Caricatures sur le prophète Mahomet : les musulmans du Burkina protestent

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Title
Caricatures sur le prophète Mahomet : les musulmans du Burkina protestent
Creator
Alain Dabilougou
Publisher
Le Pays
Date
9 February 2006
Abstract
En signe de protestation contre les caricatures du prophète Mahomet dans la presse danoise, une délégation de la fédération des musulmans du Burkina Faso, forte de 5 personnes et conduite par El Hadj Souleymane Compaoré, a remis le 8 février 2006 une lettre à Thomsen Margit, ambassadeur du Royaume du Danemark au Burkina.
Rights
In Copyright - Educational Use Permitted
Language
Français
Contributor
Frédérick Madore
content
En signe de protestation contre les caricatures du prophète Mahomet dans la presse danoise, une délégation de la fédération des musulmans du Burkina Faso, forte de 5 personnes et conduite par El Hadj Souleymane Compaoré, a remis le 8 février 2006 une lettre à Thomsen Margit, ambassadeur du Royaume du Danemark au Burkina.

Dans ce message, les adeptes de l'Islam du Pays des hommes intègres fustigent le comportement, au début de l'affaire, du gouvernement du pays de la reine Margrethe II, et l'invitent à "civiliser la liberté d'expression qui y est en vigueur".

"Nous avons été mandatés par l'ensemble des associations islamiques du Burkina pour adresser une correspondance à destination de votre gouvernement pour dire tout notre mécontentement dans cette caricature blasphématoire à l'endroit du prophète Mohammed (...). Au nom de tous les responsables des associations islamiques, en particulier au nom du président El Hadj Oumarou Kanazoé, je vous remets solennellement notre lettre de protestation". C'est en ces termes que El Hadj Souleymane Compaoré, 2e vice-président de la communauté musulmane, a introduit la remise de la lettre de protestation de la fédération des musulmans à l'ambassadeur du Royaume du Danemark au Burkina.

L'atmosphère n'était pas tendue comme on pouvait s'y attendre, mais les traits des visages de l'hôte et de ses "invités" illustraient l'importance et le caractère sensible de l' affaire.

Le message remis, quant à lui, dans un ton diplomatique mais dur, dénonce cet acte et appelle le gouvernement du Royaume du Danemark à se ressaisir : "Nous, musulmans du Burkina Faso, à l'instar de nos centaines de millions de frères et soeurs du monde entier, sommes choqués, indignés par la publication par un journal danois d'une douzaine de caricatures prenant pour cible le messager de Dieu, la personne du prophète Mohammed (Paix et salut sur lui)".

"Le gouvernement danois s'est abrité derrière la liberté d'expression"

Dans cette correspondance, les musulmans du Burkina font savoir qu'ils sont choqués par l'acte et ce, pour plusieurs raisons. La première, c'est qu'un concours a été lancé pour engager des caricaturistes afin de produire les oeuvres les plus choquantes, les plus fallacieuses et les plus irréverencieuses sur la personne du prophète. Il ne s'agit donc pas d'une erreur portant sur une oeuvre, mais d'une action de dénigrement froidement planifiée et exécutée". La seconde raison, elle, est liée au fait que "cette opération méthodique de sabotage ne prétend même pas ignorer l'interdiction faite de représenter le messager de Dieu, puisque le dessein était de le vilipender et, à travers lui, les milliards d'hommes et de femmes qui se reconnaissent en lui (...)". La communauté musulmane du Burkina y déplore le fait que le gouvernement danois, après qu'il a été alerté par les diplomates des pays arabes, se soit "abrité derrière un prétendu respect des libertés d'expression pour se taire sur cette agression". Cela a dénoté, selon elle, d'un mépris pour l'Islam.

Aussi les musulmans du Burkina ont-ils appelé le Danemark à oeuvrer davantage à "civiliser la liberté d'expression" qui y est en vigueur "pour la rendre plus respectueuse d'autrui et de ses convictions, surtout quand cet autrui représente plus du tiers de l'humanité".

La remise de la lettre de prostestation a fait suite à un huis clos entre l'ambassadeur Thomsen Margit et la délégation musulmane, composée de Souleymane Compaoré, 2e vice-président de la communauté musulmane du Burkina, Issiaka Semdé de l'association des jeunes musulmans, Aboubacar Yugo de l'Ittihad Islami, et Cheick Omar Boni, secrétaire chargé de la communication de la Fédération des associations musulmanes du Burkina.

Dans la même lancée, l'ambassadeur du Danemark a fait une déclaration à la presse. Elle a reconnu le tort causé aux musulmans et a déclaré que le gouvernement de son pays a été affecté par la situation. Selon elle, cette crise est due au fait que la liberté d'expression est une des composantes fondamentales de la Constitution danoise. Tout en félicitant la communauté musulmane du Burkina pour la méthode de protestation choisie, elle a affirmé que le moment est venu de faire baisser la tension.

Légendes:

1- Souleymane Compaoré , 2e vice-président de la communauté musulmane, remettant la lettre de protestation à l'ambassadeur Thomsen Margit (Ph. A. Ouédraogo)

2- La délégation musulmane s'est exprimée sur la question en dehors de l'ambassade du Royaume de Danemark au Burkina (Ph. A. Ouédraogo)

ENCADRE

PROPOS DE...

El Hadj Souleymane Compaoré (chef de la délégation musulmane)

"Nous sommes venus exprimer notre colère et notre indignation"

Nous sommes venus exprimer la réprobation, la colère et l'indignation des musulmans en charge de l'ambassadeur pour transmettre cela à son gouvernement afin que son pays sache que les musulmans du Burkina sont unanimes avec leurs frères d'Afrique et du reste du monde pour dénoncer ce qui s'est passé et qui a pris source au Danemark (...).

Nous sommes libres d'organiser nos manifestations comme nous le pensons. Les marches, c'est pour signifier le mécontentement des musulmans. Cela ne date pas d'aujourd'hui. Si c'est pour signifier cela, il y a même eu mort d'hommes à l'occasion de certaines marches. Le gouvernement danois a certainement vu certaines de ces marches. Nous pensons que nous pouvons faire l'économie d'une marche et être tout aussi efficace dans nos réprobations. C'est pourquoi les responsables de la communauté des musulmans ont voulu une protestion écrite transmise main à main à l'ambassadeur du Danemark.

Thomsen Margit (ambassadeur du Royaume du Danemark au Burkina)

"Il est temps qu'on pense à apaiser la situation"

Nous avons apprécié leur forme de protestation et leur point de vue. Il faut savoir que le gouvernement danois respecte l'Islam comme toutes les autres religions officielles du monde. Le gouvernement du Danemark condamne toute expression ou action visant à stigmatiser un groupe de personnes sur la base de son appartenance. Le mardi dernier, notre gouvernement a accordé une interview à la chaîne arabe Al Arabia. Il y a souligné qu'il était profondément affecté par le fait que beaucoup de musulmans aient perçu ces dessins comme une diffamation. Il a demandé de ne plus représenter ce genre d'images d'une manière susceptible de blesser les sentiments d'autrui.

Malheureusement, la désinformation et les malentendus de part et d'autre ont alimenté les forces qui visent à promouvoir les confrontations. Je profite de l'occasion pour dire que le Coran n'a pas été brûlé au Danemark. Cela a été formellement condamné par le gouvernement et cela sera considéré comme un acte criminel.

Il faut dire que le quotidien Jyllands-Posten est un journal libre et indépendant qui n'a aucune relation avec le gouvernement. Le gouvernement danois ne peut exercer aucune pression sur ce qui est publié ou non dans les médias sur l'ensemble du territoire. La liberté d'expression est un des élements fondamentaux de la société danoise. C'est aussi un des principes fondamentaux de la Constitution. J'ajoute que le quotidien Jyllands-Posten a compris le sérieux de la situation et s'est excusé sans équivoque. Des représentations diplomatiques de notre pays ont été brûlées à l'extérieur... et je crois qu'il est temps qu'on pense à apaiser la situation. Il est de notre responsabilité à nous tous d'éviter que la situation s'aggrave. Nous avons apprécié la démarche des musulmans du Burkina.
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