Situation nationale : Oumarou Kanazoé a-t-il tout dit?

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Title
Situation nationale : Oumarou Kanazoé a-t-il tout dit?
Creator
Morin Yamongbe
Publisher
Le Pays
Date
18 February 1999
Abstract
A travers une interview qu'il nous a accordée dans l'édition "Le Pays" no 1830 du mercredi 17 février 1999, le richissime homme d'affaires burkinabè El Hadj Oumarou Kanazoé s'est prononcé sur certains pans de la situation nationale. Que faut-il retenir réellement de cette rencontre ?
Spatial Coverage
Ouahigouya
Rights
In Copyright - Educational Use Permitted
Language
Français
Contributor
Frédérick Madore
content
A travers une interview qu'il nous a accordée dans l'édition "Le Pays" no 1830 du mercredi 17 février 1999, le richissime homme d'affaires burkinabè El Hadj Oumarou Kanazoé s'est prononcé sur certains pans de la situation nationale. Que faut-il retenir réellement de cette rencontre ?

Dans un premier temps, on ne saurait commencer cette lecture seconde des propos de El Hadj Oumarou Kanazoé sans replacer dans son contexte, l'intention qui nous a guidée à aller vers l'intéressé. Inéluctablement, l'homme est un pion essentiel sur l'échiquier économique burkinabè. Si l'on sait que le lien entre le politique et l'économique, plus que simplement établi est fondamental, on comprend l'implication et l'influence que les hommes d'affaires peuvent avoir sur les décisions politiques. Dans toute société, le politique s'est toujours appuyé sur les figures de proue de la vie économique pour se maintenir. Dans cette optique, on peut expliquer l'affiliation d'un homme comme El Hadj Oumarou Kanazoé à un parti comme le CDP (Congrès pour la démocratie et le progrès). C'est aussi pour cette raison que lors des meetings du parti au pouvoir, l'homme s'est toujours, du reste, aux côtés d'autres opérateurs économiques célèbres de la place, illustré comme un appui de choix. N'est-ce pas qu'à Ouahigouya, pendant son meeting de campagne électorale, le candidat du CDP Blaise Compaoré l'a interpellé en sa qualité de “Monsieur Goudron” du Burkina Faso, quand les commerçants de ladite ville ont demandé que le marché soit bitumé ? Les exemples pour illustrer l'implication de Kanazoé dans la vie politique ne manqueront certainement pas. Mais, cela semble de bonne guerre, puisqu'il agit en tant que citoyen burkinabè, donc libre de s'afficher comme militant de telle ou telle formation politique.

Seulement, il faut que Kanazoé prouve que son engagement politique n'est point intéressé, car d'aucuns n'hésitent pas à penser que ça lui sert de paratonnerre et lui ouvre royalement des voies pour l'obtention des marchés les plus colossaux. Pour donc montrer qu'il “appartient à tous les Burkinabè et qu'il oeuvre dans l'intérêt de tous”, “Ladji” pourrait par exemple apporter, et officiellement, un appui financier substantiel aux partis d'opposition pour renforcer la démocratie au pays dont il fait la fierté. Sauf erreur ou omission, jusqu'à ce jour, il ne l'a pas fait Si dès aujourd'hui l'homme d'affaires arrive à se mettre au-dessus de la mêlée, cela ne lui fera que du bien, car aucun régime politique n'est fait dans ce monde pour demeurer éternellement DU reste, la dislocation du bloc communiste dirigé pendant des siècles par la toute puissante Union Soviétique en est un exemple patent Ou alors, attendra-t-il un retournement de situation pour opérer aussi celui de sa bourse ? Sans douter de la sincérité de l'homme à propos des “intérêts supérieurs de la nation" qu'il évoque, et sans mettre en balance sa vérité sur la paix sociale qu'il faut sauvegarder à tous prix, on peut lui suggérer de revoir sa copie à ce niveau.

Trop engagé ?

N'est-ce pas cet engagement politique trop “engagé", si on nous permet la répétition qui fait qu'on n'hésite pas à impliquer Kanazoé dans tous les errements du CDP ? Ce n'est pas l'affaire Norbert Zongo qui contre-dira cela. “Je ne connais pas Norbert Zongo", a déclaré sans ambages, celui que la rue a cité, parmi d'autres personnes comme commanditaires de “l'accident” du 13 décembre 1998 qui a transformé en cendres le célèbre journaliste Norbert Zongo et ses trois infortunés compagnons de route. Et le rapport de Reporters Sans Frontières de relever qu'à un certain moment, El Hadj Oumarou Kanazoé aurait essayé de convaincre Norbert Zongo - bien entendu avant sa mort - de “laisser tomber ses écrits sur l'affaire David Ouédraogo".

Sans prendre pour argent comptant les investigations de RSF, on peut se demander pourquoi Kanazoé, à l'époque n'a pas réagi contre. Comment faut-il comprendre ce silence d'antan et cette affirmation que fait aujourd'hui Kanazoé ? A moins qu'il y ait maldonne quelque part, on se demande si certaines personnes ne veulent pas faire prendre à d'autres “des vessies pour des lanternes”. On ne demande qu'à croire El Hadj Oumarou Kanazoé lorsqu'il dit qu'il n'a jamais connu Norbert Zongo mais ce sont des déclarations qui ne dissipent pas parfaitement le doute. Mais il faut le relever, ce n'est pas parce qu'on accuse aujourd'hui bien des personnes qu'il faut effectivement les considérer comme coupables. Si on s'appuie par exemple sur le fait que le cinéma c'est souvent de la réalité faite fiction, on peut oser avancer que, comme dans les films Western tant prisés par les Burkinabè, le suspecté de crime du début d'un film est rarement ou du moins, n'est jamais le véritable coupable à la fin.

Une chose est certaine, le respect que El Hadj Oumarou Kanazoé suscite dans le monde des affaires est sans équivoque, même si de temps à autres, on enregistre dans les organes de presse, les plaintes de ses employés pour non paiement de salaires.

Pour rester l'homme respecté et mériter l'image qu'il veut se donner, Kanazoé doit, on le répète, se mettre au-dessus des querelles politiques. L'avenir retiendra cela, dans ses bonnes actions.
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Le Pays