Noël 2011 à Dori : chrétiens et musulmans attendent à l'unisson "le petit jésus"

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Titre
Noël 2011 à Dori : chrétiens et musulmans attendent à l'unisson "le petit jésus"
Créateur
Nombamba Didier Ouédraogo
Editeur
Sidwaya
Date
22 décembre 2011
Résumé
La naissance du Christ, les fidèles chrétiens de Dori attendent cet heureux évènement à grand renfort de préparation spirituelle. Ainsi, même sans une effervescence perceptible comme on le voit ailleurs, la fête de noël sera célébrée encore une fois, dans une bonne ambiance de cohabitation religieuse.
Couverture spatiale
Dori
Koudougou
Droits
In Copyright - Educational Use Permitted
Langue
Français
Contributeur
Frédérick Madore
contenu
La naissance du Christ, les fidèles chrétiens de Dori attendent cet heureux évènement à grand renfort de préparation spirituelle. Ainsi, même sans une effervescence perceptible comme on le voit ailleurs, la fête de noël sera célébrée encore une fois, dans une bonne ambiance de cohabitation religieuse.

Dori, la sablonneuse, semble préoccupée par le froid qui la tenaille par ces temps de basses températures. Ainsi, les remue-ménages observés à l'approche de Noël dans la capitale burkinabè et dans d'autres villes n'y sont pas perceptibles. En effet, la capitale du Sahel semble vaquer à ses occupations habituelles, sans se soucier de la venue de Jésus. Cet état de fait, le jeune curé et vicaire général d'alors de la paroisse de Dori, (il secondait Monseigneur Joachim Ouédraogo affecté à Koudougou) l'abbé Stanislas Balo, ne le nie pas mais rétorque, tout sourire, que la préparation de Noël est avant tout spirituelle : « dire qu'on ne sent pas la ferveur religieuse, c'est un peu trop car la religion, ce n'est seulement pas les signes extérieurs mais ce que nous ressentons, vivons et ce que nous voulons exprimer ». Ainsi, de l'avis de M. l'abbé qui exerce son ministère depuis quatre années à Dori, l'avant-Noël dans la localité ne suscite pas une effervescence comme on le voit dans d'autres villes.

Toute chose qui n'entache en rien la spiritualité de l'évènement. Pour preuve, la paroisse organise à chaque temps de l'Avent, des séances de retraites et de prières pour ses fidèles. « Le dimanche dernier (NDLR : le 19 décembre 2011), nos séances ont concerné les enfants mais ce vendredi, nous allons organiser ce qu'on appelle une grande célébration pénitentielle », explique le serviteur de Dieu. Ce culte, poursuit-il, permet aux fidèles de se réconcilier avec eux-mêmes, les autres et avec Dieu. « Entrez dans cette préparation pénitentielle, par la confession des pêchés, par la demande de pardon est la meilleure manière de fêter Noël que les décorations, les guirlandes et tout le tapage que l'on voit autour de l'évènement », professe le clerc. Le président du Conseil régional des Assemblées de Dieu (AD), le pasteur Moumouni Kanazoé exerce son ministère depuis 1992. Guidant les pas d'une communauté religieuse avoisinant 5000 fidèles, le pasteur Kanazoé reconnaît, lui aussi, que le plus important pour un chrétien à cette fête de naissance du Christ, c'est la préparation spirituelle. « C'est la condition pour bien accueillir le nouveau-né », lance le pasteur. Car, ajoute t-il, cette fête est l'occasion pour chaque chrétien de faire un bilan de sa vie à savoir le passé, le présent et envisager le futur au plan spirituel et social pour pouvoir aller de l'avant. Déjà, les jeunes fidèles de son église s'activent dans les répétitions afin de jouer leur partition à la célébration de ce grand événement qu'est Noël. « Toutes nos églises présentes dans les différentes localités de la région se préparent à travers des chants, théâtres et ballets pour que les veillées du 24 décembre soit au rendez-vous », renchérit le président du Conseil régional des AD.

Implantée en 1970 dans la région du Sahel, à en croire notre interlocuteur, l'église des Assemblées de Dieu intervient aussi dans le social, l'éducation...En témoigne, la construction d'une école évangélique appelée « Daar Allah » (regarde Dieu en langue fulfuldé ), il y a quelques années. Situé à un jet de pierres du domicile du pasteur, l'établissement accueille des élèves de tout bord religieux. Y dispense-t-on des enseignements religieux ? Le pasteur Moumouni Kanazoé est on ne peut plus clair : « le Burkina Faso est un pays laïc, donc nous nous focalisons uniquement sur les enseignements classiques. Notre objectif est surtout de dispenser des cours de qualité ». Sur le site de l'établissement, les élèves curieux et surtout fascinés par l'appareil du photographe, s'agglutine autour de nous. Se prêtant à nos questions concernant la construction des crèches, la majorité des intervenants reconnaissent n'en avoir pas encore construites mais pensent pouvoir en ériger d'ici le jour « J ». Donnant son avis au sujet de la rareté des crèches devant les cours, le curé de la paroisse, Stanislas Balo, fait remarquer que la situation est liée au nombre minoritaire des catholiques.

« Avec une représentativité de 0,7% c'est sûr qu'on ne saurait trouver une crèche devant chaque cour mais je me dis que d'ici à Noël, on pourra compter au moins 50 crèches », affirme tout confiant le curé. Et de poursuivre : « l'année dernière, nous avons fait l'expérience et nous avons failli ne pas donner des prix à tous ceux qui ont participé au concours de crèches. Cette année encore, les enfants sont en train de s'inscrire à la compétition et c'est le samedi qu'on fera le tour pour les noter ». Ainsi, Noël chez les catholiques est aussi un moment de baptême pour les nouveau-nés. Pour cette fête, la paroisse ne s'attend pas à baptiser un grand nombre de bébés. L'abbé Balo avance que la paroisse de Dori a célébré son jubilé d'or le 4 décembre dernier et à l'occasion beaucoup d'enfants ont eu leur baptême. « Le responsable chargé des baptêmes m'a fait cas de 5 inscrits seulement pour Noël et cela ne me surprend guère », précise t-il.

La fête de Noël est évoquée dans le Coran

Située à une centaine de mètres de l'église catholique, l'école de la sagesse du docteur Ly, fonctionnelle depuis 2004, accueille des croyants de tout bord. « Ma particularité d'avoir mis en oeuvre une école de la sagesse, une valeur qui est le fondement de toute religion fait que je suis fréquentable à plus d'un titre par tout le monde », justifie le maître des lieux, enturbanné comme à ses habitudes. Donnant sa petite idée sur la fête de la Nativité, le docteur Ly pense qu'elle doit être un moment de méditation et de tolérance pas seulement pour les fidèles chrétiens mais pour tout le monde. Car, de son avis, cela ne peut que contribuer à renforcer cette cohabitation religieuse qui règne dans la localité. Une cohabitation qui se matérialise par des actes forts sur le terrain souvent par l'entremise de l'Union fraternelle des Croyants (UFC), une ONG interconfessionnelle. A en croire le chargé de communication de l'UFC, Mathieu Soubeiga, lors des cérémonies chrétiennes, la communauté musulmane s'est toujours manifestée. « A la veille de Pâques, les jeunes musulmans sont allés laver la cathédrale de Dori. Auparavant (le 2 février 2011), les jeunes chrétiens s'étaient organisés pour le nettoyage de la grande mosquée et ses alentours. Ce sont des actes d'envergure qui prouvent qu'il y a la bonne ambiance religieuse », serine Mathieu Soubeiga. Ainsi, selon lui, les deux communautés religieuses (chrétiens et musulmans) travaillent à maintenir cette atmosphère. Hama Moussa Cissé, la soixantaine bien révolue, l'air taciturne, est le 12e grand imam de Dori.

Pour lui, ce climat religieux fort enviable est un héritage qui se perpétue de génération en génération. Et quand on lui demande si la fête de Noël lui dit quelque chose, il répond sans détours : « la naissance du prophète Issa (NDLR : Jésus) est mentionnée dans le coran. Si la fête est chrétienne, elle concerne aussi les musulmans car ma communauté ne saurait rester indifférente le jour de la cérémonie au regard des rapports que nous entretenons ». Le grand imam explique qu'il enverra à coup sûr une délégation pour souhaiter une bonne fête de Noël aux responsables de la communauté catholique et protestante. Chose remarquable à saluer lors de ces manifestations religieuses, ajoute l'imam Cissé, c'est l'esprit de communion à travers le partage d'un repas communautaire réunissant les fidèles de toutes les confessions religieuses. Appréciant cette ambiance fraternelle, le curé de Dori, Stanislas Balo explique que dans les différentes paroisses du diocèse, il a été mis en place un comité paroissial de dialogue interreligieux. « Cette structure est chargée d'entretenir les relations avec la communauté musulmane de la localité. Aussi, les moments de peine et de joie sont-ils partagés ensemble par les deux bords », fait-il savoir. En cinquante années de présence dans le Sahel, l'église a su pénétrer le coeur de milliers d'âmes mais jusque-là, comme le reconnaît l'abbé Stanislas Balo, aucun Peulh ne fait partie de ses brebis. « Dans notre communauté catholique, on compte la présence de Rimaïbés, Gourmantchés, Mossis...mais pas de Peulhs à ma connaissance », conclut le prêtre.
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