Le Ramadan : aussi un problème économique
Contenu
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Titre
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Le Ramadan : aussi un problème économique
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Date
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3 janvier 1970
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Résumé
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Comme toutes les religions l'Islam connaît un certain nombre de grandes fêtes. Parmi celles-ci la plus suivie, si ce n'est la plus importante est la fête du Ramadan. Ce carême — qui dure relativement longtemps — a pour objet de renforcer la domination de l'esprit sur le corps, une discipline, un moyen de purification des pensées et du comportement de la personne.
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Droits
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contenu
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Comme toutes les religions l'Islam connaît un certain nombre de grandes fêtes. Parmi celles-ci la plus suivie, si ce n'est la plus importante est la fête du Ramadan. Ce carême — qui dure relativement longtemps — a pour objet de renforcer la domination de l'esprit sur le corps, une discipline, un moyen de purification des pensées et du comportement de la personne.
Mais au delà du but religieux apparaît un but social. Le jeûne du Ramadan tend à être un ferment de solidarité pour les populations arabes. Il semble jusqu'ici que la pratique du Ramadan soit extrêmement bénéfique. Il ne faut cependant pas perdre de vue le revers de la médaille. Car revers il y a du fait que bien souvent la portée et la signification même de cette fête islamique échappent à ceux qui la pratiquent. Et, par conséquent, n'en comprenant plus le sens, ils le déforment et l'adaptent tant, que toutes ses qualités inhérentes disparaissent.
Du fait qu'ils jeûnent pendant la journée, les gens s'offrent de larges compensations sur tous les plans, le soir et la nuit. Les plaisirs de la table tout d'abord. Pendant ce mois de fête religieuse, il est maintenant entré dans les habitudes que l'on dépense plus pour la nourriture : douceurs, plats compliqués et délicats. Au lieu de jeûner véritablement — notamment pour faire preuve de solidarité avec les pauvres — c'est une période de bombance.
Quant à ce que l'on appelle les longues « nuits du Ramadan », elles sont occupées la plupart du temps, outre les collations, par les exhibitions d'innombrables chanteurs et chanteuses qui font leurs numéros pendant de longues heures sous les yeux de spectateurs pâmés. Cette vie bruyante, accompagnée des radios et des télévisions marchant à plein régime, dure jusque tard dans la nuit. Il devient alors difficile de dormir à cause du bruit incessant et le travail s'en trouve, par conséquent, considérablement ralenti pendant le jour. Les gens qui jeûnent puis qui veillent en mangeant bien n'ont ni le goût ni les moyens de maintenir leur rythme de travail. Sous ce prétexte, ils deviennent maussades voir hargneux et il n'est pas rare que des altercations éclatent pour des futilités. Plus personne ne pense à son travail, mais tous songent au moment où, fuyant leur lieu d'activité ils pourront aller se délecter.
Le mois du ramadan est ainsi trop souvent devenu une période néfaste sur le plan économique pour nombre de nations rattachées à l'Islam. Chaque année, un mois sur douze, la productivité est entravée. Si l'on ajoute encore à cela les congés payés annuels, les jours fériés et chômés officiels, la lenteur engendrée par le climat, on voit que cet état de chose n'est pas propice à une production équilibrée ni à un relèvement du nifeau économique des populations arabes. La bataille que livrent les gouvernements pour lutter contre le sous-développement risque d'être entravée par ces pratiques. Et le Président Bourguiba l'avait déjà relevé il y a quelques années déjà, démontrant l'incompatibilité d'une politique économique moderne avec le maintien d'une tradition devenue plutôt une habitude qui n'a même plus le mérite d'être une ascèse consciente mais qui au contraire pousse la population à faire des dépenses excessives en même temps qu'il les incite à mal et peu travailler.
Notre propos n'est pas de critiquer la fête du Ramadan, mais de souligner que suite aux déformations que cette fête a subies un problème social et économique en découle et joue un rôle de frein dans des efforts que tentent tous les pays arabes pour élever leur niveau de vie économique. Certains chefs d'Etat en ont pris conscience mais comme partout dans le monde, c'est dans le domaine religieux qu'il est le plus difficile d'introduire des réformes.