Homosexualité : une pratique qui passe mal au Burkina

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Title
Homosexualité : une pratique qui passe mal au Burkina
Creator
Donald Wendpouiré Nikiema
Publisher
Sidwaya
Date
9 January 2019
Abstract
L'homosexualité est un sujet tabou dans les sociétés africaines contrairement à celles occidentales. Au Burkina Faso, le phénomène est très mal perçu par les responsables coutumiers et religieux.
Rights
In Copyright - Educational Use Permitted
Language
Français
Source
Archives Sidwaya
Contributor
Frédérick Madore
content
L'homosexualité est un sujet tabou dans les sociétés africaines contrairement à celles occidentales. Au Burkina Faso, le phénomène est très mal perçu par les responsables coutumiers et religieux. 

L'on dit toujours qu'en amour, le choix d'une personne ne se discute pas. Mais lorsque celui-ci va à l'encontre des principes établis par une société, des questions s'imposent quant au bien-fondé de ce choix.

Jeune, belle, la trentaine révolue, A. M est à la fleur de l'âge. Elle a toutes les qualités qu'un homme peut trouver  chez une femme.Mais, cette dernière n'éprouve pas la même sensation chez un homme comme  la plupart de ses sœurs. Elle est attirée par les êtres de même sexe qu'elle depuis l'âge de 15 ans.

Un choix qui n'est pas fortuit selon elle.« Quand j'étais enfant, j'avais trop de frères et je passais plus de temps avec eux, qu'avec mes copines. On s'amusait partout ensemble. Avec le temps, nous avons grandi, mais les habitudes sont restées. On sortait toujours ensemble et quand ils partaient faire la cour à une fille, je m'amusais à faire pareille. Et comme l'habitude est une seconde nature, j'ai fini par me plaire », confie-t-elle.

Cette situation est évidemment mal perçue situation dans sa familiale. Tout d'abord par la mère (confidente de la jeune fille), qui trouvait le comportement de sa progéniture suspect à travers son habillement. « Je n'ai jamais aimé les tailleurs féminins. Je voulais chaque fois ressembler à mes frères et quand elle m'aperçoit dans ces tenues, elle m'a toujours obligé à les enlever », explique A.M. Consciente que la relation entre personne de même sexe n'est pas tolérée dans la société burkinabè et plus particulièrement dans la communauté musulmane, la jeune fille décide de vivre sa relation dans la discrétion totale.

Mais lorsque son père, un fidèle musulman découvre le pot-au-rose, il menace de la répudier. «Il ne l'a pas fait, car le mobile de la rupture est honteux pour sa propre personne», soutient la jeune dame. Mais après le décès de son père, ses oncles  la bannissent de la famille. « Avec des menaces de mort à mon égard, pour avoir ternie l'image familiale », affirme A.M.L'exemple de cette femme témoigne du rejet de l'homosexualité dans la société.

Une vieille pratique

Selon le Poé Naaba, chef traditionnel et député à l'Assemblée nationale,la société traditionnelle ne peut et ne doit pas accepter une telle pratique. Au regard de sa sensibilité, la question, à l'entendre, était gérée par un groupe restreint de personnes constituées de sages et chefstraditionnels. Pour lui, cette pratique était reconnue comme un crime jadiset la sanction était sans appel : « la mort ».

En islam, l'homosexualité n'est également pas admise, car désavoué par les écritures saintes notamment, le Coran,selon les explications de l'imam Halidou Ilboudo du cercle d'étude, de recherche et de formation islamique (CERFI). Celui-ci précise qu'il est clairement dit dans plusieurs verset du Coran qu'Allah a interdit l'homosexualité. « Nous pouvons le voir dans les sourates 26, 27 ; la sourate 7, la sourate 11 où Dieu évoque le peuple de Sodome et de Gomorrhe qui ont été les premiers selon l'histoire religieuse, à tomber dans l'homosexualité et Dieu tout puissant les a puni pour cela»,ajoute-t-il.

Pour lui, même dans les coupes hétérosexuelles dans l'islam, la pratique de la vision profonde de la relation intime interdit la sodomie.Et les contrevenants à cette loi islamique doivent subir la sanction suprême conformément aux textes. Il rappelle cependant que l'islam, dans l'interprétation des textes sacrés n'a jamais condamné un fidèle pour acte d'homosexualité.

Une ''maladie'' selon l'Eglise

Même son de cloche chez les catholiques, qui estiment que l'homosexualité est une pratique qui porte atteinte au principe fondamental de la religion.« L'Eglise catholique est guidée par la parole de Dieu, laquelle est envoyée à l'homme pour l'éclairer.  Et il est clairement stipulé dans le livre de la Genèse que l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme et tous deux ne feront plus qu'un.

Nulle part, nous n'avons vu que Dieu a donné la possibilité que deux hommes ou deux femmes aillent ensemble dans le sens du mariage », éclaire l'Abbé Clément Taonsa, aumônier adjoint  en charge des lycées et collèges. Malgré cela, l'Eglise catholique ne condamne pas les homosexuels. Car,pense-elle, être dans cette situation  n'est pas un choix volontaire de la personne, mais un état de fait, une donnée de la réalité psychosexuelle qui trouve sa source, de façon complexe, sans cause unique, dans la petite enfance.

Abbé Taonsa affirme que le catéchisme de l'Église catholique distingue donc les « tendances » homosexuelles, qui sont involontaires et ne justifient ni mépris ni condamnation des personnes, des « actes » homosexuels jugés, eux, « désordonnés », car contraires à la loi de différenciation. Considérée comme une ''maladie'' par le clergé, l'aumônier adjoint rassure que des mesures sont prises par l'Eglise pour ''aider'' ceux qui en souffrent. Il s'agit notamment de conseils et de prières.

Une position unanime

Pour le Poé Naaba, la position des coutumiers, tranchée, se référant aux textes traditionnels, à la Bible et au Coran. Les lois de Dieu, clame-t-il, sont claires :« un homme, une femme ». Un point de vue partagé par l'imam Ilboudo, qui ajoute que l'homosexualité ne répond pas à l'objectif de l'union prônée par la religion.

Selon l'Abbé Taonsa, l'homosexualité est qualifiée d'''abomination'' par l'Eglise et a été à cause de certaine société dans le livre de la Genèse.  Même si la déclaration universelle des droits de l'Homme dans son article 16 alinéa 1 dit ceci : « à partir de l'âge nubile, l'homme et la femme, sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit de se marier et de fonder une famille ».

Le Poé Naaba pense que la liberté d'union doit s'adapter aux règles de chaque société. « La liberté c'est avant tout, des règles que nous nous imposions dans la société. Et vivre-ensemble, nous oblige à respecter ces règles. Nous avons notre civilisation et au lieu de vouloir superposer la civilisation des autres à la nôtre, parce que c'est cela qui justifie notre retard, nous devons travailler à propager notre civilisation », insiste-t-il.

Sur le sujet, nous avons tenté en vain de connaitre l'avis duprésident de la Fédération des églises et missions évangéliques (FEME). Nos sollicitations d'interview n'ont pas eu de suite favorable. Mais la position des protestantsn'est pas fondamentalement différente des autres confessions religieuses, dans la mesure où on n'a pas encore entendu parler de mariage entre deux personnes de même sexe dans une égalise protestante.

En attendant que le « mariage pour tous » soit une réalité sous nos cieux, A.M, bénéficie d'un séjour temporaire en France,grâce à une amie.Elle dit espérertrouver l' « âme sœur ». « J'aimerai vraiment être heureuse et pouvoir vivre pleinement mon choix sexuel, sans être jugé et le plus important, pouvoir me marieravec celle que mon cœur choisira », plaide-t-elle.

Donald Wendpouiré NIKIEMA
tousunis.do@gmail.com
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