Journée nationale de pardon : alliance sacrée pour la paix

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Title
Journée nationale de pardon : alliance sacrée pour la paix
Publisher
Sidwaya
Date
2 April 2001
Abstract
Sous la présidence des communautés religieuses et des autorités coutumières du Burkina Faso, la journée nationale de Pardon s'est tenue dans l'après-midi du vendredi 30 mars 2001 au stade du 4-Août de Ouagadougou sous le sceau du repentir, de l'aveu et de la volonté affirmée de réparation. Compte rendu.
Spatial Coverage
Bobo-Dioulasso
Ouagadougou
Rights
In Copyright - Educational Use Permitted
Language
Français
Contributor
Frédérick Madore
content
Sous la présidence des communautés religieuses et des autorités coutumières du Burkina Faso, la journée nationale de Pardon s'est tenue dans l'après-midi du vendredi 30 mars 2001 au stade du 4-Août de Ouagadougou sous le sceau du repentir, de l'aveu et de la volonté affirmée de réparation. Compte rendu.

«Peuple du Burkina Faso, en cet instant solennel, en notre qualité de président du Faso assurant la continuité de l'Etat, nous demandons pardon et exprimons nos profonds regrets pour les tortures, les crimes, les injustices, les brimades et tous les autres torts commis sur des Burkinabè par d'autres Burkinabè, agissant au nom et sous le couvert de l'Etat, de 1960 à nos jours... ».

Vendredi 30 mars 2001, stade du 4-Août, 17h29 mn, repentir officiel du chef de l'Etat, M. Blaise Compaoré, face à son peuple, à l'occasion de la journée nationale de Pardon. Un événement qui a été présidé par les plus hautes autorités coutumières et religieuses du Burkina, sous la direction de Monseigneur Titiana Anselme Sanon, archevêque de Bobo-Dioulasso et président du Collège des sages. Et cela, en présence des familles de certaines victimes, de représentants de toutes les couches sociales venus des 45 provinces du Burkina Faso. Face à tout ce monde, les anciens chefs d'Etat du Burkina et le chef de l'Etat en exercice (Sangoulé Lamizana, Saye Zerbo, Jean Baptiste Ouédraogo et Biaise Compaoré), venus pour se repentir au nom de l'Etat, pour les tumultes douloureuses qui ont marqué l'histoire du Burkina, de 1960 à nos jours.

Engagements

Occasion de solennité, de repentir, de rappel des douleurs, de prière, etc., la journée nationale de Pardon (JNP) a surtout fait le lit d'engagements pour un nouveau départ des «mœurs politiques, sociales et économiques au Burkina».

C'est pourquoi, face à son devoir de garantir la paix sociale au Burkina, le président du Faso a pris sur l'honneur, face à tous les Burkinabè, sept (7) engagements.

Premièrement, la mise en œuvre de mesures de réparations dont la création d'un fonds d'indemnisation en faveur de toutes les familles victimes de la violence en politique. Deuxièmement, l'érection de monuments qui seront les témoins de notre devoir de mémoire à l'égard de tous nos martyrs et héros nationaux.

Troisièmement, le traitement diligent de l'ensemble des dossiers de crimes économiques et de sang qui ont causé tant de torts à notre pays constituera une priorité pour le gouvernement. Quatrièmement, la commémoration sur toute l'étendue du territoire national, le 30 mars de chaque année, d'une journée du souvenir, de promotion des droits humains et de la démocratie au Burkina Faso. Cette journée sera une occasion de recueillement et de mémoire pour nos martyrs mais aussi une occasion pour faire le point sur l'état de la démocratie et le respect des droits humains au Burkina.

Cinquièmement, la mise en place d'un comité d'éthique composé de personnalités dont la probité, l'expérience et la compétence font autorité, dans le but d'aider à la moralisation de la vie publique et sociale, notamment la lutte contre la délinquance économique et la corruption.

Sixièmement, instruction est donnée au gouvernement afin qu'il consolide le dialogue avec tous les acteurs politiques et sociaux aux fins de résorber le déficit de dialogue et de communication, facteur de négation d'une réconciliation nationale durable. Septièmement, la mise en place d'un mécanisme et de suivi des présents engagements, comprenant les représentants des autorités morales et spirituelles, des organisations de défense des droits humains et de la démocratie, des victimes et familles de victimes et ceux du gouvernement. Le mécanisme veillera à l'application des engagements pris et à parachever le travail remarquable déjà accompli, par le comité de mise en œuvre des recommandations de la commission pour la réconciliation nationale.

Plaidoyer

Dans un plaidoyer pour la paix sociale au Burkina, Biaise Compaoré s'est attardé sur un repentir: les torts et crimes qui ont sali la mémoire et terni l'image de marque du Burkina.

Des réalités dramatiques dues, selon lui, aux diverses luttes exacerbées entre les différents clivages idéologiques du Burkina, qui avaient une vision bien manichéenne de la société. Toute chose qui a entraîné, de l'avis du président du Faso, des oppositions violentes et meurtrières dont les conséquences sont toujours visibles et demeurent encore gravées dans la chair et la mémoire de nombreuses familles.

Face à cette donne, «La quintessence des déclarations et des messages qu'il nous a été donné d'entendre, a l'occasion de la JNP, sonne comme un refrain et nous invite à clamer ensemble, d'une seule et même voix : plus jamais cela au Burkina Faso», a ajouté le chef de l'Etat.

Dès lors, il s'est félicité de l'engagement de certaines familles de victimes sur les sentiers du pardon et, tout en comprenant ceux qui pour le moment ne s'y sont pas engagés, à garder espoir que, malgré leurs douleurs, douleurs de tout le peuple burkinabè, ils se mettent dans les «starting-block» du pardon, de la réconciliation nationale, de la paix sociale et de la sauvegarde de la patrie.

Symphonie

Avant ce repentir de Biaise Compaoré, les représentants des familles de certaines victimes, les communautés religieuses et les autorités coutumières ont tous affirmé la nécessité d'exorciser leur pays des crimes économiques et des crimes de sang à travers le pardon national.

A cet effet, Monseigneur Titiana Anselme Sanon, président du praesidium de la cérémonie qui a marqué la JPN a invité chaque Burkinabè, à se poser une question à travers un élan d'introspection: «qu'ai-je fait pour être utile ou nuisible à notre pays».

Doit suivre cela, a dit Anselme Sanon, une humilité qui permette à chacun de reconnaître les torts qu'il a commis à travers le repentir, des aveux, la volonté de réparation... Car a-t-il ajouté, « combien de Burkinabé n'ont pas contribué à exiler, à tuer, à réduire à la misère, des Burkinabè».

Le président du Comité national d'organisation de la JNP de se féliciter que la majorité des Burkinabè adhère au pardon et d'espérer que dans un élan de paix, les Burkinabè parviennent réellement à se pardonner.

Le président de la Communauté musulmane du Burkina, El Hadj Cheick Aboubacar Sana, au nom des différentes communautés religieuses, a, quant à lui, rappelé la symbolique du pardon dans les religions révélées et prié pour que Dieu accompagne le Burkina dans sa quête de paix pour aujourd'hui et pour demain.

Conscient que beaucoup de manquements de l'Etat ont causé de nombreuses meurtrissures dans les cœurs des uns et des autres, et reconnaissant la responsabilité commune des chefs d'Etat qui ont géré le Burkina de 1960 à nos jours, dans cette donne, le général Sangoulé Lamizana a, en leur nom, demandé pardon au peuple du Burkina Faso et «interpellé Dieu pour qu'il bénisse le Burkina Faso».

Le pasteur Freeman Compaoré, analysant le pardon selon les Ecritures saintes, au nom des communautés religieuses, de dire que : «Dieu pardonne selon sa grande miséricorde, son grand mérite à travers trois (3) conditions, le repentir, l'aveu et la réparation. De même, il exige, avant de recevoir toute demande de pardon, que nous pardonnions à ceux qui nous ont offensés. Surtout que pardonner, c'est vivre et que le pardon, c'est la vie».

Dans la même lancée, les chefs coutumiers parlant du sens, de la portée et des sous-entendus du pardon dans la société traditionnelle, dans les cultures du Burkina ont traduit le pardon comme un socle fondamental de la vie en société...

Dès lors, tout en souhaitant que Dieu et les mânes protègent le Burkina, ils ont souhaité que la société burkinabè soit débarrassée à jamais de la violence politique et s'engage vers le progrès, la démocratie et le développement.

Face à toute cette donne, les représentants des familles des victimes qui ont accepté s'associer au pardon de dire à travers un cri de cœur: «Excellence M. le président du Faso, les hommes passent et l'histoire demeure. Nous acceptons de bon cœur le pardon, pour le bonheur et la prospérité de notre pays. Nous souhaitons que les réparations suivent toujours leur cours. Nous osons espérer qu'après cette JNP, les erreurs et manquements ne se reproduisent plus. Que la paix règne toujours au Faso! ».

L'élan de recherche de la paix par le pardon, engagé à travers la JNP, s'est achevé sur une note d'espoir et de responsabilité vis-à-vis de la sauvegarde du Burkina.

Ainsi, en signe de paix, les représentants des familles des victimes, les anciens chefs d'Etat et le président du Faso ont échangé des amabilités, avant de lâcher des colombes blanches vers le ciel, sous le regard des autorités couturières et religieuses, en signe du nouvel élan que prend le Burkina vers la paix sociale «en rompant le cycle de la haine et de la violence».

Aussi, comme pour dire avec la sagesse africaine que «seules les montagnes ne se rencontrent pas», le 30 mars devient une date historique où les Burkinabè se sont retrouvés et se retrouveront désormais, pour une alliance sacrée au nom de la paix...

Ibrahiman SAKANDE

Le praesidium de la JNP

- Président: Monseigneur Titiana Anselme Sanon

Membres représentant les autorités coutumières:

- Le Mogho Naaba Baongo

- Le Naaba Kiba du Yatenga

- Le Ouidi Naaba

Membres représentant les autorités musulmanes

- El Hadj Cheick Aboubacar Sana

- El Hadj Cheick Aboubacar Maïga

- El Hadj Cheick Doukour

Membres représentant l'église protestante

- Pasteur Freeman Kompaoré

- Pasteur Pawentaoré Ouédraogo

- Pasteur Samuel Yaméogo

Membres représentant l'église catholique

- Monseigneur Titiana Anselme Sanon

- Abbé Joël Tapsoba

- Abbé Roger Ouédraogo

I. SAKANDE
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