Renconstruction de la mosquée Fodé-Doukouré : 60 ans après, le fils perpétue l'œuvre du père

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Title
Renconstruction de la mosquée Fodé-Doukouré : 60 ans après, le fils perpétue l'œuvre du père
Publisher
Sidwaya
Date
8 February 1999
Abstract
La date du 5 février 1999 est désormais historique pour la ville de Djibo, particulièrement pour la communauté musulmane de la Tidjania du Burkina Faso. Et pour cause, la mosquée du célèbre Cheick Fodé Abdoulaye Doukouré détruite en 1939 par le colonisateur, a été réétablie par le fils du Cheick et inaugurée vendredi dernier.
Rights
In Copyright - Educational Use Permitted
Language
Français
Contributor
Frédérick Madore
content
La date du 5 février 1999 est désormais historique pour la ville de Djibo, particulièrement pour la communauté musulmane de la Tidjania du Burkina Faso. Et pour cause, la mosquée du célèbre Cheick Fodé Abdoulaye Doukouré détruite en 1939 par le colonisateur, a été réétablie par le fils du Cheick et inaugurée vendredi dernier.

Des milliers de fidèles sont venus de la sous-région assister à la cérémonie qui a couronné soixante années de patience.

Tous ceux qui étaient à Djibo ce vendredi ont été unanimes à dire que c'est la première fois qu'un monde aussi nombreux a déferlé en même temps sur la capitale du Soum. L'inauguration de la mosquée de feu Fodé Abdoulaye Doukouré, le père de Cheick Aboubacar Doukouré de Hamdalaye a mobilisé un monde fou.

Les fidèles sont venus de la Côte d'Ivoire, du Mali, du Niger, du Nigéria, du Sénégal, se joindre à leur frère burkinabè pour témoigner leur reconnaissance à l'œuvre de ce grand guide musulman et surtout résistant de la dure période coloniale que fut Fodé Doukouré.

A ces milliers de fidèles, se sont joints outre tout le gotha politico-administratif de la province du Soum, de nombreuses personnalités venues de Ouagadougou. Le procureur général du Faso, le directeur de cabinet de la présidence du Faso, les responsables des différentes associations islamiques nationales, des ONG islamiques, les imams et de nombreux oulémas. Le ministre de l'Administration territoriale et de la Sécurité qui avait fait le déplacement n'a pu prendre part à la cérémonie pour des raisons de changement de calendrier aux derniers moments.

Ce fut donc un grand événement que l'ouverture de cette mosquée dont l'histoire est intimement liée à celle de la vie de Fodé Abdoulaye Doukouré, grand chef peul et surtout un des grands guides spirituels de la confrérie des Tidjanites au Burkina.

Il convient de souligner que le Cheick Fodé, fondateur du quartier Hamdalaye de Ouagadougou, a profondément marqué l'histoire de l'islam au Burkina Faso. Il a beaucoup contribué au réveil de la foi musulmane et ses nombreux élèves comptent aujourd'hui encore parmi les sages de l'islam à travers le Burkina. L'exemple le plus illustratif est celui du vieux Moussa Yugo, responsable de la mosquée Tidjania de Bilbalogo et proche conseiller de l'actuel Cheick de Hamdalaye le Dr Aboubacar Doukouré, le fils de Fodé.

Mais le Cheick Fodé comme la plupart des leaders africains de son époque, ne fut pas seulement un guide spirituel. Il a résisté à l'action du colonisateur français au nom de la justice, de l'égalité et de la dignité de l'homme; des principes chers à la religion.

La défense de ses valeurs universelles, lui vaudra pourtant des tracasseries diverses qui devaient conduire à son arrestation suivie d'une déportation et surtout de la destruction de sa mosquée à Djibo.

A sa sortie de prison après 18 années, le Cheick Fodé Abdoulaye Doukouré demandera à construire sa mosquée sur son ancien site mais c'est en vain qu'il sollicitera cette autorisation. Il finira par ériger sa mosquée à quelques encablures du site de l'ancienne avec toutefois la conviction et l'espoir que la récompense du bien est toujours le bien.

En prononçant te discours inaugural de la mosquée réétablie, le fils Doukouré a insisté sur le caractère symbolique et spirituel de l'événement: «Cette journée est une journée très heureuse dans notre vie, car d'une part nous nous retrouvons pour inaugurer l'une des maisons de Dieu dans laquelle il sera glorifié et exalté. D'autre part, l'inauguration de cette mosquée coïncide avec le soixantième anniversaire de la destruction de la mosquée de notre cher père, le regretté Cheick Fodé Abdoulaye Doukouré par le colonisateur et qui était construite au même emplacement».

C'est donc une joie légitime qui habite le fils et ses nombreux fidèles qui ont rendu grâce à Dieu de leur avoir accordé la faveur de réaliser le vœu de leur ancêtre.

Pour autant, le Dr Doukouré a tenu à préciser l'esprit dans lequel il a réhabilité la mosquée de son défunt père. «Aujourd'hui, a-t-il dit, grâce à Dieu, nous avons pu réaliser son projet en reconstruisant la mosquée au même endroit. Mais cela ne doit pas nous pousser à la présomption ni à l'arrogance. Dieu-Tout-Puissant a dit dans le Saint coran au verset 36 de la 4e sourate: (... car Allah n'aime pas, en vérité, le présomptueux, l'arrogant)».

Il a voulu qu'on inscrive surtout son œuvre dans la logique de l'authentique tradition de pardon du prophète de l'islam. Lorsqu'il fut chassé de la Mecque, sa ville natale, dans la peur, l'inquiétude et les souffrances, et que plus tard il devait reconquérir triomphalement la même ville à la tête de cent mille hommes, Mouhammad au lieu de la vengeance, se courba plutôt sur son chameau en signe de modestie et de reconnaissance vis-à-vis de son Seigneur.

Le Cheick Aboubacar Doukouré a rappelé ce noble caractère du prophète aux fidèles tout comme il leur a demandé de se souvenir du geste de son père, lorsqu'il recouvra la liberté après 18 ans de captivité. Aux gardes qui l'accompagnaient à la porte, il dit qu'il avait oublié quelque chose dans sa cellule. Lorsque ceux-ci vérifièrent et revinrent lui dire qu'ils n'avaient rien trouvé, il insista et on l'y reconduisit.

Là, il leur fit simplement savoir qu'il avait oublié de prendre à témoins ceux qui étaient présents du pardon qu'il accordait à tous ceux qui avaient été impliqués dans son arrestation et cela à cause de Dieu Tout-Puissant. C'est donc, dans la perspective du pardon et du devoir accompli que la cérémonie de Djibo de ce vendredi 5 février 1999 a été placée.

Le message a été bien accueilli par les fidèles qui ont suivi avec attention le Cheick et accueilli son discours par les traditionnels Alla hou Akbar, A llahou Akbar.

Les fidèles de Djibo eux, particulièrement, peuvent se sentir heureux d'avoir mis fin à 60 années d'attente et surtout de disposer désormais d'une splendide mosquée de vendredi pour glorifier Dieu qui leur a offert ces deux beaux cadeaux.

C.O. BONI
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Sidwaya