Triandé Toumani : "Les médersas ne dispensent pas un enseignement au rabais"

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Title
Triandé Toumani : "Les médersas ne dispensent pas un enseignement au rabais"
Publisher
Le Pays
Date
7 January 1993
Abstract
Problème des medersas au Burkina ; le Président de la Communauté musulmane apporte des informations, pour éclairer l'opinion publique.
Spatial Coverage
Ouahigouya
Rights
In Copyright - Educational Use Permitted
Language
Français
Source
Archives Le Pays
Contributor
Frédérick Madore
content
Problème des medersas au Burkina ; le Président de la Communauté musulmane apporte des informations, pour éclairer l'opinion publique.

"Le Pays " : M. Le Président, les medersas ont été restituées à la communauté musulmane. Quel est votre sentiment à ce propos ?

Triandé Toumani : Merci bien, j'apprécie beaucoup votre démarche ; en ce sens que c'est un sujet qui nous préoccupe tous, je veux dire, la communauté musulmane, les parents d'élèves et tous ceux qui ont suivi le problème. Le sentiment que j'exprime ici, n'est pas seulement personnel, mais également collectif ; c'est le sentiment de tous les responsables de la Communauté, des parents d'élèves : c'est un immense sentiment de satisfaction parce que justice a été faite.

"Le Pays" : Que pouvez-vous dire au sujet du statut des medersas ?

Triandé Toumani : Les statuts des medersas sont toujours en étude ; vous avez dû suivre le colloque sur l'Enseignement privé qui s'est tenu dernièrement à Ouahigouya. Il y a eu pas mal de recommandations que nous devons mettre en application. Nous sommes également sur le point d'organiser des journées d'étude qui vont se tenir probablement dans la troisième semaine de Janvier et je crois que le problème y sera évoqué. De toute façon, les statuts des medersas ne peuvent que s'inscrire dans le cadre de l'Enseignement privé, cadre établi par les autorités du pays.

"Le Pays" : Comment a-t-on résolu les problèmes des medersas à ce jour?

Triandé Toumani : Résoudre les problèmes ? il n'y avait pratiquement pas de problème à résoudre ! Il fallait tout simplement remettre les medersas à qui de droit ! II y a eu beaucoup de dégâts certainement, car nous avons été môme obligés de fermer certaines medersas comme celle de Gounghin qui comptait neuf classes ; les niveaux primaires et secondaires de la medersa centrale vivotent. Celles de Zogona et de Tanghin vivotent également et il faut mettre de l'ordre dans tout ça. Il y a eu beaucoup de dégâts tant au niveau de l'enseignement qu'à celui du personnel, et cela nous a conduit à des compressions de personnel car nous n'avons plus beaucoup d'élèves : sur 3.000 élèves que comptait l'ensemble des medersas, il ne nous reste guère que 500 ou 600, même pas un millier ; cette compression de personnel suscite des remous actuellement, mais on y trouvera également une solution.

"Le Pays" : Qu'est-ce qui a été fait d'une part, pour uniformiser les programmes d'enseignement, et d'autre part, pour adapter leur contenu pédagogique aux réalités de notre pays ?

Triandé Toumani: (Rires) Vous posez là, une question très pertinente. En ce qui concerne l'uniformisation des programmes, un travail avait déjà été fait, il y a 4 ou 5 ans, peut-être même au début de la révolution. Les documents avaient déjà été élaborés en arabe et il restait à les traduire en français étant donné que parmi les responsables de l'éducation (inspecteurs et autres) il n'y a aucun arabophone. Seulement, entre-temps, Il y a eu cette cassure entre ceux qui nous avait retiré nos medersas, et nous. Voilà ce qui nous avait contraint à arrêter le travail. Depuis le colloque sur l'enseignement privé, nous avons des vues plus claires et nous allons certainement mettre à profit les grandes vacances à venir et à la rentrée prochaine, s'il devait se trouver que nous n'avons pas abattu tout le travail, au moins quelque chose aura été fait.

"Le Pays" : Quelles perspectives y a-t-il pour les élèves formés dans ces établissements, notamment en ce qui concerne l'emploi ?

Triandé Toumani : Ces élèves ne sont pas différents des autres élèves (je veux parler des élèves des écoles publiques, des écoles privées, notamment catholiques, protestantes, etc.). Je veux dire que sur le plan de l'emploi, nul ne peut se targuer de n'avoir pas de difficulté, dans aucun pays ; même aux Etats Unis et en France, le problème du chômage se pose ; du reste, l'école n'est pas là pour former des employés, il y a des écoles spéciales pour former des travailleurs. La medersa dispense un enseignement général. La spécificité est que l'enseignement a lieu en français et en arabe et elle n'en a pas d'autres. Les élèves qui sortent de ces medersas ont donc les mêmes chances que les autres élèves du Burkina, de trouver de l'emploi. Ils ont même plus de chance puisque dans les pays arabes, ils peuvent être embauchés.

Nous avons donc beaucoup d'espoirs quant à l'avenir des élèves sortant des medersas, l'enseignement n'y est pas un enseignement au rabais comme tentent de le faire croire certains : nous avons en ce moment à la medersa centrale, des professeurs égyptiens, burkinabè très compétents. Il suffit qu'on se réorganise pour que les choses aillent bien. Je vous remercie.

Interview réalisée par : Rouamba Ahl-Assane
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