne crois pas
qu’il peut y avoir un savant musulman
sincère de sa foi qui puisse se taire face à
une telle abomination. En synthèse, le
Coran précise que Dieu a maudit certains
mécréants parmi les fils d’Israël par la
voix de David (Dawood) à cause de leur
inaction face aux actes ignobles qui se
perpétuaient. Ceux qui observaient sans
rien dire ont tous été maudits par
Dieu,pour leur inaction. Car, en définitive,
qui ne dit rien consent.
Les attentats étaient hors de nos frontières. On a tous cru que c’était une affaire des autres, mais ça nous revient en
pleine figure. Pensez-vous que nous
sommes responsables de ce qui nous arrive ?
Nous observions ces attaques hors de nos
frontières. Aujourd’hui, c’est notre tour.
En tant que croyants, nous croyons que
ce qui est arrivé aux Burkinabè et aux autres peuples était dans la connaissance de
Dieu. Mais après ces attaques, c’est à nous

de travailler afin que ces actes ne se répètent plus. C’est à nous de travailler pour
éviter une telle situation. Et nous allons
faire notre part du boulot. La question que
je me pose c’est comment ces gens sont
arrivés à nous frapper.
Malheureusement, je n’ai pas toutes les
cartes en main pour y répondre. Ces
groupes terroristes dont AQMI et Al Mourabitoune et autres, ont leur vision, et ce
qu’ils cherchent dans leur industrie de la
terreur est de ternir l’image de l’Islam.
Sinon quand on veut bien voir, il y a des
mains invisibles derrière cette attaque qui
sont, à mon sens, loin de nos frontières.
Les groupes terroristes sont multiples et
multiformes. Et leurs agissements ne sont
pas les mêmes, il y a ceux qui le font pour
des raisons de droits et d’autres pas du
tout. A ce niveau, c’est dire que cela ne
peut se faire sur le compte de l’Islam.

On a l’impression que vous voulez nous
faire comprendre que des personnes
ressources et importantes sont derrière
ces attaques terroristes ; et que d’autres se laissent aller dans ce genre
d’actes parce qu’ils se sentent lésés ?
Des groupes de personnes ont été opprimés et lésés dans leurs droits. En réaction,
ils sont tombés dans la violence qui outrepasse les règles de la justice. De l’autre
côté, certains groupes sont instrumentalisés à des fins politiques pour permettre à
ceux qui sont à la base d’avoir la voie
libre pour s’ingérer dans des affaires souveraines des Etats dans le but d’imposer
leur vison du monde en termes économiques et politiques. C’est une mauvaise
attitude qui résulte de la mécréance. Ces
hommes qui sont tapis dans l’ombre, qui
téléguident les groupes terroristes rien que
pour pouvoir s’immiscer dans les affaires
internes des Etats sont aussi
à
condamner au même titre que ceux qui attaquent. Ils ont pour fondement idéologique : « C’est La fin qui justifie les
moyens».Cette expression est de la mécréance pure et simple.
De nos jours, c’est l’économie qui détermine les conduites des Etats. Ces personnes savent que nous sommes un Etat
riche en ressources naturelles. Ils savent
également que les peuples s’éveillent davantage. Donc, ce qu’il faut faire, c’est de

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

Entretien
créer des tensions terroristes afin de pouvoir être incontournables dans la gestion
de la crise et dans les différents processus
de dialogue. C’est cet aspect que les gens
veulent perdre de vue. En définitive, sur
la question, il est difficile de pointer du
doigt une personne déterminée. Mais ce
qui est sûr, c’est que les terroristes ont des
soutiens conséquents.
Comment pouvons-nous faire savoir
aux Burkinabè et au reste du monde
que ces actes ne sont ni de près ni de
loin
des
enseignements
de
l’Islam ?Selon le communiqué de
AQMI, ils l’ont fait contre les Occidentaux pour se venger de ce qu’ils ont
fait au prophète Mohammed (Paix et
bénédictions d’Allah sur lui) en termes
de sabotage à travers les caricatures …
Ils disent l’avoir fait également pour
défendre les musulmans ?
C’est un mensonge. Ce prétexte ne tient
pas la route. Je le refuse. C’est un subterfuge de la part des terroristes et de leurs
acolytes.
Sinon les enseignements que nous tenons
de l’Islam nous indiquent que pour aimer
le prophète (saw), il faut le suivre dans
son comportement, sa vie et être dévoué
pour la bonne cause. Ce n’est qu’en ce
comportant ainsi qu’on peut dire qu’on
aime le prophète. Maintenant, se mettre à
tuer les gens n’importe où et n’importe
comment, et vouloir l’attribuer à l’amour
du prophète, cela est de la pure diversion.
En outre, il est dit dans la loi islamique,
que la justice s’applique à ceux qui sont
coupables conformément à une sentence
des juges, quand il s’agit de criminels reconnus par la loi ayant tué injustement des
innocents. Les personnes qui ont été tuées
à Cappuccino et au Splendid, musulmans,
chrétiens et autres, de quoi sont-ils coupables ?
Et enfin, ce genre de revendication au
nom du prophète et de l’Islam est un piège
pour les musulmans faibles d’esprit. Car
les terroristes cherchent l’adhésion des
musulmans dans leurs actions ; dès lors
que vous les supportez dans leur entreprise parce qu’ils disent qu’ils soutiennent
le prophète et l’Islam, vous tombez dans
leur piège. Sinon, que ce soit AQMI ou
BelMoktar, qu’ils se dévoilent aux gens
au lieu de passer leur temps à se camoufler. Je ne comprends pas que des gens qui
veulent soutenir l’Islam se cachent dans
les grottes et autres lieux infréquentables.
Nous qui sommes musulmans et arborons

l’islam dans sa justesse, on n’a pas besoin
de se cacher ni d’avoir peur ou encore surprendre les innocents dans les restaurants
pour les tuer.
Des savants musulmans auraient dit à
Bel Moktar que parmi ceux qu’ils tuent
dans les attentats se trouvent des
croyants,et qu’il répondrait de cela devant Dieu. Sa réponse fut : « Les gens
tués dans les attentats seront ressuscités selon leurs intentions pendant les attentats ou en d’autres termes, ils seront
ressuscités dans l’état d’esprit qui les
caractérisait avant leur mort ?
Ceci montre que nous avons affaires à des
idéologistes ignorants, à des criminels engagés. Avec une telle théorie, on a affaires
à des assassins qui ne s’arrêteront jamais.
Vous savez, les terroristes sont des gens
qui manipulent les textes sacrés en leur
guise.Sinon le prophète a dit que ceux qui
sont victimes des catastrophes naturelles à
l’instar des tremblements de terre, des tsunamis, des accidents et bien d’autres seront ressuscités dans l’état de l’intention
qui les animait. Autrement dit, le prophète
a dit qu’un croyant qui meurt dans ces circonstances meurt en martyr. Cela est différent de se lever et se mettre à tuer les
gens en voulant assimiler cela à des
causes naturelles. C’est de la folie. Tous
les attentats qui ont été posés provoquant
la mort d’innocentes personnes, que les
auteurs de ces attaques ainsi que leurs
acolytes comprennent qu’ils seront interrogés de l’assassinant de ces femmes, enfants, hommes et vieux qui ont été
atrocement fauchés à la vie, quelle que
soit leur appartenance.

Depuis les attaques du 15 janvier, deux
jours plus tard, on a eu des témoignages en nombre élevé de femmes voilées, de barbus qui ont été victimes
d’agressions physiques, d’injures dans
la ville de Ouagadougou. Votre réaction
sur la question ?
C’est triste que des sœurs et des frères
aient subi de la part d’individus mal intentionnés, des injures et des agressions.
Nous souhaitons que cela prenne fin le
plus rapidement possible pour que l’on
n’assiste pas à un autre désordre, qui va
encore empirer la situation et donner raisons aux terroristes. Ce qui accentue la
colère des citoyens, c’est lié à certaines
communications sur les médias. Si les informations ne sont pas bien traitées, ça
souffle la peur entre les populations. Les
médias doivent cesser les qualifications
des termes Barbus, et autres expressions
qui créent la confusion. Une fois cela généralisé, ça devient de la Fitna. Sinon,
selon les versions portant sur les terroristes tués, il s’agit de jeunes et non de
barbus, ils ne portaient pas le voile intégral, pourquoi s’attaquer aux barbus et
aux femmes voilées ? Je crois que ceux
qui se lancent dans de telles initiatives
manquent de lucidité. Donc, travaillons à
mieux se comprendre afin de préserver la
cohésion sociale, l’harmonie entre les populations et la paix sociale. Les terroristes
sont venus nous trouver dans cette configuration de paix, il ne faudrait pas qu’ils
arrivent à nous diviser.
Quels conseils et conduites pour les autorités et les populations pour une sor-

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

tie définitive du terrorisme ?
Cette question est d’une importance capitale. D’abord, ce problème touche plus les
musulmans à cause de la confusion créée
entre notre foi et des attentats. Donc, il
faut que nous musulmans travaillions à
faire comprendre la religion aux musulmans. Beaucoup sont musulmans mais ils
ne savent pas ce qu’est l’Islam. Il faut enseigner aux musulmans ce que c’est que
le terrorisme pour que face à chaque comportement suspect, ils puissent rapidement
comprendre que c’est un acte terroriste.
Ensuite, il y a des jeunes musulmans aujourd’hui qui peuvent penser que c’est
une forme de Jihad parce qu’ils voient
des musulmans dans l’injustice ailleurs et
sont tentés de compatir par des actes de ce
genre. Il y a un travail de sensibilisation à
mener. J’insiste sur la formation et la sensibilisation des musulmans sur le terrorisme parce que la religion est prise en
piège par des gens de mauvaise volonté
dans le seul but de la rendre invivable et
impraticable. Si l’on s’en tient à ces actes
terroristes, ce sont des comportements qui
sont nuisibles à l’Islam et aux musulmans.
Et enfin, lutter contre ce fléau n’incombe
pas qu’aux musulmans. L’engagement de
tous les fils et filles de ce pays est nécessaire. Il faut que l’Etat soit regardant à
l’endroit des jeunes sans emploi.Les
jeunes musulmans sont les plus nombreux
à être en chômage, s’ils n’ont pas d’emplois Ils sont facilement influençables par
des terroristes, qui ont toujours quelques
choses à les proposer.
J’attire l’attention des autorités sur cette
question de l’employabilité des jeunes
parce qu’elle révèle d’une importance capitale. C’est un cas à ne pas négliger. La
vie d’aujourd’hui avec son lot de chômage, de l’oisiveté pousse à la déperdition. Donc, il faut que chacun à son niveau
mette du sien afin que nous arrivions à assainir la vie dans notre pays. Ce que nous
voulons que les autorités comprennent
dans cette lutte contre le terrorisme, c’est
qu’elles doivent approcher les musulmans
et toutes les autres communautés. En
conclusion, c’est de prier pour ses nouvelles autorités qui ont été éprouvées par
ces actes. Nous prions Dieu pour que ces
démons tapis dans l’ombre, qu’ils soient
au Burkina Faso ou hors de nos frontières,
ne puissent plus compromettre le développement et la sécurité dans notre pays
et partout ailleurs.
AROUNAN GUIGMA

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Entretien
ATTENTATS

« Le mal n’a ni religion, ni couleur, ni race, ni sexe », Cheikh Rabo

Dans cet entretien que nous avons eu
avec le Cheikh Rabo, il nous parle des
conditions pour rehausser le niveau de
communication de nos savants et prédicateurs. Il a également, actualité
oblige, fait des propositions pour lutter contre le terrorisme.

Qui est Cheick Rabo ?
Les louanges sont à Allah, le dominateur
suprême et le seigneur de toute chose. Il
est unique et sans associés. Que ses salutations soient sur son noble prophète
Muhammad, sur sa famille ses compagnons et sur toute personne qui leur emboitera le pas jusqu’au jour de la
réédition des compte. Je suis Cheick
Mohammad Lamine Rabo. Je suis originaire de Kaya et je réside à Ouagadougou au quartier Patte d’Oie.
On a souvent l’impression que la religion musulmane est impénétrable
raison pour laquelle les musulmans ici
au Burkina Faso est impénétrable?
Tout le problème réside dans l’éducation
et le caractère des musulmans en l’occurrence les savants, qui manquent de
deux ou trois éléments importants dans
la construction d’un islam compris et
unifié. C’est la méthode dans l’appel et
l’enseignement à l’islam et enfin la patience dans la transmission du message.
C’est ce qui manque à nos savants ici.
Il faut savoir à quel moment parler aux
gens, à quel lieu et quelle manière ?
Maintenant si vous abordez les gens
avec beaucoup du mépris et manque de
respect, il sera extrêmement difficile
pour vous de les convaincre.
L’autre élément, c’est l’effet des différentes tendances qui jouent négativement sur les prêches. Très souvent on ne
fait pas le travail de l’appel en fonction
de la discipline de l’islam et des méthodes, mais plutôt selon l’orientation
des associations auxquelles on appartient.
Il faut que nos savants se posent cette
question de savoir « Pourquoi les prédications ne n’accrochent plus les masses
»?
Comment les savants et prédicateurs
doivent faire pour emprunter la voie
qui unifierait et accrocherait tous les

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musulmans ?
Les savants et prédicateurs ont deux instruments avec lesquels ils devaient pouvoir éblouir les musulmans et les non
musulmans à la vérité de l’islam et à son
importance. C’est le Coran et la Sunna
du prophète (Paix et bénédictions d’Allah sur lui). Maintenant, il faut savoir
utiliser ces deux systèmes pour atteindre
son but et cela n’est pas donner à tout le
monde. Il y a une nécessité de comprendre la sociologie des peuples et des
hommes. Tout prédicateur réussirait ses
communications s’il arrive à comprendre celui à qui, il s’adresse.
Concrètement, comment ça doit se
passer ?
Les hommes ont leur passion, leurs défauts. Il faut savoir tenir compte de tout
cela. Si vous êtes un prédicateur de Dieu
et de son prophète, vous devez dégager
du charme en tant qu’homme de Dieu,
dans votre habillement, par votre comportement exemplaire et vos relations
avec les autres.
On constate également que l’éducation des enfants musulmans laisse à
désirer ? Qu’est-ce qui peut expliquer
cet état de fait ?
A plusieurs niveaux dans le Coran, Dieu
nous a fait comprendre, qu’il a honoré
l’être humain, il l’a félicité pour cet honneur. Ensuite, cette marque de distinc-

tion honorable concerne l’espèce humaine et non pas un peuple spécifique,
une ethnie ou une confession particulière. C’est important de le souligner.
Concrètement, il y a lieu qu’on s’investisse dans l’éducation de nos enfants afin
qu’ils répondent à cette distinction honorable. En dehors de l’islam, l’homme
a de la morale, de l’intégrité de la valeur
humaine. Il faut transmettre cela aux enfants. Il faut les envoyer dans les
grandes écoles, apprendre les connaissances de ce monde. Il faut les former à
l’islam par tous les moyens, afin qu’ils
comprennent leur foi et se l’approprient.
L’éducation, c’est un ensemble de paramètres qui doivent tenir des changements générationnelles. C’est de savoir
s’adapter aux réalités du moment. Dans
une telle dynamique, nous allons mettre
à la disposition de l’Islam et des sociétés, des hommes capables d’apporter des
changements pour un monde meilleur.
J’insiste sur le fait que l’éducation va de
pair avec non seulement l’apprentissage
de l’islam et celui des connaissances
mondaines.
Nous sommes au terme de notre entretien, on ne pourrait se quitter sans
évoquer les attentats du 15 janvier
2016. Votre réaction ?
Il faut noter que ces comportements ont
même existé à l’époque du prophète.
Des groupes de gens dans leur mauvaise

intention ont tentéde freiner l’élan de
l’islam dans la conspiration et dans des
assassinats ciblés. C’étaient des gens qui
vivaient avec le prophète. Ils ont été désignés par le Coran sous le nom « d’hypocrites ». C’est cette philosophie qui
persiste jusqu’à nos jours sous d’autres
formes. J’aimerais que les gens comprennent quelque chose. Il faut savoir
que l’histoire est révélatrice du mal. Ces
gens s’inspirent du passé et des évènements qu’ils réadaptent à leur contexte
et leurs idéologies. Sinon le mal demeure le mal. Le mal n’a pas famille, de
peuple, de religion ou de couleur.
Il peut se trouver qu’ils connaissent le
Coran, qu’ils prient et sont musulmans,
mais cela ne les dédouane pas du terrorisme. Nous devons juger les choses par
les actes. Et ici, les actes qui ont été
posés contre le peuple burkinabés sont
des actes de terrorisme, qui méritent des
sanctions. Quand vous partez en prison,
vous allez trouver des musulmans et des
Chrétiens. Est-ce que c’est la religion
qui est l’objet du délit ou de l’infraction
qui les y a conduit ? Celui qui a volé sera
jugé pour ce qu’il a commis. On ne cherchera pas à savoir si vous priez ou pas, si
vous savez lire la bible ou le Coran. Ce
qui intéresse la société, c’est pourquoi
vous avez volé ou tuer. Dans le cas précis des attentats, on a affaire à des bandits, des assassins. Tout le problème,
c’est le fait qu’ils tuent tout le monde
dans la trahison. Des gens de ce genre
quel qu’en soit leur apparence religieuse
n’ont pas une autre qualification que de
terroristes.
Votre mot de fin ?
Ce pays pourra sortir des problèmes qui
le guettent à l’instar des attentats et du
désordre que l’on veut installer si on met
Dieu au centre de nos supplications. Ensuite, c’est de former un bloc autour de
notre idéal d’intégrité pour ne pas permettre que des intrus divisent ce pays.
Nous avons les moyens, réfléchissons
calmement et resserrons les rangs afin
que les ennemis ne profitent pas. Et
enfin, c’est de prier pour les autorités et
pour les partenaires du Burkina, et leur
assurer que le mal est derrière. Qu’Allah
nous protège et protège notre chère patrie.

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

Culture

« La France sans les musulmans
ne serait pas la France »

Depuis de longues années maintenant, la présence des musulmans
en France, et leur rôle positif, est régulièrement questionnée, voire remise en cause. Après l’effroyable
tuerie de Charlie-Hebdo et de l’épicerie de l’Hyper Cacher, il y a tout
juste un an, et plus encore sans doute
depuis le 13 novembre 2015, qui a vu
de jeunes Français et de jeunes Européens se réclamant lâchement de
l’Islam assassiner froidement et
aveuglément des innocents en plein
cœur de Paris, ces interrogations se
multiplient de manière dangereuse et
inquiétante.

E

n effet, pas un jour ne se passe
sans qu’un article de presse ou
une analyse traitant des musulmans de France ne paraisse dans la
presse. Pas une semaine ne se passe
non plus sans qu’un commentaire ou
une opinion sur ces mêmes musulmans
n’émane d’une femme ou d’un
homme politique.
Aussi, en ces temps de « musulmanophobie » galopante qui s’ancre tous les
jours un peu plus en France, il est sans
doute opportun de rappeler à ces
femmes et hommes politiques, essayistes, polémistes et autres experts du
tube cathodique, ce que la France – et
l’Europe dans sa globalité – doit aux
musulmans.
La maison de la sagesse
et du savoir
Alors que l’Europe médiévale était entourée de superstition, de fanatisme, de
fatalisme, et d’autres irrationalités, le
monde arabo-musulman, sous l’impulsion des dynasties Omeyyade et Abbasside, représentait au contraire
la bayt al hikma, ou la « maison de la
sagesse et du savoir ». Et c’est
ce savoir qui a permis aux Européens
de sortir des ténèbres de l’ignorance
dans lesquelles ils étaient plongés, débouchant ainsi sur la Renaissance et les
Lumières.
Si l’on parle beaucoup aujourd’hui de
la nécessité pour l’islam de se réformer (ijtihad), n’oublions pas que les

divergences entre les philosophes musulmans tels qu’Al-Ghazali (10581111),
Ibn
Rushd
(Averroès,
1126-1198), Al-Farabi (827-950) ou
Ibn Sina (Avicenne, 980-1037) existaient déjà à cette époque, produisant
ainsi un terreau fertile et dynamique
aux débats (ikhtilaf). Critiquant les travaux d’Aristote (384 av. J.-C.-322 av.
J.-C.) dès le XIIe siècle, Averroès et Ibn
Tumart (1080-1130) furent aussi les
précurseurs de la distinction entre la
philosophie et le religieux, semant les
graines des Lumières et de la rébellion
contre l’Eglise.
Le développement de la science était
aussi une priorité pour les Arabo-musulmans de l’époque. A titre d’exemple,
les travaux des médecins grecs Claude
Galien (129-216) et Paul d’Egine (620690) qui trouvèrent écho en Europe ne
furent que le fruit du travail de traduction et de perfectionnement des Arabes,
en particulier ceux de l’alchimiste et
philosophe Al-Razi (Rhazès, 865-935),
auteur d’Al Hawi, une œuvre médicale
majeure. Les juifs qui vivaient en harmonie dans l’Andalousie musulmane,
et qui durent ensuite fuir la répression
de la Reconquista espagnole, emportèrent avec eux ce savoir médical qui a
ensuite permis d’élaborer l’étude de lamédecine dans des villes comme Montpellier.
Que seraient aujourd’hui les études sociologiques sans l’apport inestimable
d’Ibn Khaldoun (1332-1406), le père
de la sociologie moderne, dont le
concept d’asabiya, ou esprit de corps,
influença énormément la notion
de virtu de Machiavel (1469-1527) ? Et
que dire du mathématicien perse AlKhawarizmi (780-850), le père de l’algèbre et de l’algorithme, dont les
travaux permirent notamment de reconstruire la cathédrale de Chartres
qu’un incendie avait presque détruite
au XIIe siècle ?
La liste est longue. Mais comme l’écrit
si justement l’anthropologue Robert
Briffault (1876-1948) dans son
livre The Making of Humanity, « la
science [occidentale et par extension
française] doit bien plus à

la culture arabe que des découvertes ;
elle lui doit sa propre existence ».

Des liens historiques profonds
Qu’en est-il des musulmans et de leurs
liens avec la France depuis un siècle ?
Et de ces tirailleurs sénégalais qui combattaient au sein de l’armée française
lors de la première guerre mondiale ?
Ou bien du rôle des goumiers marocains face à l’Allemagne hitlérienne ?
Et que dire aussi de cette immigration
du XXe siècle qui contribua activement
aux Trente Glorieuses ? Très nombreux
sont ces hommes et ces femmes qui ont
perdu de leur santé en suant nuit et jour
sur les chantiers français, les usines Renault, Peugeot, les mines de charbon,
les constructions des routes et cités
HLM dans lesquelles ils vivent aujourd’hui dans les conditions que nous
savons. Ces hommes et ces femmes qui
ont toujours été très discrets, ont
constamment remercié la France de
leur avoir donné l’opportunité de
(re)construire une nouvelle vie. Ils ont
aussi fondé des familles dont les enfants font la France d’aujourd’hui.
Pour nombre d’entre eux, ces enfants
de confession musulmane sont aujourd’hui des femmes et des hommes
dont on ne parle pas mais qui, pourtant,
œuvrent tous les jours à la science et
aux technologies « made in France«
dans les nombreux laboratoires et centres de recherche à travers l’Hexagone.
Ce sont des médecins, des dentistes,
des cardiologues, des ophtalmologues,
des ingénieurs… Ce sont aussi des
coiffeurs pour les plus démunis, des
techniciens et des agents de surface,
des « Arabes du coin » tenant une épicerie ouverte jusqu’à tard dans la nuit.
C’est aussi le travailleur malien Lassana Bathily qui, au péril de sa vie, a
sauvé il y a un an des vies humaines en
les cachant dans la chambre froide de
l’Hyper Cacher. Ce sont aussi ces
femmes et ces hommes qui nous sourient tous les jours lorsqu’on les croise
dans la rue. Ce sont in fine tous ces
(in)visibles qui payent leurs impôts et
contribuent activement à l’économie de
la France.

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

Des intellectuels, des sportifs, des
symboles qui font la France
De son vivant, l’islamologue musulman Mohammed Arkoun (1928-2010)
faisait aussi la France avec ses nombreux travaux académiques qui ont
énormément contribué à la compréhension de l’islam. Citons aussi au hasard
le philosophe et anthropologue des religions Malek Chebel, l’écrivain Tahar
Ben Jelloun, la réalisatrice Yamina
Benguigui ou les journalistes Sonia
Mabrouk et Rachid Arhab, ce dernier
ayant été aussi membre du CSA.
La France ne peut pas non plus être dissociée de ces nombreux sportifs français de confession musulmane qui
contribuent à son rayonnement en faisant retentir La Marseillaise aux quatre
coins du monde. Prenons par exemple
le judoka Djamel Bourras, champion
olympique à Atlanta en 1996, MahiedineMekhissi, double vice-champion
olympique du 3 000 m steeple, ou encore le marathonien Alain Mimoun,
champion olympique à Melbourne
en 1956.
Il est important de rappeler qu’aujourd’hui le symbole par excellence de
la France à New York, Tokyo, Londres,
Cape Town ou Berlin n’est plus le camembert ou la baguette mais Zinédine
Zidane, un homme de confession musulmane. En ces temps de musulmanophobie et d’arabophobie nauséabondes,
il serait bon de sesouvenir aussi que
c’est sa tête qui a permis à la France
de remporter ce qui demeure à ce jour
sa seule et unique Coupe du monde
de football, un soir de juillet 1998.
Oui, sans hésitation aucune, la France
sans les musulmans ne serait pas la
France. A cet égard, il ne faut pas oublier qu’il coule très probablement dans
les veines de beaucoup de Français,
hommes politiques y compris, quelques
gouttes de sang de Boabdil le musulman, qui capitula sous les coups de
boutoir de la Reconquista.
Abdelkader Abderrahmane est analyste et consultant géopolitique
In Le monde

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Culture
ASSASSINAT DE KHADAFI

Les vraies raisons se précisent peu à peu

L’actualité ces jours-çi a remis sur le
devant de la scène un dossier récurrent, celui des causes de la mort du
leader libyen Mouammar Kadhafi.
On aura tout dit sur les conditions
abjectes de sa mort et comment l’impunité mondiale fait que les assassins
sont dans la nature et les commanditaires pas inquiétés. C’est dire si la
Cour pénale internationale est défaillante et au final n’est véritablement conçue que pour juger les
faibles de ce monde.

Les causes de l’invasion de la Libye
et du meurtre deKadhafi
On sait que les médias main
stream nous servent en boucle une version soft celle de l’humanisme des
pays occidentaux vis-à-vis de la barbarie de Kadhafi envers son peuple.
Qu’en est-il exactement? C’est un fait
que Kadhafi n’était pas un enfant de
cœur, il a dû éliminer ses opposants
pour asseoir un pouvoir sans partage de
40 ans en pensant le léguer à ses enfants. Une sorte de Jamahiriya dynastique. Mais le peuple profond était-il
malheureux? Mangeait-il à sa faim? La
Libye avait le deuxième niveau de vie
en Afrique. Une nouvelle monnaie
unique africaine serait la véritable
cause de l’intervention française en
Libye. En effet, d’après les éléments
trouvés dans les lettres de Hillary Clinton déclassifiées le 31 décembre, la
vraie raison de l’intervention en Libye
était l’or qui aurait pu empêcher les
plans de Nicolas Sarkozy de répandre
son influence dans la région.
La correspondance de l’ancienne secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a montré qu’en 2011, Mouammar
Kadhafi possédait 143 tonnes d’or et
143 tonnes d’argent avec lesquels il
souhaitait créer une nouvelle monnaie
unique pour l’Afrique et fournir aux
pays francophones africains «une alternative au Franc CFA». «L’or avait
été rassemblé avant la révolte actuelle
et devait être utilisé pour la création
d’une monnaie panafricaine basée sur
le dinar libyen», lit-on dans le courriel
de l’ex-secrétaire d’Etat américain, Le
courriel confidentiel d’Hillary Clinton

10

sur les vraies raisons de l’engagement
français en Libye: au total, la valeur de
ces réserves s’élevait à près de 7 milliards de dollars.
D’après le même document, le gouvernement de Nicolas Sarkozy craignait
que cette nouvelle monnaie permette à
l’Afrique du Nord d’acquérir une indépendance économique, qui n’aurait pas
fait les affaires de la France et de toute
l’Europe. L’intervention militaire en
Libye a commencé en 2011 sous
l’égide de l’Organisation des Nations
unies et s’est déroulée entre le 19 mars
et le 31 octobre 2011 pour mettre en
œuvre la résolution 1973 du Conseil de
sécurité pour protéger les populations
libyennes.»
Pour Nicolas Sarkozy: «Pas question
de laisser les colonies françaises
d’Afrique avoir leurs propres monnaies!» Apparemment, l’ancien président de la République française s’est à
nouveau illustré dans des propos choquants.
Les menaces que constituent
le pétrole et l’or libyens face
aux intérêts français
On prêtait à Kadhafi outre son rôle de
mécène et d’aide sans contrepartie aux
pays africains au point d’avoir pu stabiliser dans une certaine mesure l’immigration sahélienne, le désir de doter
les Etats «CFA3 » d’une nouvelle monnaie. C’est sans doute cela qui a dû signer son arrêt de mort.
«Un e-mail envoyé à Hillary Clinton
en avril 2011 avec pour objet «les
clients de la France et l’or de Kadhafi»
révèle des ambitions beaucoup moins
nobles. L’e-mail identifie le président
français Nicolas Sarkozy en tant que
leader de l’attaque sur la Libye avec
cinq objectifs précis en tête: obtenir le
pétrole libyen, assurer l’influence française dans la région, accroître la réputation de Sarkozy au niveau national,
affirmer la puissance militaire française, et éviter l’influence d’Kadhafi
dans ce qui est considéré comme
«l’Afrique francophone». Le plus étonnant est la longue section relatant
l’énorme menace que l’or et l’argent
des réserves d’Kadhafi, estimées à

«143 tonnes d’or, et un montant similaire en argent» pourraient poser au
«franc français» (CFA) en circulation
comme monnaie africaine en Afrique
francophone. Ce plan a été conçu pour
fournir aux pays africains francophones une alternative au franc (CFA).

Le discours prémonitoire
de Kadhafi
On prête à Kadhafi des propos prémonitoires d’une rare lucidité:
«Chacun de nous peut être pendu par
les Etats-Unis comme l’a été Saddam
Hussein, ancien président d’Irak», a
prévenu le défunt colonel Mouammar
Kadhafi lors de son discours prémonitoire au sommet de la Ligue des États
arabes en 2008. ´´Une puissance étrangère vient chez nous, occupe un pays
arabe, pend son président et nous tous,
simplement, le regardons de l’extérieur. Pourquoi n’a-t-on pas fait d’enquête sur l’exécution de Saddam
Hussein? Comment peut-on pendre un
prisonnier de guerre, un président d’un
pays arabe qui fait partie de cette même
Ligue des États arabes?´´, a-t-il fustigé ».
«Chacun de vous peut être le suivant´´,
a prévenu M. Kadhafi. Il a rappelé que
les Etats-Unis avaient lutté contre l’ancien guide de la Révolution de l’Iran
RouhollahKhomeini avec Saddam
Hussein, qu’ils qualifiaient alors d’ami.
M. Hussein était lié d’amitié avec l’ancien vice-président des États-Unis
Dick Cheney et l’ancien secrétaire de
la Défense Donald Rumsfeld. ´´Finalement, ils l’ont trahi et ils l’ont pendu.
Vous êtes amis de l’Amérique. D’accord, pas ´´vous´´ mais ´´nous´´ – mais
un jour l’Amérique peut nous pendre,
nous aussi´´.
Dans son discours M. Kadhafi
s’adresse également aux Etats-Unis
pour les interpeller sur le pourquoi de
l’intervention précisément en Irak.
´´Où est la raison de l’occupation de
l’Irak? Ben Laden est citoyen d’Irak?
Non. Ceux qui ont fait l’attentat à
New-York étaient-ils irakiens? Non.
Ceux qui ont attaqué le Pentagone
étaient-ils irakiens? Non. Est-ce que
l’Irak possédait des armes de destruc-

tion massive? Non. Même s’il y en
avait…L’Inde, le Pakistan, la Chine, la
Russie, le Royaume-Uni, la France et
les Etats-Unis ont des bombes nucléaires. Faut-il détruire tous ces
Etats?´´, s’est-il exclamé ».
Ces propos étaient prémonitoires pour
Mouammar Kadhafi lui-même, car il
trouva la mort 3 ans après ce discours.
En Libye c’est actuellement le chaos.
Avec plus de 55 morts cette semaine
dans deux attentats, début janvier 2016
la Libye s’enfonce de plus en plus dans
les affres d’un État failli. Ingouvernable avec ses deux gouvernements qui
s’opposent, le vide politique profite
aux partisans de l’État Islamique (EI)
qui cherchent à s’implanter durablement aux portes de l’Europe. Le nombre de morts libyens se compte
désormais par dizaines de milliers, sans
compter les centaines de milliers de réfugiés et de blessés.»
De fait, les dirigeants occidentaux ont
toujours eu la volonté de bien faire
comprendre que la destinée de
l’Afrique, comme à l’époque de la
Conférence de Berlin et du partage de
l’Afrique en 1885, se décidait encore
de nos jours dans les capitales occidentales.
La prochaine guerre à laquelle participera l’Italie, celle contre la Libye, cinq
ans après la première est sur les rails.
La Libye va être de nouveau ré-envahie par des forces spéciales Sas -rapporte le Daily Mirror- qui sont déjà en
Libye pour préparer l’arrivée d’environ
1000 soldats britanniques. L’opération
-«dans un accord Etats-Unis, GrandeBretagne, France et Italie»- impliquera
6000 soldats et marines états-uniens et
européens avec l’objectif de «bloquer
environ 5000 extrémistes islamistes,
qui se sont emparés d’une douzaine des
plus grands champs pétrolifères…) le
but réel est l’occupation des zones côtières économiquement et stratégiquement les plus importantes. Guerre qui,
comme en 2011, sera présentée comme
«opération de maintien de la paix humanitaire». (7)
Rien de nouveau sous le soleil. Il n’y
a ni morale, ni droit de l’homme dans
cette ère du capitalisme néolibérale
sans état d’âme. Périssent les faibles et
les ratés. Ainsi va le monde.
Professeur ChemseddineChitour
Ecole Polytechnique enp-edu.dz

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

Economie
RIBA

Pourquoi l’Islam interdit-t-il l’usure ?

L’Islam interdit formellement les prêts à
intérêt. Pourquoi ? Pour quelles raisons ?
Quelle sagesse se cache derrière cette interdiction ? C’est le début d’une série
d’article pour élucider la question.
Rassemblés par MD

1) Qu’est-ce que l’intérêt perçu sur les
prêts ? Qu’est-ce que l’islam a interdit à
propos de cet intérêt ?
Il s’agit du surplus qui est perçu lors du remboursement d’un prêt et qui avait été stipulé
comme condition
L’intérêt est donc présent dans un prêt dès
que trois conditions y sont présentes:
1) il y a un surplus par rapport à la somme
initiale (le prix fixé dans le cas d’une vente,
ou la somme prêtée dans le cas d’un prêt) ;
2) ce surplus est la pure contrepartie du délai;
3) ce surplus fait l’objet d’une condition dans
la transaction (que cette condition ait été
mentionnée explicitement ou qu’elle soit
considérée comme présente à cause de
l’usage).
Il n’y a pas de différence en islam entre intérêt et usure.
Il n’y a pas non plus en islam de différence
entre les prêts à intérêt destinés à la consommation et les prêts à intérêt destinés à l’investissement. Il n’y a pas non plus en islam
de différence entre les intérêts qui augmentent au fil du temps quand le débiteur ne parvient pas à régler sa dette, et les intérêts fixés
une fois pour toutes au moment du prêt.
Le fait de percevoir des intérêts grâce à un
compte épargne, c’est également percevoir de
l’intérêt.
De plus, il faut savoir que si l’islam a interdit
de percevoir de l’intérêt sur les prêts (aklarribâ), il a aussi interdit de contracter un emprunt à intérêt et de verser cet intérêt
(îkâlar-ribâ) (voir les Hadîths rapportés par
al-Bukhârî, n° 5032, Muslim, n° 1597). Aucune circonstance exceptionnelle ne peut autoriser la pratique du prêt à intérêt
(aklar-ribâ). Par contre, dans un cas de nécessité absolue (dharûra), une personne peut
être amenée exceptionnellement à avoir recours à l’emprunt à intérêt (îkâlar-ribâ) ; les
conditions en sont malgré tout très sévères et
cela ne peut être traité qu’au cas par cas par
le mufti de chaque localité (voir ces conditions dans Jadîdfiqhîmassâ’ïl, pp. 394-395,
et surtout dans Al-Halâlwa-l-harâm, pp. 232233). Dans un autre Hadîth (rapporté par

Muslim, n° 1598), le Prophète a aussi interdit d’écrire (kitâba) des contrats de prêts à intérêt et de servir de témoin (shahâda) à de tels
contrats.

2) Pourquoi l’islam a-t-il interdit l’intérêt
alors qu’il a autorisé le profit sur la vente
et le loyer sur les locations ?
Dieu dit dans le Coran : «Dieu a permis la
vente et interdit l’intérêt» (Coran 2/275). Il
s’agit de l’intérêt perçu sur les prêts («ar-riba
fi-l-qurûdh»). Le Coran et les Hadîths n’ont
fait que dire la règle sans en mentionner la
raison. Ce sont des savants musulmans qui
ont fait des efforts pour exprimer cette différence. Ce qui suit est extrait de leurs recherches.
1.1) L’intérêt est un gain obtenu sans travail et sans prise de risque digne de ce
nom:
L’intérêt constitue un prélèvement, sans participation aucune (même au niveau d’une
simple prise de risque), sur le travail d’autrui
(cf. L’économie dans l’islam, Ben Halima
Abderraouf, p. 11). L’intérêt est un loyer obtenu sur le prêt de monnaie, ou encore un bénéfice obtenu sur la vente de monnaie. Or
l’islam rend nécessaire que le gain résulte
d’un travail ou au moins d’une participation
par la prise de risque (cf. Fawâ’ïdul-bunûkhiya-r-riba-l-muharram, al-Qardhâwî, p.
47). Nous allons voir ci-après en quoi l’intérêt diffère aussi bien du loyer perçu sur les
services et les locations que du bénéfice obtenu à partir du commerce d’autre chose que
la monnaie...
1.2) Pourquoi l’intérêt n’est-il pas comparable au loyer perçu sur les services et les
locations ?
Certaines personnes justifient l’intérêt en le
présentant comme la contrepartie du service
que constitue la location de la monnaie. Elles
disent : «Vous dites qu’il est injuste que le
propriétaire de l’argent touche une somme
fixe et certaine sur la somme d’argent qu’il a
prêtée, et que les risques de perte soient supportés seuls par celui qui a emprunté cet argent pour monter son entreprise ! Or vous
autorisez bien le fait que les propriétaires
d’immeubles, de machines, de camions, etc.
touchent une somme fixe et certaine
lorsqu’ils louent ces biens à celui qui monte
son entreprise ! Pourtant, ici aussi celui qui
a monté son entreprise et emploie ces biens

pour la faire fonctionner supporte seul les
risques de perte ; en effet, ceux qui lui ont
loué ces biens touchent eux une somme fixe et
certaine, que vous appelez un loyer et que
vous autorisez. L’intérêt perçu sur l’argent
est donc semblable au loyer perçu sur les immeubles, machines et camions loués !»
La réponse est qu’en fait, loyer et intérêt ne
sont pas la même chose. Tout tient au caractère particulier de la monnaie par rapport aux
autres biens matériels. Lors de la vente de
services (ce qu’on appelle une location), la
somme appelée loyer est une compensation
parce que l’objet qui est loué s’use peu à peu
et perd donc de sa valeur au fil du temps. Il
est donc tout à fait normal qu’une contrepartie soit donnée au propriétaire pour le service
qu’il en a rendu possible en le louant. Cependant, si l’islam a permis la location des
biens tels que ceux évoqués (c’est une vente
des services) et a interdit la «location de la
monnaie», c’est eu égard au statut particulier
de la monnaie : qu’on soit son propriétaire ou
qu’on l’ait empruntée, qu’elle soit sous forme
de pièces ou de billets, la monnaie ne peut
pas être utilisée par elle-même, mais doit nécessairement, pour pouvoir être utilisée, être
échangée contre un autre bien que possède
une autre personne (ce qui est tout à fait normal puisque la monnaie est, par définition
même, ce qui sert de valeur de réserve et
d’échange). Or la valeur de la monnaie ne diminue pas à cause de cet échange et de cet
usage, contrairement aux autres biens qui
sont loués. La contrepartie n’a donc pas de
raison d’être.
1.3) Pourquoi l’intérêt n’est-il pas comparable au bénéfice perçu sur la vente ?
Dès l’époque du Prophète (sur lui la paix), les
idolâtres de la Mecque – parmi lesquels il y
en avait qui s’enrichissaient par les prêts à intérêt – avaient fait l’objection suivante :
«Comment l’intérêt perçu sur les prêts d’argent pourrait-il être interdit quand, selon l’islam même, le bénéfice perçu sur les ventes de
marchandises est autorisé ? Le (bénéfice
perçu sur) la vente est après tout semblable à
l’intérêt (perçu sur le prêt) !»
La réponse est qu’en fait, non, les deux ne
sont pas comparables. Celui qui vend une
marchandise l’a soit lui-même fabriquée en
assemblant et en travaillant des matières premières, soit l’a achetée toute faite à quelqu’un
d’autre. Le bénéfice qu’il perçoit est, dans le
premier cas, la contrepartie de la valeur qu’il

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

a ajoutée aux éléments composant la marchandise, et, dans le second cas, la contrepartie du transport et de la prise de risque
qu’il a supportées. Acheteur comme vendeur
tirent donc profit de la transaction qu’ils ont
réalisée, le premier en obtenant la marchandise qu’il va utiliser ou va revendre, le second
en prenant un bénéfice. Chacun a pris possession de son bien, et l’affaire est close.
Par contre, un prêt n’est pas une vente, et l’intérêt que prend celui qui prête de l’argent
n’est la contrepartie ni d’une valeur ajoutée,
ni d’un transport, car il n’y a rien eu de tout
cela; l’intérêt n’est la contrepartie que du
délai accordé à celui qui lui a emprunté l’argent. Or la contrepartie sur un délai pur n’est
pas équitable. En effet, si l’emprunteur a
contracté le prêt pour acheter des biens ou des
services qu’il consommera lui-même, alors il
est certes équitable qu’il rembourse la somme
empruntée, mais il n’est pas normal qu’il
doive payer un surplus pour le seul délai qui
lui a été accordé. Et si l’emprunteur a
contracté le prêt pour investir dans un projet
commercial ou industriel, il est équitable
qu’il rembourse le prêt mais il ne l’est pas que
toute perte soit comptée au détriment de
l’emprunteur alors que le prêteur soit pour sa
part certain de toucher son «bénéfice» – l’
«intérêt» – sur le délai. Ouvrir la porte à une
contrepartie du seul délai, c’est ouvrir la porte
à l’exploitation la plus grande. En effet, si
l’emprunteur ne peut pas s’acquitter de ce
qu’il doit à l’échéance voulue, le délai étant
prolongé, la contrepartie le sera d’autant, ce
qui multipliera le montant dû. Je disais qu’un
prêt d’argent n’est pas une vente et qu’aucun
profit n’est possible lors d’un prêt, contrairement à ce qui se passe lors d’une vente. Cependant, dans le cas d’une vente aussi il peut
y avoir de l’intérêt au cas où s’y réalise le
principe «somme d’argent comme pure
contrepartie du délai». C’est bien pourquoi
même ceux des savants qui pensent que la
vente à tempérament (bay’ bi-t-taqsît) est permise y énoncent comme condition que le prix
à payer soit fixé une fois pour toutes au moment de conclure l’acte, et qu’il ne subisse
ensuite plus d’augmentation ; cliquez ici pour
lire mon article sur le sujet. C’est aussi pourquoi l’escompte n’est pas autorisée (dha’
wata’ajjal) ; il s’agit du cas où le prix et
l’échéance du paiement ont été fixés, mais où
le vendeur édicte comme condition pour accorder une ristourne à l’acheteur que celui-ci
le paie avant l’échéance fixée : ici aussi une
partie de la somme est devenue une pure
contrepartie du délai, et cela est donc interdit
(voir Islâm aurjadîdma’âshîmassâ’ïl, pp.
271). A suivre…
Source : La maison de l’Islam

11

Le Saviez-vous

Le remuent et le gonflement de la terre

De même tu vois la terre desséchée:
dès que Nous y faisons descendre de
l’eau elle remue, se gonfle, et fait
pousser toutes sortes de splendides
couples de végétaux. (Sourate alHajj, verset 5)

L

e mot arabe pour “remue” dans
le verset ci-dessus est ihtazzat
qui signifie “être en mouvement, prendre vie, trembler, se remuer”. Le mot rabat traduit par “se
gonfle” a les nuances de sens suivantes
: “augmenter, accroître, enfler, grandir,
se développer, pousser (une plante),
remplir d’air”. Ces termes décrivent au
mieux les changements qui se produisent dans la structure moléculaire du
sol au cours de la pluie.
Le mouvement décrit ici est différent
de celui de la croûte terrestre qui se
solde par un tremblement de terre, car
seules les particules du sol se déplacent. Ces particules sont composées de
couches empilées. Quand l’eau pénètre
dans les couches, elle provoque le gon-

flement des particules de boue. Les
étapes citées dans le verset s’expliquent
scientifiquement comme suit :

LE REMUEMENT DE LA TERRE
La charge électrostatique sur la surface
de la particule qui apparaît après la
tombée de la pluie en quantité suffisante sur terre peut causer l’instabilité
et donc des mouvements de tremblements.
Ce mouvement n’est stabilisé que
lorsque cette charge est neutralisée par
une charge opposée. Le mouvement
des particules doit aussi être attribué à
sa collision avec les particules d’eau.
Dans la mesure où les particules d’eau
ne se déplacent dans aucune direction
particulière, les particules terrestres
bougent car elles sont frappées de tous
les côtés.
Robert Brown, un botaniste écossais,
découvrit en 1827 que lorsque les
gouttes d’eau touchent le sol, elles provoquent une sorte de vibration dans les
molécules terrestres. Il baptisa ce mou-

Parlons-en

vement de particules microscopiques
“le mouvement brownien”.

que nombres de produits puissent en
émerger.

LE GONFLEMENT DE LA
TERRE
Quand il pleut, ces gouttes d’eau qui
touchent la terre provoquent le gonflement et l’augmentation de volume de
ces particules. Quand l’eau est abondante, l’espace entre les particules de
la terre, qui permet aux particules d’eau
et aux ions dissolus d’entrer, augmente.
Quand l’eau et les nutriments dissolus
se diffusent entre les couches, la taille
des particules de terre augmente. Par
conséquent ces particules servent de
dépôts d’eau donnant la vie à la terre.
L’infinie grâce d’Allah envers l’humanité veut que cette eau soit emmagasinée de la sorte sans qu’ils s’enfoncent
par l’effet de la gravité. Si la terre ne
pouvait pas retenir l’eau et ces dépôts
de minéraux, l’eau s’enfoncerait dans
les profondeurs de la terre, condamnant
les plantes de vie. Toutefois, notre Seigneur a créé la terre de manière à ce

LA GERMINATION
DE LA TERRE
Quand il y a assez d’eau dans la terre,
les graines deviennent actives en absorbant des matières nutritives simples.
Les plantes en pousse ont leur réserve
en eau pour deux ou trois mois dans ces
dépôts. Le Coran décrit en trois étapes
ce qui se produit quand la pluie tombe
sur une terre sèche : les particules terrestres remuent, la terre se gonfle et
offre enfin ses fruits. En dépit de l’âge
de ces révélations (1400 ans), elles sont
parfaitement exactes et conformes à ce
que la science a dévoilé.

DJIHADISTES OU TERRORISTES ?

Ne pas tomber dans le piège

Il est incommode que certains médias et certains intellectuels utilisent
l’appellation djihadiste pour désigner les terroristes. Pourtant, les savants musulmans ont apporté un
éclaircissement sur la question, faisant la stricte différence entre la notion de Jihad et le terrorisme. A
l’usage excessif du terme Jihad,
d’une manière involontaire ou à dessein, cela laisse planer le doute et ne
manque pas de créer des amalgames
au niveau des populations.

L

es terroristes arborent l’apparence de musulmans et se font
designer Jihadistes dans leurs
discours. Ils disent qu’ils sont chargés
de défendre la cause de l’Islam. Dans
une telle entreprise, depuis les attentats
du 11 septembre 2001 jusqu’à nos

12

UN AUTRE VERSET
Une preuve pour eux est la terre morte,
à laquelle Nous redonnons la vie, et
d’où Nous faisons sortir des grains dont
ils mangent. (Sourate Ya-Sin, 33)
Source : miracle du coran.com

jours, ce sont des milliers de familles
qui sont endeuillées par ces hommes
sans foi ni loi. Au nombre de leurs victimes figurent des vieilles personnes,
des femmes, des enfants. Ces actes causent également des dégâts matériels
inestimables. Leurs modesopératoires
demeurent des attentats à la voiture piégée, le kamikaze, la décapitation de
leurs otages et les incendies des villages. Ils sèment le désordre de la terreurpour rendre le monde confus et
ingouvernable. De l’autre côté, en
Islam, les textes scripturaires condamnent fermement une telle barbarie les
assimilant à des crimes. La majorité des
musulmans sur la terre se battent pour
un monde de justice et d’égalité, où il
fera bon vivre entre les habitants de la
terre. Ils ne se reconnaissent en aucun
moment dans le terrorisme ou ceux qui
tuent femmes, enfants, vieux, des personnes d’autres confessions religieuses.Ces vrais musulmans sont
majoritaires dans toutes les sociétés.
Quid du terme djihad employé pour les
désigner ?

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

Parlons-en
Les huit années de guerre
pendant lesquelles l’Islam
a livré bataille contre les
persécuteurs mecquois
l’ont été pour se défendre.
Malgré cette urgence, il y
avait des règles à respecter. Le prophète (psl) disait à ses combattants de
ne pas tuer les femmes, ni
les vieux, ni les enfants. Ils
ne devraient combattre
que contre ceux qui les
combattent. Il leur était interditd’empoisonner l’eau,
d’abattre les arbres. Ils devraient même avoir du respect envers l’adversaire.
Le Coran le dit à maintes
reprises, qu’il n’y a pas de
contrainte en religion. Le
noble Coran indique au
prophète qu’il n’est pas
celui qui est chargé de
guider les gens égarés et
que cela revenait à Dieu ;
sa mission en tant que prophète se bornait à la transmission du message.
C’est pourquoi, désigner
ces terroristes par le terme
djihadistes, c’est véritablement vider le terme djihad
de son contenu.
Quelques exemples :
1°) le Coran dit de ne pas
contraindre à la foi : Les
terroristes assassinent en
foulant au pied cette injonction.
2°) Le Coran dit de pardonner même si on a raison : Les terroristes tuent
même quand ils ont tort.
3°) Le Coran prône la diversité des religions et des
cultes : Les terroristes veulent obliger tout le monde
à devenir musulmans.
Pire, ils tuent même les
musulmans.
4°) Le prophète (saw) interdit de tuer les femmes,
enfants et vieilles personnes pendant le combat:
les terroristes tuent sans
distinction.

5) Le Coran préconise de
ne combattre que ceux qui
vous combattent : Les terroristes combattent tout le
monde, ils surprennent les
gens dans les cafés, dans
les mosquées, dans les cérémonies, qui sont sans défense,et ils les tuent sans
état d’âme.
6) Le prophète a interdit
de paralyser l’économie en
temps de combat à l’instar
de l’interdiction faite,
d’empoisonner l’eau : Les
attaques des terroristes
plombent l’économie d’un
pays comme c’est le cas
du Burkina Faso.
7) la règle en islam en période de guerre, c’est de ne
pas être le premier à attaquer et surtout de regarder
l’ennemi en face : Contrairement aux Terroristes, qui
poignardent leurs adversaires dans le dos, ils attaquent par surprise et de
façon asymétrique.
Au regard de ces exemples, ce serait un honneur
pour les terroristes d’être
désignés djihadistes. Les
appelerainsi, c’est leur
donner de l’importance
dans leur sale besogne.
Car en Islam, le Jihad est
noble. Les terroristes sont
fiers d’entendre sur les
mass medias qu’on les
traite de Jihadistes. Si l’on
les traitait réellement de
terroristes et d’une manière unanime, en les présentant
simplement
comme des terroristes, des
assassins, tout simplement, même si cela ne
changerait rien en eux, on
aura quand même le mérite de ne pas assimiler le
jihad à la terreur, ou les
djihadistes aux terroristes.Les médias doivent
jouer ce rôle.
AROUNAN GUIGMA

PIERRE N’KURUNZIZA

L’inspiration de Dieu ou du diable ?
Venu au pouvoir en 2005, le
président Burundais Pierre
N’Kurunziza donne du fil à
retorde à son peuple et à la
communauté internationale.
La constitution de son pays
interdit un troisième mandat.
Contre vents et marée, cette
loi a été révisée pour permettre au Président d’aller aux
élections dans des conditions
instables afin de briguer un
troisième
quinquennat.
Chose qui a été faite. Les opposants et les populations qui
ont affiché leur mécontentement face à cette obstination
de N’Kurunziza, ont payé la
lourde tribu avec des dizaines,
voiredes centaines de cadavres
et des milliers de déplacés. Des
tentatives de négociations de
l’UA et de la communauté internationale sont soldées par
un échec puisque le Pasteur
président affirme être investit
par la volonté de Dieu.

L

es scènes de violences
suite à l’élection présidentielle, ainsi que la
tentative du coup d’Etat avortée
du général Lombaré, ont décuplé
la haine et la persécution policière contre les quartiers dits de
l’opposition, les OSC et autres
défenseurs des droits de
l’homme. Très souvent des enlèvements, des assassinats arbitraires sont constatés dans ce
pays. Le pays traverse une crise
politico-humanitaire assez grave
et sans précédent, note Cecile
Kyenge, originaire de RDC, et
députée européenne et ancienne
ministre de l’Intégration italienne. Elle a été chef de la mission d’observation de l’Union
européenne pour les élections au
Burkina Faso en 2015. Au regard
des analyses de cette diplomate
et bien d’autres informations
glanées, on constate que l’heure
est grave au Burundi si bien qu’il
sera difficile pour ce pays de sor-

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

tir de cebourbier tant que le président est assisté par « l’esprit
saint » qui se nourrit de
sang.Tout le problème dans cette
histoire se trouve justement dans
le syncrétisme de N’Kurunziza
entre la république et l’église. Il
n’est pas arrivé à faire la séparation de la sphère politique à
celle de l’état. Il est rapporté que
lui-même est un pasteur évangéliste et que sa femme également,DéniseBuccumi,
est
pasteure dans une église évangéliste. Au Burundi, l’on sait que
chaque Conseil des ministres débute avec une prière collective
conduite par le Chef de l’État,
que des prophéties avancent
qu’il a été choisi par Dieu pour
diriger le pays plutôt que par le
peuple, que le club de football
qu’il a fondé s’appelle Alléluia
Club ?
La confusion qui règne dans ce
pays avec cette double fonction
du président nécessite qu’il y ait
des interventions extérieures afin
d’éviter que ce pays plonge dans
un chaos définitif. Dans un article que Jeune Afrique a publié,
l’on recense cet autre propos
d’une député burundaise qui n’a
pas hésité à invoquer « la force
qui a été donné par Dieu » au
président burundais « pour résister contre toute opposition et

les pressions occidentales».
Au regard d’une telle déclaration, on assiste à une évangélisation complète et répressive
par le pouvoir de Bujumbura.
Rappelons que même si ce
pays est à majorité chrétienne,
il y a également d’autres sensibilités religieuses. En revanche, ce scenario du couple
présidentiel évangéliste, qui a
violé le droit du peuple burundais et continue de réduire au
silence toute voix qui serait à
l’encontre du pouvoir, n’est
qu’une pure instrumentalisation de l’évangile et de la religion chrétienne. La soif du
pouvoir de N’Kurunziza l’amène
à vouloir imposer son diktat au
vu et au su de la communauté internationale. Touchons du bois.
Si N’Kururnziza était de confession musulmane, et disait agir au
nom de l’islam, l’on crierait sur
tous les toits et dans tous lesmédias
de
l’extrémismede
l’homme. Nous interpellons
cette communauté internationale
à mettre fin à ce diktat de N’Kurunziza, qu’il comprenne que le
droit lui est réservé de croire en
Dieu et à son pouvoir et d’y faire
la promotion. Mais de vouloir
d’une inspiration divine sévir le
peuple au moyen de la violence
avec ces dizaines, voire ces centaines de morts, beaucoup de
blessés et des milliers de déplacés, nul doute que cela relève des
inspirations d’un esprit diabolique. Il n’y a que le diable qui
peut inspirer à un humain de
s’accrocher au pouvoir au besoin
en marchant sur des cadavres de
ses compatriotes. Il faut véritablement, que les uns et les autres
arrêtent d’assimiler Dieu à leurs
lubies. Le cas de Pierre est assimilable à celui de ces terroristes,
fous d’Allah, qui disent tuer les
gens au nom de l’Islam. De quel
Dieu parle-t-on ?
AROUNAN GUIGMA

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Monde Musulman
OCDE

Israël en seconde position
dans les inégalités

L’OCDE a annoncé qu’Israël était le second pays
au monde où les inégalités sont les plus importantes. L’étude a été présentée au Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et au ministre
de l’Economie Moshe Kahlon.
Bien qu’Israël fasse partie des « pays les plus
développés », il n’empêche que l’écart entre pauvres et riches est très important, si bien qu’il se
retrouve à la seconde place du classement. La
première place des inégalités revient au
Mexique, lui seul a réussi à dépasser l’état colonisateur en termes d’écarts au sein de la population. Cela dit, les pays les plus égalitaires d’après
l’OCDE sont le Danemark, la Norvège ou encore
la Slovénie. Malgré ce résultat navrant des inégalités en Israël, le ministre de l’Economie s’est
dit satisfait des conclusions de cette étude. Il a en
effet souligné : « l’OCDE affirme sans équivoque que l’économie d’Israël est stable », comme
le rapporte i24. Le souci n’est pas tant de relever la stabilité économique de l’Etat sioniste
mais de faire face aux inégalités constatées.
D’après un second rapport de l’OCDE, Israël se
retrouve en tête des pays pauvres dans l’OCDE.
Au-delà de ces inégalités et de cette pauvreté, Israël poursuit sa colonisation en toute impunité.
En début de semaine, l’armée israélienne a d’ailleurs détruit plusieurs dizaines d’habitations
en Cisjordanie, financées par l’Union Européenne.

ALGERIE

Des exemplaires du Saint Coran
en Braille distribués aux personnes aveugles et malvoyantes

Certains musulmans aveugles à travers le monde
ne s’arrêtent pas à leur handicap et recherchent la
science, notamment par le biais de la lecture du
Saint Coran et des livres de sciences islamiques.
C’est ainsi que le gouvernement algérien a mis à
la disposition des personnes aveugles et malvoyantes des exemplaires du Saint Coran ainsi que
des livres religieux en braille. Les individus atteints de cécité pourront ainsi se procurer ces livres au sein du ministère des Affaires religieuses.
Cette nouvelle a été annoncée dimanche par BaddredineFilali, le responsable des publications et
du patrimoine islamique au Ministère des affaires
religieuses et du Waqf sur la chaîne coranique algérienne.
Monsieur Filali a précisé que toute personne faisant la demande auprès du ministère pourra avoir
gratuitement des livres religieux en braille. Cette
initiative représente une grande nouvelle, bien
que le Saint Coran soit disponible en braille depuis 1994 en Algérie. En effet, ces exemplaires
se distinguent de par leur volume réduit par rapport aux écrits religieux en braille déjà existants. Le responsable des publications explique
que pour certains ouvrages, le volume est très
dense en braille, comme le Tafsir d’Ibn Kathir.
Qu’Allah facilite à nos frères et sœurs atteints de
handicap. Qu’Il les assiste dans leur pratique, à
chacune des étapes.

14

FRANCE

La journée Mondiale du Hijab 2016
interdite à Lyon

Chaque année, la World Hijab Day rassemble de
plus en plus de personnes. Cette journée initiée
par une jeune new-yorkaise, Nazma Khan, est
déjà bien ancrée outre atlantique, et dans tous les
pays anglo-saxons. En soutien aux femmes qui
ont choisi de porter le hijab, la journée a su s’exporter dans d’autres pays. Cet événement qui
a pour objectif de sensibiliser les passants dans la
rue, organiser des rassemblements, et des conférences sur le thème du hijab, s’illustre aussi très
largement, sur les réseaux sociaux.
En France, la journée « World Hijab Day » est
d’autant plus importante que ce signe dérange
dans une société où le hijab est très mal perçu.
Les femmes qui ont choisi de le porter rencontrent ainsi de nombreux obstacles notamment
dans la recherche d’emploi. Elles sont en effet
régulièrement victimes de discrimination. Mais
la journée mondiale du Hijab qui se tient le 1er
février n’aura pas lieu à Lyon, en raison d’une
interdiction préfectorale. Pourtant, la première
édition qui s’est déroulée en 2015 avait rencontré un vif succès dans les rues lyonnaises. Lyon
avait d’ailleurs été la première ville de France à
accueillir la World Hijab Day.
Sur la page officiel Facebook de l’événement, les
organisateurs expliquent le jeudi 28 janvier, que
ce rassemblement « a été jugé par le Préfet de
Lyon comme « risquant d’engendrer des mouvements de foules dangereux ». Les motifs de cette
annulation ne sont pas très explicites.
Quoiqu’il en soit, les organisateurs sont déçus et
déplorent l’annulation d’une journée prônant la
paix et le vivre ensemble, une journée pour
transmettre des valeurs de partage d’autant plus
celle de 2015 s’était agréablement bien déroulée,
comme en témoigne la vidéo si dessous.
Malgré ce refus, nous souhaitons à l’équipe organisatrice lyonnaise de la World Hijab Day de
poursuivre leur engagement et les initiatives qui
permettraient de briser les préjugés autour du
hijab en France. Ne sous estimons pas le pouvoir
des réseaux sociaux.

ITALIE

Musée censuré par respect
pour l’Islam, le temps de la visite
de Hassan Rohani

Le président iranien, Hassan Rohani, en visite à
Rome, a demandé le respect de la culture islamique pour son voyage officiel dans la capitale
italienne. Le musée du Capitole de Rome s’est
exécuté et a caché toutes ses statues nues, comme
les photos des médias en ont témoigné sur Twitter. Une censure de politesse qui a fait jaser les
médias, c’est le moins que l’on puisse dire.Ce
respect pour l’Islam ne s’est pas arrêté à la recouverture des sculptures par de grandes palissades. La sensibilité du président iranien et le
respect de notre religion ont été jusqu’à bannir le
vin des tables lors de la cérémonie officielle, tout
comme il le sera des livres publiés en Iran, selon
les derniers dires du ministère de la culture iranienne. Des exigences protocolaires qui ne sont
pas respectées par tous les pays.En novembre, la
France avait refusé d’honorer la requête de Hassan Rohani lors de la préparation de son déplacement à l’Elysée qui a bien lieu finalement
aujourd’hui.
Ni menu halal, ni bannissement des alcools à
table, la France ne souhaitant pas déroger à ses
traditions laïques, comme nous le rapporte le
Huffpost, il n’y aura pas de dîner officiel mais
juste un petit déjeuner.Personne ne veut froisser
l’Iran et les enjeux économiques et diplomatiques qu’elle représente et organise donc, chacun à sa manière, les égards qu’ils lui sont dus.
Révérence ou peur pour l’Italie, maladresse répétée pour la France !

UNE JOURNALISTE
A JOHN KERRY

“C’est vous qui avez créé Daech”

L’accusation à l’encontre du chef de la diplomatie US a été lancée lors d’une conférence de
presse de John Kerry avec son homologue italien, Paolo Gentiloni, à Rome.
23 pays membres de la coalition internationale
qui lutte contre l’organisation de l’Etat islamique
se sont réunis mardi dernier à Rome afin de discuter des moyens de combattre le groupe terroriste, et de saluer les progrès enregistrés. La
rencontre s’est terminée par la conférence de
presse commune des chefs de la diplomatie américaine et italienne.
Néanmoins, à l’issue de la conférence, une journaliste italienne a lancé à l’encontre de John
Kerry et de son homologue italien, Paolo Gentiloni: “C’est vous qui avez créé l’EI”, en provoquant une bagarre dans la salle. La journaliste a
été immédiatement entourée par des policiers.
Selon les personnes présentes dans la salle, la
journaliste avait un foulard sur la tête.
Ce n’est pas pour la première fois que les EtatsUnis sont accusés d’avoir créé Daech. Récemment l’un des dirigeants du parti Fatah du chef
de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a
accusé les Etats-Unis d’avoir créé Daech afin de
“réaliser un scénario infernal pour démanteler la
nation arabe, la diviser, tuer son esprit de solidarité”. Le candidat républicain à la présidentielle
Donald Trump s’est aussi empressé de stigmatiser la politique menée par l’administration de Barack Obama et celle de l’ancienne secrétaire
d’Etat Hillary Clinton qui, selon lui, ont favorisé
l’essor de Daech.

En outre, selon un sondage réalisé l’année passée
par la société britannique ORB International,
81% des Syriens estiment que les USA et leurs
alliés sont responsables de la création du groupe
terroriste Etat islamique.

ISRAEL

Un plan pour détruire la mosquée
d’ Al Aqsa

Un reportage télévisé diffusé par la dixième
chaine de télévision israélienne a révélé que des
organisations juives jouissant du soutien de rabbins éminents et de politiciens israéliens ont terminé leurs préparatifs pour la construction du
troisième temple en prélude à la destruction de
la sainte mosquée d’al-Aqsa et le dôme du rocher, à l’expulsion des musulmans de l’ancienne
ville d’al-Qods et à l’établissement de centres bibliques.
YehudaEitsouni, décrit comme le cerveau de la
construction du troisième temple, a dit au journaliste qu’il ne compte pas sur le tonnerre ni sur
l’éclair pour provoquer la destruction de la sainte
mosquée d’al-Aqsa. « Nous allons démanteler
cette mosquée de nos mains. J’espère qu’en fin
de compte nous saurons notre devoir et nous l’assumerons », a-t-il dit. A savoir que ladite chaine
de télévision effectue des interviews avec des activistes juifs impliqués dans l’élaboration de
plans. D’aucuns ont terminé leurs plans sur la
structure du troisième temple et d’autres recueillent les pierres nécessaires pour cette construction. Le reporter israélien a effectué une tournée
dans une ferme de la colonie de GoushEtzion où
sont élevés des moutons qui seront abattus
comme des offrandes sur l’autel du Temple.
«Un grand nombre de juifs soutiennent la destruction de la mosquée d’al-Aqsa à la base de
leur croyance messianique qui prétend que la
destruction de la mosquée sera suivie de la guerre
de Gog et Magog et ensuite de l’apparition du
Messie. Enfin, le troisième temple sera construit
à la place de la mosquée d’al-Aqsa.
Le rêve de construire le troisième temple sur les
ruines de la mosquée détruite d’al-Aqsa est devenu un objectif pour beaucoup de juifs. Ces derniers mois ont connu de multiples visites à
l’esplanade de la sainte mosquée de la part
d’hommes, de femmes, des hommes de droite,
de rabbins et des membres de la Knesset.
Le journaliste expose un livre qui comprend le
projet structural pour construire le troisième temple après la destruction de la mosquée d’al-Aqsa.
Selon lui, ce livre explique le futur projet pour
al-Qods et le troisième Temple. Le Temple
s’étendra ainsi vers le nord au détriment du quartier islamique, composé de maisons et d’unités
résidentielles .

L’Autre Regard - N°035 du 05 février au 05 mars 2016

source: al-qods al-arab, ajib.fr

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