La Preuve #0

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Title
La Preuve #0
Creator
La Preuve
Date
October 2007
issue
0
Rights
In Copyright - Rights-Holder(s) Unlocatable or Unidentifiable
Language
Français
Contributor
Louis Audet Gosselin
Wikidata QID
Q114034247
extracted text
et voilà la religion de droiture... ”

■ EDITORIAL

La preuve d’un engagement

■ LA PLUME DU MOIS

La solidarité nationale à l’épreuve........
CÎÉTÉ ET DÉVELOPPEMENT

catif au Burkina : A quand la

. _ des coeurs ?

■ ZOOM

Hadj : La mauvaise conscience des associations

islamiques

■ DOSSIER

Le plus grand défi des musulmans au Burkina

■ FLASH BACK

RAMADAN

Un mois pour
nous aider à vivre
onze autres

Comment le califat a pris fin ? .

■ LE JEU INTERNATIONAL

Bilan du térrorisme : La montagne a accouché
d’une souris............................................
■ BRÈVES

m

Editorial
otre siècle se caractérise
par une évolution spec­
taculaire des moyens de
communication à travers
quels le monde se forme et
rentre en contact avec P infor­
mation. C’est au travers juste­
ment de cette information que
se formate l’opinion publique.
Le rôle de l’information n’est
plus seulement qu’important, il
est vital. S’informer ou dispa­
raître, c’est la seule alternative
que la société de l’information
semble offrir à l’homme com­
municant du village planétaire.
Si la notion de distance a perdu
son sens dans le monde de
notre temps, la planète devenu
un village demeure dominée
par un chef de village dont l’es­
sentiel de son mérite consacré,
tient à la maîtrise de l’informa­
tion et de ses canaux.

N

La preuve
d’un
engagement

Bref, nous ferons l’économie
de l’étalage de l’importance de
l'information qui passe pour
être le premier des Pouvoirs.
Le paradoxe est pourtant pré­
sent au sein de la communauté
des musulmans. En effet, le
printemps de la presse qu’a
connu notre pays ces dernières
décennies a été malheureuse­
ment une traversée de désert
pour des publications traitant
entre autres des questions spé­
cifiques au monde musulman.
Les quelques titres dignes d’un
canard existant ont dû mettre
la clef sous le paillasson pour
des contraintes diverses. Le
paysage médiatique burkinabé
reste alors marquée par une
curieuse absence d’organe de
presse islamique indépendant
d’information générale à
caractère national et interna­
tional. Les rares publications
ont souvent survécu juste le
temps du courage de leurs
géniteurs.
Au vu d’un tel tableau sombre,
il apparaît que l’opinion
musulmane nationale demeure

orpheline de canal d’analyse
des faits d’actualité et d’informalion la concernant. La situa­
les
tion
­
actuelle suscite des
inquiétudes ou tout le moins
des questionnements pour les
meilleurs des cas. C’est en
outre l’absence de cette opi­
nion musulmane juste, qui a
donné lieu à une grille de lec­
ture binaire ou antithétique de
la chose islamique. Les médias
qui osent s’aventurer alors sur
le terrain islamique se rabat­
tent de façon simpliste sur un
conformisme distillé par une
certaine opinion, et ne relèvent
pas ainsi la complexité sociale,
politique, économique, spiri­
tuelle des fondements islami­
ques de base. Ainsi, la
conscience collective catégo­
rise finalement à tort le musul­
man
en
«radical»
ou
«modéré». Le paradigme ainsi
trouvé devient le seul mode
d’appréhension du vécu de
toute
une
communauté,
comme si le musulman
n’existe que si il est modéré ou
radical.
L’aventure actuelle que consti­
tue cette œuvre en construction
nous met à la croisée des che­
mins des difficultés et épreuves
inhérentes à tout projet du
genre. Le défi est ainsi lancé
pour nous et pour tous ceux qui
continuent de croire comme
nous, que la nécessité du
besoin vaut la peine qu’on s’y
essaie. Pour notre part, nous
sommes de ceux qui pensent
que l’immensité des obstacles
ne saurait être une raison suffi­
sante pour anéantir toute tenta­
tive au service d’une cause
aussi noble. Une action est lan­
cée, s’inspirant des bonnes et
tirant leçons des moins bonnes
expériences antérieures. C’est
là aussi une invite à plus de
détermination et de stoïcisme
face aux enjeux d’un temps
nouveau. La PREUVE naît au

chevet d’expériences diverses
ayant connu des parcours mul­
tiformes. Nous osons croire
que ces pionniers serviront de
repères pour atténuer le risque
d’erreur.
La PREUVE s’inscrit dans
une simple logique de contri­
bution aux débats, à la
construction d’une opinion
nationale en général et relative
à l’islam en particulier. Elle se
propose de se mettre au delà
de la mêlée pour faire la
preuve de la «vérité» sans
aucune considération parti­
sane. La PREUVE s'offrira à
vous chaque 05 du mois, avec
des rubriques variées, embras­
sant tous les aspects de la vie.

Votre canard fait ses premiers
pas avec une vision prospec­
tive fondée sur une ligne ana­
lytique des faits et événe­
ments, mais aussi sur une mis­
sion informative et formative
de son audience. Elle procé­
dera d’une démarche basée
sur la logique, les preuves,
l’empirisme afin de mieux
vous introduire dans des faits
et des valeurs. Cette démarche
prend bien entendu en compte
les sensibilités de chaque ego,
les enjeux de chaque contexte
et le dessein de chaque acte
dans la lecture descriptive et
normative des nombreuses
équations de notre temps.
La PREUVE ne se veut
l’œuvre ni d’un individu, ni
d’une association quelconque,
ni d’ime société, ni d’une ten­
dance ou d’ime secte donnée.
Elle sera l’œuvre de tout colla­
borateur animé de la même
ambition, celle d’apporter la
lumière des principes islami­
ques à la lecture de l’actualité.
Le travail incombe désonnais à
tous les intellectuels, pour
qu’ensemble nous renforcions
la preuve de notre engagement.

/La rédaction

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

La

religion de vérité
Ramadan

Un mois pour nous aider à vivre onze autres
e mois de Ramadan est
un invité de marque
durant lequel les bonnes
œuvres sont si faciles et
mérites si simples à accumu­
ler. 11 nous offre une grande
diversité
d’actes
d’adoration : prière, jeûne,
zikhr, nawafil, lecture corani­
que, sadaqat, douas, ihtikaf,
etc. On se contentera de ce
seul hadith pour étayer tout
ce qui précède : le compa­
gnon Salman, le Perse (que
Dieu l’agrée) rapporte : «Le
dernier jour du mois de
Cha’bane (mois qui précède
le ramadan), le Messager de
Dieu fit ce discours : “Ô
gens ! Un grand mois béni
vient à vous, un mois com­
portant une nuit meilleure
que mille mois. Jeûner sa
journée est obligatoire, veil­
ler sa nuit est recomman­
dée...” »

L

C’est un mois de bénédiction
si important que le prophète
(SAW) a dit à son propos :
«Si ma communauté savait
tout le bien qu’il y a dans ce
mois, elle aurait alors voulu
que toute l’année soit Rama­
dan».

Le jeûne du mois de Rama­
dan, quatrième pilier de l’Is­
lam est un devoir religieux,
les
pour tout musulman et pour
toute musulmane saint d’es­
prit et de corps. Allah nous
l’a offert pour nous permet­
tre de purifier nos cœurs et
de nous guider à la saveur de
la piété : «o vous qui avez
cru ! Le jeune vous a été
prescrit comme il l’a été aux
générations antérieures ;
ainsi vous atteindrez la
piété.» C2V183
Donc, le vrai sens du jeûne
est de refréner nos pulsions
négatives, d’aider notre ego à
rompre avec ses habitudes,
d’atténuer l’ardeur de nos
désirs matérialistes afin de
permettre à l’esprit de s’éle­
ver vers son origine qui n’est
autre que Dieu. Ainsi, Dieu
par sagesse, nous permet de
créer un équilibre entre les
deux dimensions de notre
être, lequel équilibre est la
seule voie de réaliser sa plé­
nitude, condition une vie
heureuse ici bas et dans l’au-

Pendant ramadan, toutes les
portes du Paradis sont ouver­
tes et celles de l’Enfer fer­
mées. Il y a au Paradis une
porte spéciale appelée «Arrayan» par laquelle seuls les
jeûneurs sincères entreront.
Dieu le Très Rapproché dit :
«Tout ce que le fidèle accom­
plit comme bonne œuvre lui
appartient sauf le jeûne qui
appartient à Allah». Car c’est
Lui seul qui les en récompen­
sera.

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

delà.
Le ramadan est donc un
•grand séminaire de forma­
tion, un moment de recyclage
annuel pour tous les
croyants. Le ramadan, dans
la vie du croyant, occupe une
place toute particulière du
fait de la multiplicité des
opportunités bénies qui le
ponctue telles la période de la
rupture, les dix (10) derniers
jours, la nuit de destin, etc.

Après ce mois de pénitence
et de sacrifice, les musul­
mans du monde entier s’ap­
prêtent à célébrer l’Aïd El
fitr. Mais avant, il y a la
zakat al fitr qui est l’acte
final de ce feuilleton spiri­
tuel exceptionnel. Il faut
donc en parler

La zakat al fitr :

la marque
de solidarité
Pour marquer la fin d’un mois
de dévotion les musulmans
doivent verser la zakat el fitr.
Cette pratique vivement
recommandée par le prophète
vise deux objectifs majeurs.
Sur le plan individuel, cet
impôt est versé dans le but de
purifier le jeuneur de tout ce
qui aurait pu entacher son
jeûne tels que des propos obs­
cènes ou des écarts de
conduite.
Sur le plan social, cette
aumône permet aux pauvres
et aux nécessiteux de passer
la fête de ramadan dans de
meilleures conditions. Les
pauvres y sont prioritaires car

le messager d’Allah a dit :
«épargnez leur la mendicité
le jour de l’Aid». Parce que
c’est leur droit de pouvoir
rester digne en ce jour. Les
pauvres y ont droit et on ne
doit pas l’attribuer ailleurs
que s’ils font défaut ou qu’il
y ait plus de nécessiteux
qu’eux, ou que d’autres caté­
gories en aient plus grande­
ment besoin. Et tant que cette
aumône n’est pas versée, le
jeûne du musulman restera
en suspens entre le ciel et la
terre. C’est seulement cette
aumône purificatrice qui fera
monter le jeûne du fidèle jus­
que chez le Seigneur de
l’univers.
De cet fait, tout musulman
ayant les moyens nécessaires
doit prendre les dispositions
pour payer cette zakat à
temps compte tenu de son
importance. La zakat el fitr
doit être donné le jour de la
fête de l’Aid au plus tard
avant la prière. Car Ibn Umar
rapporta que le messager
d’Allah ordonna que la zakat
el fitr soit donnée avant que
les gens ne sortent de chez
eux pour aller à la prière de
l’Aid (Muslim). Elle peut
l’être un ou deux jours avant
la fête. Toutefois, on peut
aussi la donner dès le début
de ramadan selon les imams
Chaafi et Abou hanifa surtout
si l’on veut l’envoyer à
l’étranger. C’est aussi l’avis
de Cheikh youssouf al Quardawi qui a fait une fatwa en
ce sens.
La zakat el fitr doit être don­
née de la part des musulmans
qu’ils soient mineurs ou

3

La
majeurs (même les bébé qui
naît le jour de la fêle avant la
prière), de sexe masculin ou
féminin. A ce sujet, Ibn Umar
rapporta que le messager
d’Allah prescrivit comme
payement de la zakat el fitr du
mois de ramadan et ce, à cha­
que musulman qu’il soit libre
ou esclave un sa’ad de datte
ou un sa’ad d’orge (Muslim).
Elle peut être payée en nature
(sorgho, mil, mais, riz...)
d’environs 2 ,6 kg par per­
sonne ou en espèce. Aux pre­
miers temps de l’islam, on l’a
donnait sous forme de pro­
duits alimentaires. Il n’a pas
été rapporté en effet que le
prophète l’eut accomplit en
espèce, ses compagnons non
plus. Cependant, les savants,
après un effort d’interpréta­
tion (idjtihad) en ont conclu
que l’on peut la donner en
numéraire. Ceci confère plus
de sagesse et de souplesse
aussi bien pour les donateurs
que pour les bénéficiaires qui
auront la latitude pour acqué­
rir les produits qu’ils souhai­
tent le plus. Le prophète de
l’islam s’est toujours efforcé
de rendre claire à la
conscience des croyants cet
horizon de solidarité essen­
tielle et impérative et ce,
jusqu’à l’imposition de la
zakat el fitr.

Après la

zakat el fitr,
Vheure est à la fête
Célébrer la fête de l’Aïd el fibpour marquer la fin d’un exer­
cice spirituel majeur qu’est le
jeûne du mois de ramadan, est
une faveur bien méritée. Tout
fidèle musulman, homme ou
femme même celle en état
d’impureté majeure sont invi­
tés à prendre part à la prière de

4

religion de vérité

la fêle compte tenu de son
mérite (les femmes en état
d’impureté
majeure,
se
contenteront d’assister pour
écouter le sermon de l’imam à.
cette occasion solennelle sans
exécuter la prière).
Il est fortement recommandé
le matin de la fête de mar­
quer la différence entre le
jour de jeûne et celui de la
fête en buvant ou en man­
geant avant de se rendre au
lieu de prière. De même, il
est conseillé de faire la
grande ablution ou le grand
lavage avant d’aller à la
prière. Le jour de la fête, un
certain nombre de compor­
tements et d’attitudes doit
guider le croyant. On doit en
outre se vêtir de ses plus
beaux habits et de se parfu­
mer (sauf les femmes) pour
la prière. Selon les conseils
du prophète, on doit se ren­
dre à la prière par une voie et
revenir par une autre en
magnifiant et glorifiant
Allah.

pauvres. Partager sa nourri­
ture et sa boisson. Mais ne
jamais servir de la nourriture
ou de la boisson illicites
(viande de porc, alcool, ...) à
ses invités frissent - ils des
non musulmans. Parce que
tout ce qui est interdit les
jours ordinaires l’est aussi le
jour de la fête. La distraction
licite est également permise
comme le précise un hadith
du prophète : «distrayez-vous
et jouez car j’ai peur qu’on ne
dise que votre religion est très
rigide». Il est par ailleurs
important de faire des
cadeaux symboliques à' sa
progéniture et aux autres
membres de sa famille le jour
de la fête à la limite de ses
moyens.

La fin de ramadan

n’est pas la fin de
l’adoration de Dieu

La prière de l’Aid à propre­
ment parler comprend un ser­
mon précédé de 2 rakats. Tout
fidèle doit suivre obligatoire­
ment le sermon car il fait par­
tie de la prière. Il n’ y a pas de
nafils ni avant ni après les 2
rakats. Mais celui qui arrive en
retard après le salut final devra
rembourser les 2 rakats par
quatre rakates de prière. Le
jour de la fête, l’on doit mani­
fester la gloire et la louange de
Dieu abondamment. C’est
l’occasion aussi de présenter
tous les meilleurs voeux et
prières entre frère et sœurs.
Rendre visite aux parents,
amis et connaissances ainsi
qu’aux frères et sœurs en
Dieu.

Le jeûne du mois de ramadan
n’aurait pas de sens si l’on doit
abandonner tous les acquis de
ramadan et repartir à la case
départ. Au contraire, ramadan
est un mois qui doit aider à
vivre les onze autres mois de
l’année. Ramadan constitue
donc un espace d’entraîne­
ment pour affronter le reste de
l’année
avec
plus
de
confiance, d’assurance et de
spiritualité. C’est un mois
d’effort pour retrouver le sens
de l’action ; c’est un mois de
réflexion et de méditation
pieuse pour élever la perspec­
tive de son aspiration au delà
de son horizon limité. C’est un
mois de souvenir constant
d’Allah, de partage, de géné­
rosité et de solidarité avec les
hommes. En d’autres ternies
c’est une école.

On doit aussi le jour de la fête
être solidaire à l’égard des

Le jeûne du mois de rama­
dan ne doit donc pas être une

adoration ponctuelle récla­
mant soumission et rigueur,
le temps de quelques rites
qui une fois finis on revient
à la case de départ. Son rôle
ne se limite point à un seul
mois pour que les autres
mois venus, on se laisse aller
à l’excès après la privation,
à la négligence après l’effort
et à l’oubli après le rappel.

Ramadan est sans aucun
doute une rare opportunité
offerte aux musulmans afin
de leur permettre d’aborder
avec beaucoup de confiance,
de tranquillité et d’abnéga­
tion les autres mois de l’an­
née. D’autant plus que
Ramadan initie le jeûneur à
la constance, à la détermina­
tion, à la réflexion (car les
sens sont plus affinés), au
rappel (zikr) et à la médita­
tion et lui permet ainsi de
goutter aux délices de la foi
et de la proximité avec Dieu
ainsi qu’au pardon, à la soli­
darité, à l’amour du pro­
chain
et à l’entraide
mutuelle, valeurs cardinales
de l’islam.
Malheureusement pour beau­
coup, la fin de Ramadan signi­
fie ranger les tapis de prières,
aurevoir la mosquée, abandon
du coran laissé désormais dans
la poussière et à la merci des
termites et autres cafards,
retour à la cigarette et à l’al­
cool, bonjour les longues heu­
res de sommeil... Tout sim­
plement, ils abandonnent leurs
pratiques religieuses ou du
moins la diminuent considéra­
blement alors que la fin du
ramadan n’est aucunement la
fin de l’islam. Ces derniers
sont surnommés affectueuse­
ment «les musulmans de

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

La

plume du mois

INONDATIONS AU BURKINA

La solidarité nationale à l’épreuve
ette année, la saison
mobilisé pour répondre à la
hivernale a été particu­
détresse des populations, il
lièrement éprouvante
faut néanmoins déplorer
pour bon nombre de pays
l’acheminement tardif des
d’Afrique et du monde. En
secours dans certains villa­
effet, dix-huit (18) pays
ges inondés.
d’Afrique orientale et occi­
Par ailleurs, les autorités poli­
dentale ont été touchés par
tiques dont le soutien à la
des inondations consécutives
population en pareille situa­
à des pluies diluviennes. Ces
tion est important, a été très
inondations ont fait plus de
timide et tardif. Au delà
600000 sinistrés et au moins
même de ce comportement
250 morts.
négatif de l’Etat, je pense que
Chez nous ici au Burkina, 11
le CONASUR a péché par
régions sur les 13 que
son manque d’anticipation.
compte le pays ont été dure­
La chute de grêle en juin der­
ment frappées par ces inon­
nier qui a détruit les habita­
dations qui ont provoqué la
tions ont été un des signes
mort de 33 personnes. Par précurseurs des inondations
ailleurs, 8500 maisons se
que notre pays a connu. ”
sont effondrées, 2800 gre­
Catastrophe isolé” avait-on
niers de céréales emportés,
fait remarqué. Le CONA­
plus de 7365 ménages tou­
SUR aurait dû considérer
chés et 40637 personnes
cela comme un signe avant
sans abris. Et les besoins du
coureur de possibles catastro­
gouvernement pour venir en
phes -surtout qu’il s’est pro­
aide aux sinistrés sont
duit en début de saison hiver­
immenses.
nale et considéré comme
inhabituel-, et par conséquent
Cette catastrophe est sans
prévoir les interventions
précédent au Faso. En outre
nécessaires. Cette prévision
elle me permet de tirer des
éviterait la lenteur dans
leçons
essentielles.
Je
l’acheminement des aides et
retiens d’abord que la soli­
même préparerait les habi­
darité nationale a été sérieu­
tants des zones potentielle­
sement mise à mal. Ensuite
ment à risque. En plus, cer­
l’incapacité de l’Etat à inter­
tains barrages seraient à l’ori­
venir rapidement dans les
gine des inondations dans
secours d’urgence a été mise
certains cas. Ce qui pose sans
à nu. Au lendemain des
doute le problème de la qua­
inondations, les populations
lité des ouvrages d’intérêt
sinistrées exprimaient des
public dans notre pays.
besoins de nourriture, de
logement, de soins de santé
Jusqu’à la date du 18
et d’habillement. Si le
septembre, l’Etat est inter­
CONASUR (Conseil natio­
venu à hauteur de 400 mil­
nal de secours d’urgence et
lions de nos francs pour sou­
de réhabilitation)
s’est
tenir les sinistrés. Si elle n’est

C

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

pas négligeable, cette somme
est loin d’être suffisante pour
reloger, soigner, nourrir et
habiller les sinistrés sur une
durée qui leur permettra de
reprendre leurs activités
...économiques. Au Ghana
voisin, l’Etat a débloqué la
somme de 11 millions de dol­
lars pour venir en aide aux
populations frappées par les
inondations dans le pays en
cette saison pluvieuse. L’écart
se passe de commentaire.
C’est regrettable aussi de
constater que la solidarité
populaire a brillé par son
absence aux cotés des sinis­
trés. C’est encore plus déplo­
rable quand je fais un rapport
avec la mobilisation des
citoyens autour du football
par exemple. En 2004, les
autorités ont incité par des
moyens impressionnants les
populations à se mobiliser
fortement pour soutenir
l’équipe nationale de football
à la CAN en organisant des
souscriptions qui ont permis
de récolter plus d’un milliard
de franc CFA. Si pour l’inté­
rêt d’un jeu on est capable de
telles initiatives, et pour la vie
humaine on se contente de
mendier, il y a des inquiétu­
des à se faire.

La solidarité populaire a été
davantage mise à l’épreuve
du côté des musulmans.
Même pas un geste officiel
du côté de mes frères et sœurs
en islam qui pourtant en sont
capables. En cas de catastro­
phe naturelle, personne
n’ignore que les dons, quel­
que soient leur nature ou leur

importance quantitative, sont
toujours la bienvenue. S’il
s’agit de la construction des
mosquées, rien à reprocher
aux musulmans; ils n’hésitent
pas à y investir. S’il est vrai
que construire un lieu de
culte est une bonne action,
trouver un abri pour une per­
sonne en détresse (sinistrée)
ne l’est pas moins.

Certains croient que l’islam se
limite au culte. Non ; l’islam
comporte une dimension

sociale et communautaire. Le
prophète de l’islam a maintes
fois insisté sur des valeurs tel­
les que l’entraide, le bon voi­
sinage, la fraternité, la solida­

rité, etc. La zakat par exemple
qui est l’un des piliers fonda­
mentaux de l’islam a été insti­
tuée par Dieu pour permettre
d’éliminer ou de réduire les
disparités sociales qui existent
entre les familles. Ce n’est
donc ni plus, ni moins qu’un
impôt de solidarité contre la
pauvreté! Je ne comprend
donc pas l’immobilisme des
musulmans face aux actions
communautaires comme par
exemple venir en aide à des

populations sinistrées à la
suite d’une catastrophe.
Si pour cette année, les
pluies semblent passées, il
faudrait que chacun pour ce
qui le concerne s’apprête
mieux pour faire face aux
éventuels drames nationaux.
SJABAR

5

Société et développement
REFORME DU SYSTÈME ÉDUCATIF AU BURKINA

A quand la reforme des cœurs ?
e début du mois d’oc­
tobre 2007 marque la
rentrée officielle des
classes dans le pays
hommes intègres. Des mil­
liers d’élèves et d’écoliers
ont repris le chemin de
l’école après trois mois de
vacances marqués par toutes
sortes de loisirs et de diver­
tissements. Pendant neuf
mois encore ils vont renouer
avec le train-train quotidien
de la laborieuse vie scolaire.
Mais les choses ne seront
plus comme avant.

C

En effet, pendant que les élè­
ves savouraient paisiblement
leurs vacances, les autorités
en charge de l’éducation
nationale ont bossé dure pour
reformer le système éducatif.
Cette réforme a pour objectif
selon ces deniers, d’adapter
l’éducation aux réalités du
pays et elle entre également
dans le cadre de la réalisation
des engagements du millé­
naire pour le développement
auxquels le pays a souscrit.
Ces engagements prévoient
au titre du deuxième objec­
tif « d'ici 2015, donner à
tous les enfants, garçons et
filles, partout dans le monde,
le moyen d’achever un cycle
complet d’éducation pri­
maire.»
Dans ce sens, les démarches
du gouvernement ont abou­
tit à l’adoption par l’Assem­
blée nationale de la loi
d’orientation de l’éducation.
Cette nouvelle loi vient bou­
leverser le système éducatif
national dans son organisa­
tion et dans son contenu.

Les principaux changements
apportés sont entre autres,
l’obligation de la scolarisa­
des de tous les enfants du
tion
pays âgés de six à seize (6 à
16) ans, la gratuité de
l’école à partir de l’école
primaire jusqu’au premier
cycle du secondaire, le ratta­
chement du premier cycle
de l’enseignement secon­
daire au Ministère de l’en­
seignement de base et de

d’enseignement général (au
moins un dans chaque
département), des garderies
populaires et une université
dans chacune des treize
régions.
Cette réforme vient à point
nommé car elle était souhai­
tée depuis bien longtemps vu
l’écart et les failles que pré­
sentait le système éducatif
national. Ainsi, selon les

Vue d’écoliers dans un départment du Burkina Faso

l’alphabétisation (il devient
désormais le post primaire),
la reforme du contenu des
programmes d’enseigne­
ment à tous les niveaux du
système, l’instauration du
système LMD (licence,
master, doctorat) au niveau
de l’enseignement supé­
rieur.

Pour la mise en œuvre de
ces reformes il est prévu la
réalisation d’infrastructures
dont cent (100) collèges

réformateurs, le Burkina
Faso sera doté d’un système
éducatif efficace répondant
aux besoins aussi bien quali­
tatif que quantitatif de l’édu­
cation des enfants burkina­
bés.
Mais une reforme institu­
tionnelle et scientifique
(comme la présente) s’aurat-elle résoudre tous les maux
du système éducatif d’autant
plus ces maux n’affectent
pas seulement ces deux
aspects du système ?

S’il y a un volet sur lequel la
reforme ne devait pas rester
silencieuse c’est bien ce nou­
veau phénomène apparu dans
ces dernières année et qui
gangrène le système éducatif
national. Il s’agit de la corrup­
tion généralisée dans le
milieu éducatif et qui affecte
dangereusement le sens de
l’intégrité chez la jeunesse.
Le problème est d’autant plus
grave qu’il touche à l’inté­
grité, l’essence même du
citoyen burkinabè (pays des
hommes intègre) et compro­
met l’avenir de la nation. A
cette allure méritera t-on
encore de cette appelation
(homme intègre) admirable
de pays des hommes in­
tègres.
Depuis quelques ans, prati­
quement chaque année on
assiste à des cas graves de
fraudes aux examens et
concours. Cette année parti­
culièrement c’est l’examen
du Brevet d’étude du premier
cycle qui a tout d’abord été
atteint. Cela a occasionné la
reprise des épreuves de
mathématiques et des scien­
ces physiques à Ouagadou­
gou et à Bobo Dioulasso. Les
auteurs de ces fraudes ont été
traduits en justice puis
condamnés. Mais c’était de
la poudre aux yeux des frau­
deurs incorrigibles. Les
concours de la fonction
publique n’ont pas échappé à
leurs manœuvres diaboliques. Des cas de fraudes ont
entraîné là aussi l’annulation
de certains concours. Cela
vient démontrer que les solu-

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

ociété et développement
tions au cas par cas ne mar­
chent pas pour un phéno­
mène comme la corruption
qui est devenue un serpent
rampant dans le milieu sco­
laire et universitaire. Elles
sont d’autant moins efficaces
que le mal sévit à d’autres
échelles sous d’autres formes.
Lorsqu’on parle de notes
sexuellement transmissibles
(notes accordées aux élèves
en échange de sexe), de
défense en ligne (tricherie
organisée
par
des
groupes d’étudiants ou de
candidats aux concours) dans
le milieu scolaire et académi­
que on sait de quoi il s’agit.
Par ailleurs, des maux
comme l’incivisme, le clien­
télisme, la toxicomanie, la
débauche sexuelle, le mépris
des enseignants (qui sont
copieusement insultés et hués
pendant les cours), le gain
facile sévissent dans le milieu
éducatif. Au fait, que devien­
drons des élèves ou étudiants
qui auraient passé tout leur
cursus scolaire ou universi­
taire à tricher ? Sinon des cri­
minels dangereux qui n’hési­
teront pas à tricher avec la vie
des autres, à détourner les
deniers publics, à tordre le
coup à la justice... Puisqu’ils
sont formés à l’école du gain
facile. De même des étu­
diants drogueurs, méprisant
les enseignants ne sauraient
rien apprendre et ne seront
nullement formés. Ainsi, nos
diplômes qui ont toujours été
bien reçus hors de nos fron­
tières vont perdre leur valeur.
Il est donc temps pendant
qu’on reforme le système
éducatif national de poser la
question de la morale qui
agonise dans nos écoles. On a
beau avoir un système éduca­
tif le plus performant du
monde si les acteurs ne sont

mus du sens du civisme et
d’une certaine moralité, il ne
produira que des résultats
médiocres sur le plan qualita­
tif. A quoi sert de former des
individus avec «des têtes
pleines à craquer» de
connaissances
mais
des «cœurs vides» de toute
bonne moralité.
Alors, l’opportunité de cette
reforme doit être saisie pour
arrêter cette dérive générali­
sée de la jeunesse. Il faut y
trouver une solution radicale
qui s’inscrit dans une longue
durée. Un dicton ne dit-il pas
qu’il vaut mieux prévenir que
guérir. Cette solution peut
être par exemple l’introduc­
tion de l’éducation morale et
civique dans les programmes
d’enseignements.
Notre
société (africaine) a des
valeurs morales qui ont su
maintenir la cohésion et une
vie saine dans les différentes
communautés avant l’arrivée
du colon. C’est un fait impor­
tant à ne pas ignorer car nos
sociétés restent une réalité et
la société moderne occiden­
tale, de laquelle nous calcons
l’éducation de nos enfants en
est une autre. L’éducation ne
sera mieux adaptée à nos réa­
lités que quand elle prendra
en compte nos valeurs mora­
les.
Prendre en compte nos
valeurs traditionnelles ne
signifie pas retourner aux
enseignements traditionnels
ni aux enseignements reli­
gieux comme d’aucuns pour­
raient sous entendre. Ce sont
les valeurs morales transver­
sales à toutes les communau­
tés, donc universelles, comme
l’intégrité, la loyauté, le
civisme, le sacrifice de soi,
l’altruisme... qu’il faut incul­
quer à nos enfants.

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

Cependant il convient de
relever qu’on ne s’aurait
assainir nos écoles en igno­
rant la part de responsabilité
de nos éducateurs et de l’en­
semble de l’administration.
Car si fraude il y a dans les
examens et concours, des
enseignants ou l’administra­
tion ont quelque part failli.
Du reste, dans les fraudes de
cette année, des enseignants,
des agents des services et
des ministères chargés de
leur organisation ont été mis
en cause. Si les sujets d’exa­
men se retrouvent dans la
rue, très certainement c’est à
partir d’un maillon faible de
la longue chaîne d’organisa­
tion de ces activités.
Par ailleurs, des pratiques
comme le favoritisme, l’ex­
ploitation sexuelle des élè­
ves et étudiantes contre des
notes complaisantes, l’es­
croquerie des parents d’élè­
ves, l’abandon des élèves
qui chôment à longueur de
journée sont le quotidien de
nos éducateurs dont certains
d’entre eux n’hésitent pas à
qualifier tout ceci de «petits
avantages
du métiers»
(PAM). Dans ces conditions,
ils doivent être «rééduqués»,
ou du moins moraliser. Car
on ne saura demander aux
gens de transmettre ce qu’ils
n’ont pas ou ce qu’ils n’in­
carnent pas. Pour ce faire, la
reforme doit redynamiser les
différents mécanismes de
suivi, de contrôle et d’éva­
luation des différents corps
des enseignants et de tous
les acteurs du secteur éduca­
tif, prendre en compte dans
leur formation les règles de
la déontologie et pourquoi
pas l’éducation civique et
morale dans les écoles pro­
fessionnelles.

D’autre part un sérieux audit

du système d’organisation
des examens et concours
doit être fait (comme l’a
promis le gouvernement)
afin de le reformer égale­
ment.
Enfin un autre bémol à cette
présente reforme est la non
prise en compte des enfants
des écoles coraniques. Pour­
tant de nombreux enfants de
la tranche d’âge de scolari­
sation obligatoire instituée
par la nouvelle loi d’orienta­
tion sont envoyés dans ces
écoles et du même coup sont
mis en marge de l’éducation
nationale. On ne doit pas se
retrancher derrière des argu­
ments du genre «c’est un
sujet sensible» pour se
dédouaner. Il faudra plutôt
sensibiliser les fondateurs,
les maîtres des écoles cora­
niques et les associations
islamiques afin d’établir un
partenariat à même de per­
mettre à ces enfants de sui­
vre les deux types d’éduca­
tion. Ce n’est pas impossible
mais il faut savoir s’y pren­
dre. Si d’office on n’exclut
des enfants de cette catégo­
rie, qui représente environ
trente sept mille (37 000)
enfants par an (selon une
étude menée en 2006 par la
fondation pour le dévelop­
pement communautaire du
Burkina Faso), l'objectif du
millénaire ne sera pas réalisé
au Burkina Faso.

Comme on peut le constater
la reforme du système éduca­
tif national du Burkina Faso
s’impose mais elle doit être
profonde et complète. Mais
elle ne le sera que si elle
prend en compte l’être
humain dans tous ses aspects
(scientifique, social et moral).

^Ahmed Nasir DAO

7

Zoom
ORGANISATION DU HADJ AU BURKINA FASO

La mauvaise conscience des
associations islamiques
ans quelques semai­
héritage qui vous dévolu de
nes des milliers de
votre Abraham». Le hadj
est le 5e pilier de l’islam
candidats au pèleri­
dont
nage à la Mecque s’envole
­ l’obligation est fondée
par le verset 97 de la sou­
ront pour la visite des lieux
rate 3 : «le pèlerinage à la
saints de l’islam. Ils en
reviendront parer de leur Mecque est un devoirs
envers Dieu pour toute per­
titre de ladji ou de hadj a.
sonne capable de l’effec­
Mais la gestion du hadj à
tuer».
tout temps fait couler beau­

D

coup d’encre et de salive au
pays des hommes intègres.
Ainsi, l’organisation du
hadj sous forme structurée
a évolué dans le temps sous
plusieurs formes. Dans ce
numéro nous vous condui­
sons dans les sillages de
l’organisation du hadj au
Burkina Faso depuis ses
débuts à nos jours.

Le hadj ou pèlerinage à la
Mecque est un voyage vers
la maison sacrée de la Mec­
que (la ka’aba) pour accom­
plir les rites prescrits par le
coran et la sunna du pro­
phète. Depuis la construction
de la ka’aba par Abraham et
son fils Ismaël, les hommes
y ont toujours accompli un
pèlerinage. En effet la ka’aba
fut le symbole de la vraie
divinité où les tributs arabes
de la région se rendaient en
pèlerinage.
Selon les traditions musul­
manes le hadj est une per­
pétuation de la tradition
d’Abraham, car le prophète
dit : «informez vous bien de
vôtre pèlerinage, c’est un

L’organisation

du hadj a une
histoire
Au Burkina Faso les
musulmans ont toujours
pris part au hadj à travers
diverses formes d’organi­
sation. Ainsi, pendant la
période coloniale, accom­
plir le hadj relevait d’initia­
tive personnelle plutôt que
d’une structure chargée de
son organisation. En effet,
la colonisation aidant il
n’existait pas de cadre
organisationnel. En outre
les musulmans étaient sou­
mis à une surveillance
stricte par le fait de la poli­
tique coloniale. Le gouver­
neur général basé à Dakar
avait demandé que soit
contrôlé la propagande
faite par les participants au
hadj. Car il était convaincu
que « l’hostilité à l’action
de la France est entretenue
par les pèlerins de la Mec­
que » AUDOIN Jean et
RAYMON Deniel “l’Islam
en Haute Volta à l’époque

coloniale”. Ainsi donc le
voyage pour la plupart des
fidèles se faisaient clandesti­
nement afin d’éviter les
représailles du colon. On
n’annonçait donc pas les
départs pour le hadj. Seule
les retours des pèlerins
étaient connus. Les moyens
de transport à l’époque
ajouté à cette politique
répressive du colon ont
amené nombre de ces
fidèles à effectuer le voyage
à pied.

C’est aux indépendances
qu’apparaissent les premiers
cadres
organisationnels.
L’organisation et la gestion
du hadj étaient au tout début
assurées par les associations
islamiques en l’occurrence la
communauté musulmane de
la Haute Volta (devenue
après la CMBF -Commu­
nauté musulmane du Bur­
kina Faso). En 1979 suite aux
divergences et au fractionne­
ment de la communauté
musulmane ayant donné
naissance au Mouvement
sunnite et à l’association isla­
mique de la tidjania, le hadj
connaîtra une gestion tripar­
tite instituée par un décret 11
Décret no 79-290 PRES/PM
/IS/DGI du 19 juillet insti­
tuant la commission national
de pèlerinage (CNP) du gou­
vernement.
Puis
en
décembre 1995 par un autre
décret 22 Décret no 95-513/
PRES/PT/MAET du 4

décembre portant création
de la CNOPM, l’Etat
décide de prendre en main
la gestion du hadj. Il s’agis­
sait pour les responsables
politiques du pays « de sou­
lager les Burkinabè des diffi­
cultés rencontrées en Arabie
Saoudite,
de
restaurer
l’image de marque du pays
vis-à-vis des autorités saou­
diennes» avait soutenu
Ablassé Ouédraogo, ministre
des affaires étrangères à
l’époque et pour son collègue
Yéro BOLY de l’administra­
tion territoriale, c’est «de
remédier aux désastreuses
conditions de vie et de séjour
des Burkinabè en Arabie
Saoudite».

Les responsables des asso­
ciations en charge de l’orga­
nisation du hadj n’ont pas eu
à redire eux qui se sont illus­
trés par une mauvaise orga­
nisation entraînant la désola­
tion dans les rangs des pèle­
rins une fois en Arabie Saou­
dite. En effet, on se rappelle
les problèmes posés par les
démarcheurs ; opération
d’escroquerie, voire spolia­
tion des pèlerins de leurs
pécules, de leurs fiais de
loyer. Conséquence, les
pèlerins se retrouvaient
désespérés,
abandonnés
sans logements, dans les
moquées, devant les maga­
sins et boutiques, voire
dans les rues de la Mecque.
Cependant certaines person­
nes voyaient dans l’implica­
tion de l’Etat une manœuvre
d’instrumentalisation politi­
que du hadj et cela afin
d’élargir la base électorale du
parti au pouvoir. Ils avan­
çaient comme preuve le
nombre croissant des «pèle­
rins de la présidence».

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

Zoom
D'autres tout en reconnais­
d’abord grâce à Dieu.
sant la nécessité de soulager
Nous lui en sommes recon­
les pèlerins de leurs difficul­
naissant pour cette grande
tés et d’assainir l’organisa­ faveur. Remercions ensuite
les autorités de notre pays
tion du hadj de ses maux cla­
et à leur tête son président
maient le caractère religieux
pour ce gros et noble
du hadj. Us affirment de ce
cadeau fait aux musul­
fait que sa gestion devra
mans. Peut on oublier ici
revenir aux musulmans.
de rendre hommage au
C’est ainsi que face à la per­
comité d’organisation qui
sistance des difficultés et
de tous les avis (du moins
suite à l’édition de 1999, les
pour
ceux qui sont respon­
associations
isla-miques
sables) a abattu un travail
insistent sur le caractère isla­
gigantesque et de qualité; ?
mique du pèlerinage à la
Nous ne pouvons que chan­
Mecque. Dans une corres­
ter les louanges à Dieu et
adressée
au
pondance
MATD, elles critiquent la
gestion du gouvernement en
ces tenues : «L’intervention
de l'Etat dans l'organisation
du hadj de 1996 à 1999 loin
de soulager les musulmans,
a été source de conflits».
Pour rendre justice à cellesci «les associations isla­
miques proposent que l’Etat
leur restitue l’organisation
du hadj pour compter du
hadj 2000».

L’Etat organise donc sa
1ère édition en 1996. La
réussite du hadj est saluée
par tout le monde à com­
mencer par les pèlerins. La
presse la qualifiera de
«coup de mérite». Dans
l’éditorial du journal isla­
mique L’APPEL No 10 de
juillet- août 96, on peut lire
«Si les Burkinabè qui sont
partis pour la premièrefois
à la Mecque n ’ont pas vécu
les galères d’antan. Si les
habitués trouvent que cette
année le pèlerinage est de
loin meilleur à celui des
années passés, et si la
presse peut sans ambages
qualifier de "coup de
mérite’’ l’organisation du
pèlerinage 96 , c’est tout

demander (comme l’islam
nous le recommande) qu ’il
donne davantage de discer­
nement à nos dirigeants et
qu’il récompense chacun
pour ses efforts».

Mais cette réussite ne sera
reproduira pas. Très vite les
vieux démons vont faire
leur retour. On s’aperçoit
que le parasite n’a pas
quitté le fruit. Le hadj 97
est un échec. Le journal
L’Appel titre : "A qui la
faute du grand échec ?”
avant de renchérir dans un
article «de l’avis de la majo­
rité des pèlerins, le hadj 97 a
été un véritable calvaire. Au

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

lieu d’être la sauveur des
pèlerins, la CNOPM leur a
fait voir de toutes les cou­
leurs ». La suite on la
connaît fut un conflit de
compétence entre le Minis­
tère de l’administration terri­
toriale et de la sécurité
(MATS) et Ministère des
affaires étran-gères (MAET)
respectivement président et
vice président de la Commis­
sion nationale d’organisation
du pèlerinage à la Mecque
(CNOPM) selon le décret de
décembre 95. Cette querelle
des ministres aboutit à la

effet, les difficultés seront
liées à la gestion des passe­
ports, au choix de la compa­
gnie de transport, à la remise
des pécules (certains pèle­
rins restent plusieurs jours
sans pécules d’autre le reçoi­
vent incomplet), les difficul­
tés de logements (trop chère
et éloignés de la mosquée
sacré, souvent en mauvais
état), des problèmes d’enca­
drements des encadreurs qui
abandonnent les pèlerins
une fois arrivés à la Mecque.
La gestion des éditions de
2002 et de 2003 est marquée
par plusieurs problèmes sur­
tout avec le transporteur la
compagnie Faso Airways.
C’est le ras le bol général.
De plus en plus des voix se
lèvent au sein des associa­
tions islamiques pour récla­
mer le retrait de l’Etat.
C’est dans ce contexte qu’en
2005 l’Etat décide de se reti­
rer de la gestion du hadj 44
Décret No 2005^68/PRES
/PM/ MATD portant organi­
sation du pèlerinage à la
Mecque.

restructuration
de
la
CNOPM par une relecture 33
Décret no 98-027/PRES
/PM/MATS/MAET du 02
février 1998 du décret de
décembre 95. Ainsi, le rôle
des associations islamiques
devient plus important par la
création d’un secrétariat per­
manent et sa nomination sur
leur proposition par l’aug­
mentation des prérogatives
de l’Assemblé Générale. En
outre, le nombre d’associa­
tions islamiques passe de 3
à 8.

Pour autant les difficultés
rencontrées par les pèlerins
ne seront pas résolues. En

Ce nouveau décret instaure
une sorte de libéralisation
de l’organisation du hadj. Il
accorde la possibilité à
toute association islamique
d’organiser le hadj et ce
conformément à un cahier
de charge élaboré par
l’Etat.
Pour cela elles doivent sou­
mettre un dossier pour l’ob­
tention d’un agrément
auprès du MATD.
En
2006, une trentaine d’asso­
ciations ont eu l’agrément
du MATD. Huit d’entre
elles qui étaient membres
de la CNOPM avec l’Etat
se sont regroupées pour

9

Zoom
créer la commission natio­
nale islamique du pèleri­
nage (CN1P) et cela à tra­
vers une convention. La
CNIP gardera pour l’es­
sentiel la même forme
d’organisation que
la
CNOPM. Cependant c’est
un commissariat général
qui remplace le secrétariat
permanent.
Quant aux 22 autres associa­
tions ayant obtenu l’agré­
ment, elles sont restées en
marge. Comme quoi il y a
des associations qui ne
retrouvent leur vocation de
servir les musulmans que
lorsqu’il s’agit de l’organisa­
tion du hadj.

La CNIP avait pour mis­
sion, de l’inscription des
pèlerins à l’accomplisse­
ment des rites aux lieux
saints en passant par la ges­
tion des logements, des
contrats de transport, des
demandes de visa et de
l’encadrement des pèlerins.
Pour l’édition 2006, la
CNIP pour diverses raisons
n’a pas fonctionné effecti­
vement sous la bannière de
la Fédération des associa­
tions islamiques qui venait
de naître.

plus tôt), l’insuffisance du
personnel d’encadrement,
des délégués des associa­
tions membres non compé­
tents et manquant de
volonté pour le travail, et
abandonnant leurs tâches
une fois sur les lieux saints
pour leurs propres affaires.
Pourtant ce sont les mêmes
qui se battent chaque année
à la porte de la commission
pour faire partie de la com­
mission. Ou encore ils sont
les mêmes représentants de
leur association connue si
toute l’association se résu­
mait à eux seulement. Il faut
aussi déplorer les associa­
tions qui ne font que se faire
représenter par les mêmes
personnes depuis des décen­
nies.

Un autre problème qui
demeure est la question des
logements des pèlerins sur
les lieux saints. Ces loge­
ments sont souvent éloignés
des lieux de culte et ne sont
généralement pas en très
bon état.

face

Quant au problème de trans­
port, le choix du transporteur
n’a pas toujours été fait dans
les règles de l’art. Et réguliè­
rement la programmation des
vols a toujours causé pro­
blème. Les pèlerins, partent
trop tôt ou attendent des jours
à l’aéroport sans vol pour à la
fin faire une course contre la
montre.

Comme ses prédécesseurs,
la CNIP va connaître aussi
des difficultés dont certai­
nes sont récurrentes au
Hadj. Le manque de moyen
financier à temps opportun
(la commission ne dispose
pas toujours de ressources
pour entamer ses activités

En outre, il y a l’insuffi­
sance de concertation entre
les membres de la commis­
sion alors que leur religion
les appelle à la consultation
dans leurs affaires, «gw/
répondent à l’appel de leur
Seigneur
se consultent
entre eux à propos de leurs

La dernière formule
et les difficultés

auxquelles elle fait

10

Combien coûtera le hadj cette année ?
Ceux qui ont l’intention d’aller au hadj ou d’inscrire un
parent ont les oreilles braquées vers la commission. Ils
attendent avec impatience le coût du hadj. Ces dernières
années le coût du hadj a connu une progression fulgu­
rante. En effet en 2006 les pèlerins ont déboursé la
somme de 1 345 000 FCFA contre 1 490 000 à la dernière
édition. Le prix serait passé de 596 200 FCFA en 1997 à
1 490 000 FCFA en 2007.

Partira, partira pas !
Dans certains pays (Magreb ; Indonésie, Pakistan ....)
c’est un tirage au sort qui détermine les participants au
hadj. Ceci au regard du contingentement fait par l’Arabie
Saoudite. Au Burkina Faso cependant, nous avons de la
peine à remplir notre quota. Et voila que certains fidèles
espèrent jusqu’au départ du dernier vol être toujours du
voyage. Comme on le dit le hadj c’est vraiment l’appel de
Dieu. Les pèlerins ne disent t-ils pas une fois sur le terri­
toire sacré : «labayka alloumma labayk». Mais de là à
atteindre jusqu’au dernier départ il y a vraiment de l’es­
poir qu’il faut avoir. C’est cela aussi la foi.

A l’aéroport
Au départ de chaque vol du hadj les futurs hadj sont
convoqués six heures avant le vol. C’est une attente trop
longue pour les vieillards. A la question de savoir pour­
quoi cette longue période d’attente ? Eh bien, en grande
partie, pour remplir le formulaire des services de l’immi­
gration. Ne pourrait-on pas trouver un autre mécanisme
pour alléger cela, surtout que la majorité des ces person­
nes ne sont pas alphabétisées en français. On pourrait par
exemple faire ressortir les informations essentielles et les
responsables du comité d’organisation se chargeront de
les fournir sur une liste unique à chaque vol au départ
comme au retour. On contribuera ainsi à réduire les temps
d’attente à l’aéroport pour le bien des uns et les autres.

affaires» S42 V38.

L’organisation
(lu hadj 2007
déjà en marche
Pour l’édition 2007 qui s’an­

nonce,

elle sera organisée

dans le cadre de la Commis­
sion Technique Nationale
chargée du Hadj(CTN hadj)
sous la tutelle effective de la
Fédération des associations
islamiques du Burkina
(FAIB). La machine est déjà
mise en marche. Un commis­
sariat de 8 membres a été

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

mis en place. Elle est prési­
pour les tâches, aptes à
est que beaucoup de pèlerins
pas la tâche du comité d’or­
dée par un vieux de la vieille,
accomplir les différentes
une fois de retour regrettent
ganisation. Enfin, il y a des
El hadj SANA Abdrahmane
missions et pleines de
par exemple de ne pas savoir
pèlerins qui une fois à la
membre de la communauté
volonté pour être au service
lire le coran quand ils étaient
Mecque se préoccupent des
musulmane et ancien prési­
à la Mecque.
de Dieu ; au lieu de fournir
activités accessoires (visite
dent de la détruite association
des gens dont le plus grand
Alors à qui la faute ? Aux
de boutiques et magasins,
des démarcheurs du Burkina.
mérites ou qualité est d’avoir
associations, à la commis­
Espérons seulement que cela
assisté à plusieurs éditions du
achat de souvenirs) plus que
sion d’organisation du hadj
ne ramènera pas les vieux
Hadj.
et autres démarcheurs char­ de rechercher les avantages
démons et un retour à l’ère
gés de l’inscription des pèle­
spirituels du voyage en étant
Les pèlerins ont
des démarcheurs. Le com­
rins qui doivent se donner un
assidus dans les
actes
missariat désigné procéderait
une grande
peu de moyens pour former
d’adorations.
actuellement à la mise en
les futures pèlerins. Au Mali
responsabilité dans
place des sous commissions.
voisin malgré la multiplicité Il y a aussi certains de nos
les difficultés de
Nous espérons que ces nou­
des structures organisatrices,
compatriotes vivant en Ara­
veaux responsables nous
l’organisation
tous les pèlerins sont formés
bie Saoudite au lieu d’être
réserveront une surprise
à la maison du hadj avant
A
toutes
ses
difficultés
agréable.
leur départ. Il y a aussi la res­ un courroie de facilité se
inhérentes à l’organisation
ponsabilité des personnes manifestent par une occu­
On aura remarqué que jusque
s’ajoutent celles liées aux
qui inscrivent leurs parents
pation anarchique des lieux
là, les difficultés du hadj sont
pèlerins eux mêmes. En
pour le hadj. La plupart n’in­
destinés aux pèlerins et par
d’ordre financier et organisa­
effet, la première difficulté
forme ces derniers qu’à quel­
tionnel. La majeure partie
des actes d’escroqueries.
est liée à l’âge des pèlerins.
ques jours du départ. Cela
des problèmes reste liée aux
La majorité des pèlerins rend difficile toute possibili­ Toutefois, il faut relever et
ressources humaines. On
sont du 3e âges. S’il est vrai
saluer les efforts des étu­
tés de formation.
aura au Burkina Faso tenter
que le hadj est un acte spi­
diants burkinabés à l’uni­
beaucoup de schémas organi­
rituel, il exige un effort Il y a enfin la responsabilité
versité de Médine qui ont
sationnels pour le hadj et on
physique difficilement sup­ individuelle de chaque
continuera d’en expérimenter portable par les personnes musulman à se former sur toujours apporté leur sou­
tant que les représentants des
les principes de sa religion.
tien à l’encadrement de la
âgées.
associations au sein de la
En outre certains pèlerins
commission et des pèlerins.
La
seconde
est
liée
à
l

igno
­
structure organisatrice ne
sont très impatients, d’autres
rance d’une grande partie manquent de discipline,
seront pas de qualité, tant que
des pèlerins des rites du
chaque membre de la com­
toute chose qui ne facilite
hadj Mouaz Benldriss
hadj. Hors mi deux associa­
mission ne sera pas animé de
la volonté stricte de travailler tions qui forment leurs pèle­
pour le hadj donc pour Dieu rins, les autres n’ont aucunes
Suite de la page 4
activités dans ce sens. Une
et dans l’intérêt des pèlerins.
Ramadan» parce que pendant ce mois, ils sont bons musul­
A ce propos Walter Wriston partie des pèlerins ignorent
mans et prennent d’assaut les lieux de cultes et de prêches.
au delà des rites du hadj les
disait: «/a chose qui compte
B-A BA de la prière. De
c’est le personnel. Si vous
Cette pratique ne dure qu’un mois. Ceux-ci n’ont rien com­
sorte qu’ils ne peuvent
arrivez à avoir la personne
pris du Ramadan et en sortent grands perdants.
même pas accomplir une
qu 'il faut au poste qu ’il faut,
11 convient également de gérer son temps avec minutie
bonne
prière
seule.
Et
on
les
il ne vous reste pratiquement
après Ramadan car le temps d’une vie entière est insuffi­
voit inscrits pour le hadj.
plus rien à faire. Par contre
sant pour adorer Allah comme il se doit. Le jeûne est une
Certes les 2 piliers ne sont
si vous avez la mauvaise per­
opportunité où le cœur du fidèle communique directement
pas intrinsèquement liés,
sonne dans le poste, il n’y a
avec Allah et se veut plus proche du Créateur en tout
mais il faut savoir que nous
aucun système de gestion
temps et en tout lieu. C'est pourquoi nous devons savoir
connu à l’homme qui peut ne pouvons bénéficier de la
préserver lés acquis après ramadan. Car ramadan est un
vous sauver». Il faut que les valeur spirituelle du hadj
mois pour nous aider à vivre onze mois.
associations mettent à la dis­
que si nous arrivons à un
/^Salamata SIDIBE
position de la commission bon recueillement une fois
des personnes qualifiées
aux lieux saints. La preuve

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

11

Dossier
FORMATION DES CADRES D’ASSOCIATIONS

Le plus grand défi des musulmans
du Burkina
Après ce public que sont les
qui disposent d’une trésore­
a communauté islami­
fait face à de sérieux défis.
imams, il y a dans la foulée
rie est le plus souvent défec­
que nationale s’est
L’inorganisation semble être
les jeunes musulmans. Cela
tueuse. Les stratégies de
constituée en organisa­ la caractéristique essentielle
pose du même coup la ques­
tion au lendemain de l’accesde
­ ses structures. La source
mobilisation sont inexistan­
tion de l’enseignement dit
sion du pays à l’indépen­
tes. Il existe des associations
de ce mal réside dans l’ab­
coranique et franco-arabe
dance. La première structure
dont tout le fonctionnement
sence de formation des mem­
(foyer ardent et Medersa). Le
fut la Communauté musul­
bres de la communauté. La
gravite autour d’un individu
contenu de cet enseignement
mane créée en 1962 regrou­
ou d’un groupe d’individus
problématique de cette for­
est inadapté aux besoins de
pant les musulmans de toutes
qui sont à la fois les respon­
mation se situant aux
formation des jeunes musul­
tendances et constituant leur niveaux des cibles et du
sables et les militants. Il
mans.
porte parole auprès de l’Etat.
n’existe aucune initiative,
contenu. Elle est d’autant
A partir des années 70, les
aucune innovation. Il ne faut
plus importante qu’elle est la
Dès les années 60, la ques­
tendances tidjianite et salacondition et le facteur de la
cependant pas peindre le
tion des écoles coraniques
fiste en quête d’originalité pérennité de la communauté.
tableau en noir.
s’est posée à la communauté
quelque fois suite à des
Il faut relever que la forma­
A côté de la formation des
musulmane. Lors de son
divergences aigues vont se
tion des responsables est un
congrès de 1964, un appel a
responsables il y a celle des
constituer en association à
besoin crucial au niveau des
imams. Ces derniers ont
été lancé en ces termes : «Les
part entière. Plus tard, beau­
associations islamiques quand
besoins des rudiments requis parents et les marabouts
coup d’autres associations
on sait les insuffisances qui
pour assurer cette noble et
supportent une lourde res­
vont naître. Aujourd’hui, leur
caractérisent la gestion de ces
exigeante fonction. De la ponsabilité vis-à-vis de Dieu
nombre
avoisine
200,
structures. Les responsables
lorsqu’ils laissent errer les
compétence et de la droiture
regroupées au sein de la
manquent souvent les préala­
enfants comme des animaux,
des imams dépend la santé
Fédération des associations
bles de la conduite des ren­
spirituelle des membres de la
lorsqu’ils les laissent men­
islamiques
du
Burkina
contres, l’élaboration des rap­
communauté. Pourtant au
dier Dans un des hadiths le
(FAIB). Cette fédération
ports, la planification des acti­
Burkina Faso, cette fonction prophète flétrit la mendicité
regroupe en théorie tous les
vités ; bref, la gestion admi­
est assumée dans l’ignorance
en ces termes : "la main qui
musulmans de notre pays.
nistrative et financière. En la
et la médiocrité. En témoigne
donne est au dessus de celle
Le point de cette évolution matière, la seule volonté et la
les sermons d’autres époques
qui reçoit”. Les enfants ou
” bonne intention” ne suffi­
laisse croire qu’en dépit des
invariablement récités sans
garibous se nourrissent de
sent pas. L’absence d’un mini­
divergences et parfois des
aucun effort d’actualisation.
tout ce qu’on leur donne
mum de formation des res­
crises, il y a eu une prise de
La question d’imamat est cer­
voire même de la viande de
ponsables est la cause des dis­
conscience chez les musul­
tes délicate en ce qu’elle porc, de chien, aliments
fonctionnements administra­
mans de la nécessité de
constitue dans certaines loca­ proscrits par l’Islam et par­
tifs et des incohérences dans
défendre ensemble leurs
lités une affaire de famille ou fois des restes d’aliments
les actions.
intérêts en tant que commu­
de clan mais leur donner un
malsains. Lorsque l'occa­
nauté de destin. Le jugement
minimum de formation est sion se présente, ces men­
Pour les associations qui se
de son action se situera
une donnée existentielle. Des
diants
deviennent
des
réclament structures de
maintenant dans les efforts à
séminaires, colloques, des
voleurs qui viennent grossir
da’wa, elles se contentent
consentir pour construire
journées de réflexion impli­
l

armée
des
petits
délin
­
pour la plupart de faire des
cette communauté.
quant réellement les bénéfiquants...».
prêches dans les mosquées ;
cières leur permettrait de
technique quelque peu ina­
Après plus de trois (03)
Ce cri de cœur pose le pro­
prendre conscience de l’im­
daptée aux nouvelles exigen­
décennies d’existence avec
blème des conditions d’étude
portance de leur fonction tant
ces du travail islamique.
un paysage associatif suffi­
de ces enfants et de leur deve­
par la diversité de ses mis­
samment étoffé, la commu­
nir social. Ceci témoigne que
Par ailleurs, la question
sions que par le symbole
nauté islamique nationale
depuis les indépendances, le
financière pour les structures
qu’elle représente.

L

12

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

Dossier
coranique s’est posé aussi
bien dans sa forme que dans
son contenu dans un monde
en perpétuel progrès.
Aujourd'hui encore, la ques­
tion est d’actualité. Le sys­
tème continue de produire
des hommes en total décon­
nexion avec leur temps. Ce
sont des marabouts vendeurs
d’illusion et autres mendiants
professionnels. Il est grand
temps que les structures se
penchent sur ce problème.
Les récentes tentatives de
l’ONG Médecin sans Fron­
tière d’appuyer des projets et
programmes dans le sens de
la formation des maîtres
coranique et des élèves se
sont soldées par un échec.
On se demande ce qu’il y a
de plus préoccupant pour que
les structures islamiques
négligent de telles initiatives.
Les medersas qui apparais­
sent comme des cadres plus
modernes ne sont pas sans
poser de problème. En effet,

le manque d’enseignants
qualifiés, le problème d’har­
monisation des programmes,
la valorisation des diplômes,
l’équipement
demeurent
autant de problèmes que
connaissent ces établisse­
ments.
L’aide arabe obtenue à partir
des années 70 avec l’ouverture
du Burkina Faso sur le monde
arabe (politique extérieure du
Président Sangoulé), si elle a
été d’un apport non négligea­
ble dans les constructions et
l’équipement des medersas n’a
pas pu résoudre tous les pro­
blèmes. Si chez les premiers
élèves la motivation pour la
fréquentation des medersa
n’étaient que l’apprentissage
des préceptes de l’Islam et la
perfection de la foi au lieu d’un
éventuel débouché profession­
nel, aujourd’hui l’emploi des
jeunes sortis de ces écoles,
même à l’issu des études dans
les pays arabes, reste problé­
matique,
leurs
diplômes
n’étant pas reconnus.

Le statut d’établissement
privé d’enseignement et la
création de la commission
nationale des statuts et pro­
grammes de l’enseignement
arabe relevant des ministères
chargées de l’enseignement
n’ont pas pu apporter une
solution définitive aux pro­
blèmes des medersas et éco­
les franco arabes. La fonda­
tion pour le développement
communautaire estime le
nombre de talibbés à 37 000
dans les chefs lieux des 45
provinces du Burkina.
Outre ces publics cibles,
c’est la grande masse des
musulmans du B F qui a
besoin d’être formée. Cette
formation doit avoir pour
objectif d’améliorer les
connaissances de base de la
religion, des pratiques cul­
tuelles, de cultiver l’esprit
militant,... Les premiers
cadres de cette formation
sont les mosquées. Mais
encore faut-il qu’elles soient
dotées de bons comités de

gestion ou d’animation.
Ensuite, les occasions de sor­
ties de da’wa, les sermons,
les prêches publiques, les
émissions Radio et TV sont
des occasions pour conscien­
tiser les communautés sur les
vrais problèmes de la société
en général et de la commu­
nauté islamique en particu­
lier.
De telles visions au niveau
des structures islamiques
. notamment celles à caractère
national feraient des fonde­
ments solides à la FAIB (qui
se trouve face à tous ces
défis) sinon cette structure
fédérative ne sera que le
reflet de ses structures mem­
bres. Le fonctionnement
optimal et efficient de nos
associations passe nécessai­
rement par la formation sur­
tout des responsables. C’est
là la vraie voie de construc­
tion de la communauté.

z^Kadré Sawadogo

Ce journal est le vôtre. Faites la preuve de votre attachement
à la vérité et à la bonne information.
Lisez la Preuve. Vos critiques, suggestions et articles sont
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La Preuve n° 00 - Octobre 2007

13

Flash back

Comment le califat a pris fin ?

La révolution jaune turc se prépare

à Paris à l’occasion du centenaire
de la révolution française. Le mou­

vement insurrectionnel débute en

e tenue califat désigne une
fonction. 11 dérive du mot
khalifat emprunté à l’arabe
qui a servi à désigner le chef de
communauté musulmane. La ques­
tion du califat alimente très sou­
vent les débats sur la Umma islami­
que et son devenir d’où le bien
fondé de cette modeste réflexion.

L

Certains oulémas considèrent que le
califat s’arrête à la fin du règne des
quatre califes bien guidés. Les juifs
ont œuvré à cette fin. Ils réussirent
leur coup en assassinant le calife
Omar. Ce même complot se poursui­
vit sous Uthman. Abdallah ibn Sab­
bat parcourt les provinces (Basra,
Koufa, Egypte, Damas) pour inciter
à la révolte contre le calife. Uthmane
finit par être assassiné par les insur­
gés. Ces troubles se poursuivirent
sous Ali qui fut à son tour assassiné
par les kharidjites. Ali n’ayant pas
désigné de successeur, sa mort mar­
que la fin du califat selon certains.

C’est plutôt la compréhension que
ces derniers ont des propos suivant
du prophète (saw) : vie califat ne
durera que trente années, puis ce
sera une monarchie» cité par Ahmad
et les sunnan. Abou Oubeida ibn al
jarrab rapporte que le prophète a
dit : vie début de votre religion
c ’était une prophétie et une miséri­
corde, puis ce sera un califat et de la
bonté ; puis ce sera une monarchie et
de la contrainte» En effet, à sa mort
Ali s’est contenté de dire à son fils
. Hassan : «je ne vous ordonne rien, je
ne vous interdis pas de choisir qui
vous voulez». Les habitants de Koufa
prêtèrent serment à Hassane mais
celui-ci désista six mois plus tard en
faveur de Moawiyya pour mettre fin
à la discorde. Après ce lut le tour de
Yazid de succéder à son père ; le cali­
fat devient un pouvoir monarchique
dont les banu umayya sont la pre­
mière dynastie. Ils régnèrent de 659 à
750 puis ce fut les banul Abbas de
750 à 1258.
Des principautés surgirent ça et là
dans le monde arabo-musulman
mais ne pourront pas se constituer
véritablement en rassembleur de tous
les musulmans. Ce sont les ottoman
de 1280 à 1924 qui réussirent à éta­
blir un empire bien structuré sur le
plan politique et militaire et qui eu
une influence réelle sur l’ensemble
du monde musulman. Ceux qui esti­

14

ment que le califat s’est poursuivi
avec les souverains des dynasties qui
se sont succédés situent sà chute en
la1924 avec celle de l’empire ottoman
et l’avènement de la Turquie
Moderne. .

Evolution

de l’empire ottoman
L’empire ottoman est fondé au XIX'
siècle par les osmanlis (descendants
de Uthman), une tribu d’origine Seljukide. A son apogée sous le règne
de Souleymane le magnifique (le
plus célèbre souverain turc), l’em­
pire englobait le Sud de l’Europe,
l’Egypte, la Syrie, la Palestine et la
péninsule arabique avec une auto­
rité sur les deux lieux saints (Mec­
que et Médine). Les ottomans ont eu
le mérite d’établir un commande­
ment musulman avec une puissance
politico-militaire sur trois conti­
nents. Ils réussirent à réunir sous la
même autorité des peuples de races,
de religions et de cultures différen­
tes. C’est le dernier bastion de l’is­
lam politique d’obédience sunnite.
La tolérance religieuse était de mise
au sein de l’empire.

Au XIX' siècle, l’empire devient
l’objet de convoitise de puissances
européennes motivées par des ambi­
tions territoriales ainsi que des senti­
ments de jalousie à l’égard de l’is­
lam. Le complot juif entre encore en
jeu avec la bénédiction des puissan­
ces occidentales. Dès 1880, l’idée
d’un foyer national juif va accentuer
la pression étrangère sur l’empire. A
partir de 1908, les juifs s’installent
en Palestine (province de l’empire
ottoman). Les puissances occiden­
tales vont utiliser les conflits armés,
les révoltes des arabes, des armé­
niens et des nationalistes turcs
contre le pouvoir musulman. C’est
cette pression qui va désagréger

à la Turquie moderne et supprimer le
califat

Les divergences
d’opinions
Des tendances idéologiques naqui­
rent à la faveur des circonstances au
sein de l’empire et dans le monde
musulman. Les débats portent essen­
tiellement sur le lien entre le pouvoir

politique et religieux. De nombreux
intellectuels dont Qacem Amin,
Mansou Fahm et Taha Hussein
défendent une modernisation selon
le modèle occidental. Ils prônent une
séparation entre pouvoir d’Etat et
pouvoir religieux. vCes intellectuels
et savants bénéficient d'une
audience trèsfavorable en Europe et
aux USA ; ils utilisent les mêmes
catégories rationnelles, la même ter­
minologie, le même rapport aux
sciences et à la rigueur déductive».
(Tariq Ramadan, Aux sources du
renouveau islamique). Ce sont les
partisans d’un réformisme islamique
libéral.

Face à ce courant, il y a les réformis­
tes qui prônent un retour aux sources
de l’islam. Ils cherchent à construire
un Etat islamique face aux muta­
tions du monde et à la diversité
des contextes. Ils rejettent l’enfer­
mement sectariste (Taqlid). Ils sont
perçus comme des intégristes aux
yeux des occidentaux car ils
condamnent fermement l’influence
occidentale. Ces penseurs défendent
l’unité des musulmans autour des
valeurs essentielles. Parmi eux il y a
Djamal Din Al Afghani, Muham­
mad Abdou et Hassane Al Banna
pour ne citer que ceux là. Leurs
écrits sont très peu traduits en fran­
çais et en anglais. Ces divergences
ont lieu dans un contexte politique
très tendu au sein de l’empire tant il
est investi par les puissances euro­
péennes.

Macédoine et s’étend à Istanbul. Le

2 août 1914, l’empire ottoman
signe une alliance avec l’Allema­
gne contre les puissances en vue de

retrouver ses territoires perdus.
Avant même la fin de la guerre, la
triple alliance organise un partage

de l’empire ottoman qui a été défait
avec l’Allemagne.

La France comptait recevoir le lit­

toral syrien, la Cilicie et une zone
d’influence couvrant tout le reste

de la Syrie et le nord de l’Iran.
Quant à l’Angleterre, elle misait

sur les ports de Haifa, de Acre,
toute la Mésopotamie méridionale
(de la Palestine à l’Iran), l’Italie,
l’Anatolie occidentale. Trois pro­

vinces reviennent à la Russie

jusqu’au Tigre.
Aux arabes on promet l’indépen­
dance, aux juifs un foyer national

dont l’écho se fera plus retentis­
sant, aux grecs on promet la grande

Grèce. Même si ce plan n’a pas été

exécuté à la lettre, c’est à peu près
le partage du gâteau ottoman.

Face aux troubles, Moustapha
Kemal est envoyé par le vizir pour
calmer les masses mécontentes. Ce

dernier fait volte face et prend le

devant des mouvements révolu­
tionnaires. 11 prend le pouvoir, dis­

La désintégration

sout les institutions de l’empire et

de l’empire

crée un Etat laïc. Il convoque un
congrès national le 22 juin 1919.

Le recul ottoman en Europe débute
le 26 janvier 1889 au traité de Karlowitz où ils perdent une partie de
leurs possessions territoriales.
C’est l’aboutissement de l’in­
fluence d’une coalition réunissant
l’Autriche, la Russie, Venise et la
Papauté entre 1783 et 1784. Sur le
plan économique, les influences se
font plus tenaces. La France et
l’Angleterre sont présentes dans
l’empire et cherchent à obtenir des
capitulations avantageuses.

Sur le plan ethnico-religieux, la
tolérance religieuse basée sur
l’ijma de l’école hannafite est mise
à mal.

Le 29 octobre 1923 la république

de Turquie est proclamée. Un an
plus tard le califat est aboli.

Les coalitions juives, occidentales
et arabes (sous la houlette de Ché-

rif Housseyn) viennent de l’empor­
ter sur le pouvoir musulman.
Depuis,

les

musulmans

n’ont

connu de pouvoir central. La
nécessité ou non de sa restitution
reste un débat très actuel.

z^Kadré SAWADOGO

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

Le jeu international
BILAN DE LA LUTTE CONTRE LE
TERRORISME INTERNATIONAL

La montagne a accouché
d’une souris
ussama Ben Laden,
comme cela est de cou­
tume depuis six ans, a
encore fait parler de lui à
veille du 11 septembre. De
façon laconique, il nargue ses
ennemis à travers des messa­
ges de provocation et de mise
en garde. Pourtant donné pour
mort, le chef d’Al Qaïda
continue de jouer les premiers
rôles dans ce feuilleton qu’il
anime en tandem avec la puis­
sante Amérique. Six ans donc
après les attaques du 11 Sep­
tembre et le début de la guerre
contre le terrorisme, on est
toujours à se poser certaines
questions existentielles : cette
guerre était-elle opportune ?
Qui est terroriste ? Quelle
méthode de lutte sied à cette
guerre insolite et dévastatrice ?
A qui profite cette violence
tous azimuts ? Même sans y
répondre, on reconnaît aisé­
ment que loin d’avoir été éradi­
qué, le terrorisme international
ne cesse de progresser. Pire, la
guerre engagée n’a fait qu’exa­
cerber le phénomène, qui est
aujourd’hui plus répandu et
plus visible qu’à la veille du 11
Septembre. La confrontation
s’étend désormais, géographi­
quement et s’approfondit sur le
plan doctrinal.

O

Lutter contre

la violence par
la violence
Les actions menées dans le
cadre de la lutte contre le ter­
rorisme ont davantage un
caractère contraignant et vio­
lent qu’elles ne sont promptes

à susciter des solutions pacifi­
ques. Au contraire, il est
connu que la violence engen­
la la violence. Le monde est
dre
donc entré dans un cercle
vicieux entretenu par des
acteurs qui semblent profiter à
tout point de vue de cette
instabilité mondiale. Ainsi,
l’infructuosité de la lutte
contre le terrorisme est due en
partie aux méthodes utilisées à
cet effet. En effet, ahurie par la
violence du choc subi le 11
Septembre 2001 et aveuglée
par une perception idéologi­
que du conflit, l’Amérique n’a
pas su adapter sa réplique et
s’est enlisée dans des guerres
dont elle n’a pas évalué les
difficultés. Malgré la coopéra­
tion qui s’intensifie dans la
lutte le bilan reste dans l’en­
semble plutôt mitigé.

Deux modes essentiels sont pri­
vilégiés. Les pressions morales
et la violence physique. Les
pressions morales viennent de
loin dans cette opération de tra­
que contre les terroristes. Elles
incluent aussi la propagande
contre l’adversaire que l’instru­
mentalisation. Ainsi, comme on
peut le constater l’Irak est
depuis son occupation par les
Américains présentée comme
n’étant plus un pays terroriste,
une zone apaisée. Pourtant...
Ces pressions morales ont for­
tement été accompagnées par
les médias et des intellectuels
néo conservateurs d’Occident
qui attendaient depuis long­
temps d’en découdre avec
l’Orient musulman. Et il est
évident qu’ils ont réussi en par­
tie au regard de la diabolisation

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

dont est victime la umma isla­
mique.
Quant aux pressions physiques,
elles sc manifestent par la
déstabilisation d’Etats accusés
de soutenir le terrorisme et par
les violences physiques exer­
cées sur des individus à travers
le monde. Ainsi, le leitmotiv
semble être le suivant : il faut
combattre les terroristes où
qu’ils soient et ne leurs laisser
aucun répit. Cette forme (privi­
légiée) a fait de nombreuses
victimes innocentes sous le
silence de la communauté inter­
nationale. Aujourd’hui la triste­
ment célèbre prison de Guanta­
namo apparaît comme un véri­
table recule du droit humani­
taire et la tâche noire du monde
dit civilisé. En outre, les camps
de torture de la CIA repartis
dans plusieurs régions du
monde viennent assombrir
davantage le tableau peu relui­
sant de la situation des droits de
l’homme.

Comme, il peut être aisé de
s’en apercevoir, ces stratégies
excluent la dimension priori­
taire que pourrait être une
approche pacifique. Car quand
bien même les dirigeants
emblématiques d’Al-Qaida et
autres mouvements armés
viendraient à disparaître,
parions que les actes de vio­
lence ne cesseront pas pour
autant. Le bilan de la lutte
contre le terrorisme est donc
loin de rassurer. Qui aurait cru
que la traque des maîtres du
terrorisme serait aussi longue
et infructueuse, en dépit des
quelque 600 milliards de dol­
lars engagés par les seuls Etats-

Unis ; que, six ans après la
défaite des talibans et la des­
truction de leur sanctuaire,
Kaboul serait à peine sécurisée
et que ces guerriers retrouve­
raient leur influence ?
Cette mouvance terroriste a
fait des incursions violentes
dans de nouvelles contrées, de
l’Asie à l’Europe en passant
par le Moyen-Orient..., et a
consolidé ses sanctuaires
anciens ou nouveaux que sont
le Pakistan, l’Afghanistan,
l’Algérie et l’Irak.
Le Moyen-Orient continue
d’être la région névralgique
dans la lutte mondiale contre le
terrorisme. De nombreux atten­
tats ont été commis. La guerre
en Irak a surtout révélé au
grand jour l’ampleur de la
défaite américaine, dont l’onde
de choc risque de déstabiliser
toute la région et de menacer la
sécurité des approvisionne­
ments pétroliers, donc l’écono­
mie mondiale.
L’Afrique du Nord est la zone
la plus sensible au terrorisme
en Afrique notamment en
Egypte, au Maroc et en Algérie.
Le réseau Al-Qaïda sévit aussi
en Afrique de l’Est, en particu­
lier en Somalie. Au Sahel, la
Mauritanie, le Mali, le Niger et
le Tchad consacrent plus de res­
sources à l’amélioration de
leurs moyens de lutte contre le
terrorisme. En somme, le terro­
risme ne connaît pas de fron­
tière d’autant plus le terme luimême reste des plus ambigu.
Aujourd’hui celui qui veut tuer
son chien, pardon son ennemi,
l’accuse de terrorisme.

Dans ce contexte le phéno­
mène ne peut que grandir et
devenir plus complexe. Selon
les propres termes du Départe­
ment d’Etat américain, «la
lutte contre le terrorisme
demeure dantesque». En effet,
le massacre de centaines d’in­
nocents à l’école de Beslae,
Suite page 16

15

Brèves
Soungalo Ouattara :
«La renaissance de l’Afrique passe par la
décentralisation du pouvoir»
chronique de la conquête des
près L'élu et la commune et
libertés publiques dans l’espace
Ma commune, le ministre
délégué chargé des Collectivitéset le temps
■ locales du Burkina Faso depuis
Pour l’auteur, la renaissance afri­
t janvier 2006, Soungalo Ouattara,
caine passe par «une décentrali­
vient de publier à Paris, aux édi­
sation du pouvoir et l’émergence
ctions Karthala Gouvernance et
de pouvoirs locaux assurés par
' libertés locales, pour une renais­
des hommes pétris d’idées et
sance dé l’Afrique, un livre qui
ouverts au,changement qualita­
Explore la longue histoire de la
tif».
'citoyenneté depuis la nuit des
temps, jusqu’à l’époque contemEn rappel M. Soungalo Ouattara,
■poraîne.
a été entre autre secrétaire général
du ministère de l’Administration
Par 'son approche pluridiscipli­
territoriale et de la sécurité, secré­
naire, le livre peut se lire comme
taire permanent de la Commis­
- une histoire des institutions polision nationale de décentralisation
’..tiques aussi bien en Afrique
et par ailleurs chargé de cours de
qu’en Occident, une analyse juri­
Libertés publiques à l’Ecole
dique des rapports complexes,
nationale d’administration et de
parfois mouvementés entre gou­
magistrature.
vernants et gouvernés ou une

A

Rice pour des “négociations sérieuses”
sur un Etat palestinien, probablement en
novembre
a secrétaire d’État améri­
caine Condoleezza Rice a
préconisé en fin septembre
■ dernier à Ramallah, des “négo­
ciations sérieuses” sur un Etat
palestinien à l’occasion d’une
réunion internationale sur le
Proche-Orient que Washington
entend organiser en novembre.

L

“Nous voulons une réunion qui
fasse avancer la cause de l’Etat
palestinien”, a déclaré Mme
Rice lors d’une conférence de
presse à l’issue d’un entretien

“J’ai discuté avec Mme Rice de
plusieurs questions, en tête des­
quelles les processus de paix et
la bonne préparation nécessaire
pour assurer la réussite de la
réunion internationale qui
devrait se tenir à la mi-novem­
bre”, a-t-il dit.

Tél. 50 37 94 30
Cell. 70 75 54 85
Email ; prcuve2007@yahoo.fr
Directeur de Publication
Mikaïlou Kéré

Mise en page et Impression
Altesse Burkina 50 39 93 10

16

“Il faut faire avancer le proces­
sus, parvenir à un document
jetant les bases de sérieuses
négociations en vue de la créa­
tion d’un Etat palestinien le plus
rapidement possible”, a pour­
suivi Mme Rice.

'La réunion internationale, dont
la date exacte n’a pas été annon­
cée par Washington, devrait se
tenir à la mi-novembre, a pour sa
part affirmé M. Abbas.

Récépissé de déclaration
N°I862//CA-GI/OUA/PF
du 27 juillet 2007

Nombre de tirage
1000 exemplaires

avec le président palestinien
Mahmoud Abbas.
“Le président des Etats-Unis
n’a pas l’intention d’inviter la
communauté internationale à
une réunion qui ne serait pas
substantielle”, a-t-elle ajouté.

>
,

Une question à Rico et Abbas :
à quand la fin de l’hypocrisie
vis-à-vis du peuple palestinien
et du monde ?

dans un train de Madrid, sur un
ferry des Philippines prouvent
que la lutte contre le terrorisme
est loin d’être achevée.

Le retour
des croisades

des Etats-Unis de mettre un
terme au terrorisme mondial
en privilégiant davantage la
stratégie militaire. Or, la stra­
tégie militaire est assez infruc­
tueuse car le terroriste est un
acteur invisible à l’abri des
F. 16, des B.52 et de tout autre
arsenal militaire. Le combat
contre le terrorisme doit inté­
grer une approche moins
contraignante pour qu’elle soit
porteuse d’espoirs et de succès
à portée considérable.

Les musulmans ont été les
plus grandes victimes de cette
lutte aveugle contre le terro­
risme. Très vite on est passé
du concept de terrorisme inter­
national à terrorisme isla­
miste. Ces nombreuses atta­
ques contre les musulmans à
«Le temorisme, disait Jacques
travers le monde rappellent à
CHIRAC, est comme la mala­
bien des égards la période
sombre des croisades. Le pré­
ria, on ne la combat pas en
sident américain au lendemain
tuant les moustiques mais en
des attaques du 11 septembre
asséchant les marécages, c’estn’a pas hésité à parler de croi­
à-dire en recherchant les causes
sades en parlant de sa lutte
profondes». S’il est vrai qu’au­
contre le terrorisme justement,
cune cause ni aucun effet ne
avant de s’en excuser. Un lap­
peut justifier le terrorisme, il est
sus qui en dit long. C’est à
aussi vrai qu’au lieu de cher­
croire que les ennemis de l’is­
cher à bombarder pour bombar­
lam attendaient que se produi­
der, il faudrait comprendre les
sent ces attentats pour définiti­
motivations des terroristes.
vement engager une lutte hai­
Savoir déjà distinguer le terro­
neuse contre les musulmans et
riste du non terroriste. Une
leurs symboles.
diplomatie informelle de lutte
Cette thématique fait désormais
contre le terrorisme pourrait
les choux gras d’une presse
avoir des résultats bien meil­
partisane et résolument décidée
leurs
qu’une guerre ouverte
à en finir avec ce monstre. Elle
contre le terrorisme.
raffole de réflexions menées à
dessein pour nuire : “Quels sont
Dans les conflits en cours entre
les liens entre terrorisme et isla­
la communauté internationale
misme, entre islamisme et
et
les groupes terroristes, l’in­
Islam ?”, “L’Islam est-il com­
stabilité y est prévisible pour
patible avec la démocratie ?”
encore au moins deux décen­
Elle est soutenue en cela par
nies, sinon davantage. Com­
des intellectuels tout aussi per­
ment est-il en effet possible
nicieux que ces joumaleux. On
présente l’islam comme est un
d’affronter un ennemi qui a
mouvement mondial dont l’am­
rarement une adresse connue.
bition est de convertir tous les
La victoire dans la bataille des
habitants de la planète. Tout de
idées reste l’incontoumable clé
même restons sain.
de voûte d’une issue positive à
ces conflits. Sinon les gros
Des lendemains
moyens ne continueront qu’à
incertains
produire des résultats.. .minces.
Le rapport annuel de 2004 sur
le terrorisme dans le monde
traduit une fois encore le désir
/^H.B

La Preuve n° 00 - Octobre 2007

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