Rapport général : Forum national sur la laïcité au Burkina Faso

Contenu

Classe de ressource
Text
Titre
Rapport général : Forum national sur la laïcité au Burkina Faso
Créateur
Ministère chargé des relations avec le parlement et des réformes politiques
Date
1 octobre 2012
Résumé
Du 27 au 29 septembre 2012, a eu lieu dans la salle des banquets de Ouaga 2000, le Forum national sur la laïcité organisé par le Ministère chargé des Relations avec le Parlement et des Réformes Politiques (MRPRP). Placé sous le haut Patronage de Son Excellence Monsieur le Premier Ministre Luc Adolphe TIAO, le Forum national sur la laïcité avait pour objectif général de consolider les acquis du Burkina Faso en matière de laïcité, facteur de paix et de cohésion sociale, conformément aux propositions de réformes consensuelles issues des Assises nationales sur les réformes politiques tenues à Ouagadougou du 07 au 09 décembre 2011.
Droits
In Copyright - Educational Use Permitted
Langue
Français
Contributeur
Frédérick Madore
contenu
MINISTERE CHARGE DES
RELATIONS AVEC LE
PARLEMENT ET DES
REFORMES POLITIQUES
-----------

BURKINA FASO
Unité – Progrès –
Justice

FORUM NATIONAL SUR LA LAICITE AU BURKINA FASO
Ouagadougou, Salle des Banquets de Ouaga 2000,
les 27, 28 et 29 septembre 2012

Rapport général

Octobre 2012

1

INTRODUCTION
Du 27 au 29 septembre 2012, a eu lieu dans la salle des banquets de Ouaga 2000,
le Forum national sur la laïcité organisé par le Ministère chargé des Relations avec
le Parlement et des Réformes Politiques (MRPRP). Placé sous le haut Patronage de
Son Excellence Monsieur le Premier Ministre Luc Adolphe TIAO, le Forum national
sur la laïcité avait pour objectif général de consolider les acquis du Burkina Faso
en matière de laïcité, facteur de paix et de cohésion sociale, conformément aux
propositions de réformes consensuelles issues des Assises nationales sur les
réformes politiques tenues à Ouagadougou du 07 au 09 décembre 2011. De façon
spécifique les objectifs du Forum national sur la laïcité étaient de :
-

formuler une compréhension partagée du concept de la laïcité à partir d’un
échange entre les composantes de la vie nationale ;

-

identifier et analyser les pratiques favorables et les pratiques qui, à terme,
pourraient menacer l’ordre public et toucher aux droits et libertés dans un
Etat laïc, afin de proposer les recommandations à même de préserver la
laïcité comme facteur de paix et de renforcement de la cohésion sociale dans
notre pays et ;

-

proposer les mesures à prendre pour la mise en œuvre et le suivi des
recommandations issues du forum.

Le Forum national sur la laïcité a enregistré la participation de cent vingt et sept
(127) délégués représentants :
-

les communautés religieuses ;

-

les autorités coutumières et traditionnelles ;

-

les organisations de la société civile ;

-

les ordres professionnels ;

-

les partis et formations politiques ;

-

les institutions et structures publiques ;

-

les collectivités territoriales et ;
2

-

des personnes ressources.

Le présent rapport général s’articule autour des points suivants :
-

l’ouverture des travaux ;

-

les communications (la communication introductive du MATDS et les exposés
des différentes communautés religieuses et des autorités coutumières et
traditionnelles) ;

-

les échanges (administration et laïcité, pratiques religieuses et laïcité ;
citoyens, espaces publics et laïcité) ;

-

les recommandations et ;

-

les annexes.

I- DE L’OUVERTURE DES TRAVAUX
La cérémonie d’ouverture a été marquée par trois (03) allocutions, dont le premier
a été le mot de bienvenue du Maire de la Commune de Ouagadougou lu par
Monsieur Jean Christophe ILBOUDO, 1er adjoint au Maire. Il a été suivi par
l’allocution du Ministre d’Etat, Ministre chargé des relations avec le Parlement et
des Réformes Politiques et s’est terminé par le discours d’ouverture de Son
Excellence Monsieur Luc Adolphe TIAO, Premier Ministre.
Le 1er adjoint au Maire de la Commune de Ouagadougou a exprimé la fierté de sa
Commune d’accueillir le Forum national sur la laïcité. Ensuite, il a salué
l’organisation du Forum en soulignant la pertinence du sujet et la clairvoyance
3

politique du Gouvernement, compte tenu du contexte très particulier marqué par
une exacerbation des revendications identitaires et communautaires.
Dans son allocution, Monsieur Arsène Bongnessan YE, Ministre d’Etat, Ministre
chargé des relations avec le Parlement et des Réformes politiques, a précisé que
l’organisation du Forum est une recommandation des Assises nationales sur les
réformes politiques tenues du 07 au 09 décembre 2011. Il a également exprimé
avec force que si « jusque-là, nous pouvons nous réjouir de ce que la laïcité telle
que définie soit une réalité vécue au quotidien dans notre pays », il convient, au
regard de l’actualité mondiale marquée par le terrorisme et les violences politicoreligieuses de tout genre, de « ne pas laisser entrer le fantôme dans la maison,
avant de chercher à fermer les portes », comme nous l’enseigne un proverbe
moaga. C’est pourquoi, a-t-il ajouté « au terme du forum, des recommandations et
des propositions de mise en œuvre devront permettre au gouvernement de
prendre les mesures idoines à même de toujours protéger notre pays et ses
institutions contre d’éventuelles dérives dans la pratique de la spiritualité ».
Dans son discours d’ouverture, Son Excellence Monsieur Luc Adolphe TIAO,
Premier Ministre, a souligné que la ferveur religieuse dans notre pays est la source
des bénédictions divines dont nous jouissons. Il a relevé que la laïcité, option de
notre pays et de notre peuple, traduit un idéal partagé par tous : celui de vivre
ensemble, dans la cohésion, la paix, l’harmonie et la sécurité. Pour le premier
ministre, la laïcité telle que pratiquée au Burkina Faso constitue un ciment pour
notre pays qui compte environ 30% de chrétiens, 60% de musulmans et 10% de
praticiens des religions traditionnelles.
C’est pourquoi, l’Etat s’engage à travers la gestion des affaires publiques, à assurer
en toute circonstance le droit de chacun à la liberté d’aller et de venir, de culte et
de religion. A cet effet, il a affirmé que l’Etat se soumettra à l’exigence d’une
neutralité en ayant un comportement rigoureusement identique envers tous les
citoyens.
Dans cette perspective, il a appréhendé le Forum sur la laïcité comme le cadre
idéal pour réfléchir ensemble sur les voies et moyens afin de consolider le principe
4

de la laïcité de l’Etat en veillant sur le respect de la séparation entre l’exercice de
la liberté religieuse et des actes de l’Etat ou de ses services publics.
Après la cérémonie d’ouverture, les participants ont adopté un règlement intérieur
portant définition du Forum et détermination du mode d’organisation et des règles
de conduite des débats. Ce règlement intérieur précisait que les débats seront
conduits par un modérateur placé sous la supervision du Ministre d’Etat, Ministre
chargé des relations avec le parlement et des réformes politiques, Président du
Forum.
Il y a lieu de souligner que le Forum a apporté un amendement à la composition
du bureau par l’ajout de deux rapporteurs généraux adjoints.
Le Forum a également retenu le consensus comme mode d’adoption des
recommandations.
Par ailleurs, les participants ont mis en place le Bureau qui se compose comme suit :


un Président, Monsieur Bongnessan Arsène YE, Ministre d’Etat, Ministre
chargé des Relations avec le Parlement et des Réformes politiques ;



un

Vice-président,

Monsieur

Jérôme

BOUGOUMA,

Ministre

de

l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité ;


un Rapporteur général, Monsieur Amadou TRAORE, issu des représentants
de l’administration ;



des Rapporteurs généraux adjoints :
-

Monsieur

Abdoulaye

OUEDRAOGO issu de la Communauté

islamique ;
-

Monsieur Ignace SANWIDI issu de la Communauté catholique ;

-

Monsieur

Emmanuel

KALKOUMDO

issu

de

la

Communauté

protestante ;
-

Monsieur Justin COMPAORE issu des Autorités coutumières et
traditionnelles.

II- DES COMMUNICATIONS
II.1- La communication introductive
5

Dans son introduction le Docteur Jérôme BOUGOUMA, Ministre de
l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité, Ministre en
charge des cultes, Vice-président du Forum a souligné l’absence d’une
définition légale de la laïcité au Burkina Faso.
Toutefois, il a relevé qu’on pouvait trouver un début de définition dans l’avis
juridique n° 2004-012/CC du Conseil Constitutionnel en date du 9 juillet 2004.
Par ailleurs, il a noté que sur le plan juridique, la notion de laïcité doit être
conforme à la conception d’un espace public affranchi des immixtions des
religions en tant que pouvoir. Elle interdit de ce fait l’intervention de la religion
dans le processus de décision politique et dans le fonctionnement de
l’administration. Cette approche présente trois (3) dimensions essentielles :
-

la neutralité religieuse des pouvoirs publics ;

-

le principe de non-discrimination et ;

-

l’aménagement de garanties d’utilisation des droits par l’obligation
faite à la puissance publique de garantir la liberté d’exercice des
cultes.

Puis il a traité le sujet en trois points :
-

d’abord, il a montré que la laïcité est « une » dans son principe. Il a démontré
pour cela que la laïcité a été conçue historiquement comme la séparation des
Eglises de l’Etat, pour être actuellement perçue comme la neutralité
idéologique de l’Etat.

-

ensuite, il a indiqué que la laïcité est « plurielle » dans son vécu. A cet effet,
il a mis en relief les pratiques de la laïcité dans le monde et la pratique de la
laïcité au Burkina Faso.
En appui il a cité les exemples suivants : aux Etats Unis d’Amérique, il est
inscrit sur les billets de banque « In God we trust » c'est-à-dire « en Dieu nous
croyons », au Bénin le Président doit jurer sur Dieu et les mânes des ancêtres
et au Niger le Président doit jurer sur le Livre-Saint de sa confession.

6

-

enfin, il s’est appesanti sur la démocratie comme cadre d’épanouissement de
la laïcité. Pour conclure, il a suggéré de s’inscrire dans la logique « d’une
laïcité ouverte et intelligente qui nous permette de gérer au sein de notre pays
la richesse de nos différences, une vraie laïcité de cohabitation respectueuse
de l’esprit républicain et de l’Etat de droit ».
II.2- Les exposés des communautés religieuses et de la chefferie
coutumière et traditionnelle
II.2.1. Exposé de la Communauté islamique

El Hadj Souleymane COMPAORE, secrétaire général de la fédération des
associations islamiques du Burkina (FAIB) intervenant au nom de la Communauté
islamique, a indiqué que la laïcité, telle que pratiquée au Burkina Faso, peut être
cernée par la réponse à un ensemble de huit (8) questionnements.
Il est ressorti de ces questionnements qu’il n’existe pas de définition officielle de
la laïcité au Burkina Faso mais que les fondements de celle-ci sont constamment
enracinés dans les Constitutions de notre pays depuis 1960. Dans la Constitution
de la IVème République, ce principe est précisé à l’article 31.
En substance la laïcité reconnait la liberté de croyance, proscrit le sectarisme,
cultive la tolérance entre citoyens, ensemble de valeurs partagées par les religions
révélées.
Après avoir répondu à ces questions, il a souligné que c’est avec un effort conjugué
de l’Etat et de tous ses partenaires que nous parviendrons à construire une société
où cohabitent pacifiquement les différents corps sociaux. Il a fait observer que la
laïcité ne saurait se concevoir au Burkina Faso comme en France.
II.2.2. Exposé de la Communauté catholique
Dans son introduction, Monseigneur Séraphin François ROUAMBA, Archevêque de
Koupela, Président de la Conférence Episcopale Burkina-Niger a dit que la laïcité
est inscrite dans la Constitution du Burkina Faso et que l’approche de la
Communauté catholique de la laïcité est fondée sur les valeurs évangéliques, sur
l’enseignement multiséculaire et le magistère, ainsi que sur l’expérience
historique du rapport entre l’Etat et l’Eglise. Il a souligné que la compréhension de
l’Eglise catholique sur le principe de la laïcité protège la liberté d’opinion, de
conscience, de religion et de croyance, dans le respect et la dignité de chaque
personne et de chaque communauté. La laïcité exige, pour son effectivité,
l’existence de lois justes qui assurent et protègent efficacement les libertés citées.

7

Il a noté cependant, comme le représentant de la Communauté islamique, la
nécessité de dialogue entre d’une part, l’Etat et les religions et d’autre part, entre
les religions elles-mêmes pour que le principe de la laïcité soit efficacement
appliqué.
II.2.3. Exposé de la Communauté protestante
Monsieur Mathias NIAMBEKOUDOUGOU, représentant de la Communauté
protestante a indiqué que la laïcité à la sauce burkinabè est celle de la forte
prégnance du fait religieux dans le vécu quotidien et où il est surtout attendu de
l’Etat la reconnaissance et la protection de la liberté de conscience ou de religion,
la reconnaissance de la liberté de culte ou de l’expression publique de sa foi
religieuse.
A cet effet, il a souligné qu’il appartient aux autorités compétentes de faire
l’inventaire des écarts jugés dangereux pour le maintien du contexte social et de
leur apporter les réponses adéquates au plan législatif et sécuritaire.
Ainsi il a mentionné la présence du mouvement Ansar dine au Burkina Faso et
l’introduction d’une matière religieuse dans des examens pour l’obtention de
diplômes d’Etat.
Il a par ailleurs relevé que lors des Assises nationales sur les réformes politiques,
la Communauté islamique aurait fait des propositions qui tendraient à remettre en
cause le principe de la laïcité. Il a cité notamment la proposition relative à la
création d’un ministère en charge de l’islam.
Comme les représentants des précédentes communautés, il a noté la nécessité
d’un dialogue entre les sensibilités religieuses et entre l’Etat et celles-ci.
II.2.4. Exposé de la Chefferie coutumière et traditionnelle
Le porte-parole de la Chefferie coutumière et traditionnelle, Monsieur Soumaïla
SANOU a déclaré que la chefferie coutumière et traditionnelle a facilité
l’introduction des religions révélées au Burkina Faso et continue de soutenir
certaines de ses pratiques actuelles, dans le sens de la cohésion sociale.
C’est pourquoi elle exhorte l’ensemble de la communauté religieuse à éviter les
heurts parfois engendrés par l’incompréhension.

III-

DES ECHANGES

A la suite des différentes communications, les échanges ont porté sur les trois (3)
axes tirés du canevas des échanges et proposés par le Président du Forum, à
8

savoir : Administration et laïcité ; pratiques religieuses et laïcité ; citoyens, espaces
publics et laïcité.
Les préoccupations ont porté entre autres sur les points suivants :
-

le respect des spécificités des différentes confessions religieuses ;

- le maintien de la trilogie « musulmans, catholiques et protestants » ou la
distinction « musulmans et chrétiens » ;
- le respect de l’équité entre le christianisme et l’islam dans la représentation
égale des religions aux différentes structures et entités créées par l’Etat
(CENI, CES, et autres cadres) ;
-

le respect de l’égalité et de la neutralité de l’Etat à l’égard des différentes
confessions, ce qui d’ailleurs a été réaffirmé par le Ministre en charge des
libertés publiques ;

-

la reconnaissance de toutes les composantes sociales par l’Etat ;

-

la nécessité de contextualiser la mise en œuvre du principe de la laïcité en
recherchant une laïcité positive ;

-

le problème du temps d’antenne accordé aux différentes confessions
religieuses dans les médias pendant les fêtes ;

-

le problème du contenu de certains prêches tendant à la stigmatisation ;

-

la question de l’arbre de noël et des effigies du Père Noël dans les média et
sur les bâtiments publics ;

-

la question de la création d’un observatoire national de laïcité ;

-

l’intégration dans l’administration publique des diplômés des Universités
arabes ;

-

la réintroduction de la langue arabe dans le programme d’enseignement du
système éducatif ;

-

la vulgarisation de la Constitution par des canaux adaptés afin de sortir les
citoyens de l’ignorance de la laïcité ;

-

le renforcement de l’autorité de l’Etat pour garantir le respect du principe
de la laïcité.

Les échanges ont permis de répondre à certaines préoccupations. Ainsi :
-

sur la question de l’administration d’épreuves religieuses dans les écoles
franco-arabes, le représentant du Ministère en charge de l’enseignement de
base a précisé qu’en réalité les diplômes délivrés ne sont pas des diplômes
d’état et que des réflexions sont menées pour trouver des solutions ;
9

-

sur l’implication de l’administration dans l’organisation du hadj, le Ministre
en charge des cultes a souligné que l’intervention de l’Etat s’explique d’une
part, par le fait que l’Arabie Saoudite ne traite qu’avec les Etats en la matière
et d’autre part, par la nécessité de garantir la sécurité d’environ 3000
pèlerins burkinabè concernés ;

-

enfin, s’agissant de la question du ministère en charge de l’islam, il est
ressorti des explications que la Communauté islamique n’a jamais soumis de
proposition de création d’un Ministère dans ce sens, pour la simple raison
qu’un tel Ministère existe déjà, à savoir le MATDS qui a en charge tous les
cultes.

IV-

DES RECOMMANDATIONS

En tout, cinquante-deux (52) propositions de recommandations plus ou moins
élaborées ont été transmises aux rapporteurs.
En raison de l’objet du Forum et de l’esprit des échanges durant les trois (3) jours
de travail, l’équipe de rapportage a résolu de se départir des méthodes habituelles
de présentation des recommandations dans un rapport.
Elle a procédé à la transcription dans le projet de rapport de l’ensemble des
propositions de recommandations.
Elle a ensuite procédé à une sélection des recommandations en tenant compte des
critères suivants:
- de l’adéquation de la proposition avec la laïcité ;
-

de la pertinence de la proposition ;

-

du caractère consensuel de la proposition au regard des 3 confessions
religieuses et de la communauté coutumière et traditionnelle.

Sur l’ensemble des propositions de recommandations, huit (8) ont été retenues par
les participants au Forum comme faisant l’objet de consensus.
IV-1. Les propositions de recommandations
Au cours des échanges, les participants ont émis des idées de recommandations
qui ont fait l’objet de discussions. Ces idées de recommandations portaient sur :

10





la définition d’une laïcité qui serait propre au Burkina Faso, notamment
l’appropriation de la définition donnée par le Ministre de l’administration
territoriale, de la décentralisation et de la sécurité ;
l’adoption d’une loi sur le financement des confessions religieuses afin de
leur permettre d’accompagner l’Etat dans l’éducation civique des citoyens ;



l’aménagement des heures de service le vendredi pour permettre aux
musulmans de répondre aux obligations de leur culte en prenant part à la
grande prière du vendredi (qui ne prend d’ailleurs pas beaucoup de
temps) ;



la création d’un cadre permettant de déterminer la place, les fonctions
possibles et le statut des institutions religieuses et/ou l’adoption d’une
charte des religions au Burkina Faso ;



la réintroduction de l’enseignement de la langue arabe au niveau du
secondaire ;



la correction de la sous-représentation de l’islam dans les instances et
organes créés par l’Etat ;



la création d’un observatoire sur la laïcité pour faire de la veille sur les
atteintes à la laïcité et favoriser le dialogue interreligieux ;



la tenue d’une sensibilisation à la laïcité à la base en prélude à la mise en
place de l’Observatoire national de la laïcité s’il était retenu ;



l’introduction de l’enseignement de
professionnelles : ENEP, ENAM, etc ;



la traduction des actes du Forum dans les langues nationales et en arabe ;



l’application du programme national par les écoles franco-arabes ;



la promotion du dialogue interreligieux avec la participation des confessions
et organisations neutres (qui permet aux fidèles de se connaître, de se
découvrir, se tolérer et s’accepter), plutôt que l’expression « laïcité » qui a
besoin d’être murie pour le moment ;



l’encouragement de l’union ou la réunion des confessions tout en respectant
leurs spécificités ;



l’institution d’un cadre permanent de dialogue inter-religions plutôt qu’un
observatoire de la laïcité ;



la distinction des manifestations culturelles qui sont à promouvoir de celles
relevant purement des pratiques confessionnelles ;



le renforcement du rôle des différentes confessions religieuses et
coutumières dans la gestion des questions dites de sorcellerie ;

la

laïcité

dans

les

écoles

11



la nécessité d’adresser un appel aux représentants des structures neutres à
rester dans la neutralité lors des rencontres de dialogue interreligieux ou
sur la laïcité ;



la limitation dans le temps de toute intervention de l’Etat dans les problèmes
religieux ;



le non recours à une mobilisation des institutions républicaines pour
résoudre des problèmes religieux ;



la nécessité d’éviter toute imprégnation religieuse forte de l’appareil
éducatif ;
la suppression de l’organisation de l’arbre de Noël et les effigies du Père
Noël dans l’Administration Publique au Burkina Faso ;
la non suppression de l’arbre de Noël ;
le respect de l’équité entre le Christianisme et l’Islam dans la représentation
des religions aux différentes structures et entités crées par l’Etat (CENI, CES,
et autre).
le renforcement de l’autorité de l’Etat pour garantir le respect du principe
de la laïcité ;
le renforcement de l’esprit de tolérance dans la pratique de la religion dans
les services publics ;
la dynamisation et le renforcement des moyens de la commission
d’équivalence des diplômes ;
l’établissement de relations de coopération scientifiques et techniques avec
les pays à forte destination d’étudiants burkinabé ;
la création d’un (des) Institut (s) de langue dans les universités du Burkina
Faso ;












l’arrêt des souhaits de joyeux anniversaire à un prénom chrétien à la fin de
la présentation de la météo sur la RTB ;



l’institution du forum tous les deux ans pour créer les conditions de paix
religieuse, renforcer la cohésion sociale et favoriser l’émergence effective
d’un état laïc ;



l’introduction de l’enseignement du principe de laïcité dans les cours
d’éducation civique et de morale, dans les écoles, collèges et lycées,
centres et instituts de formation au Burkina Faso ;



l’enseignement de la Constitution du 02 juin 1991 dans les langues locales et
les autres langues dans notre pays ;



l’affichage du Titre I de la Constitution intitulé « des droits et devoirs du
citoyen burkinabè » dans les écoles, établissements secondaires, universités
et écoles professionnelles de notre pays ;
12



l’instauration d’un dialogue soutenu entre les autorités coutumières et les
autorités religieuses de notre pays ;



la contribution des autorités coutumières et religieuses à l’enseignement et
la pratique de la laïcité de notre pays ;



le développement de moyens inédits par l’Etat pour la connaissance de
notre Constitution, afin d’outiller les citoyens sur la laïcité et corriger les
dysfonctionnements et situations qui ébrèchent la laïcité et empêchent
l’implication de tous les citoyens dans la construction de la démocratie dans
notre pays ;



la lutte contre les appréhensions négatives de la laïcité qui se traduisent par :



-

la mauvaise interprétation ou l’incompréhension du concept de laïcité ;

-

le fanatisme religieux ;

-

le manque d’information et de sensibilisation ;

-

la stigmatisation ;

-

la discrimination.

le développement de toutes les initiatives pour promouvoir la laïcité,
notamment :
- définir le concept de laïcité et le traduire dans toutes les langues
nationales transcrites ;
- produire des fascicules à cet effet ;
- inscrire la laïcité dans les programmes d’enseignement avec le civisme
comme discipline d’accueil ;
- inciter les média, les artistes musiciens et comédiens à promouvoir la
laïcité par leurs activités artistiques (, poème et théâtre) ;
- créer et dynamiser un cadre de dialogue inter religieux et coutumier ;
- maintien de la trilogie « catholiques, protestants et musulmans » ;
- lutter contre la sorcellerie ;



la fonction d’observatoire de la laïcité à confier à l’observatoire chargé de
la prévention et de la gestion des conflits ;



la garantie à chaque citoyen des droits humains en maintenant la liberté
religieuse, la liberté de croyance, de pratiques religieuses, de
manifestations de la foi sans enfreindre les lois, en maintenant l’égalité dans
le traitement des religions ;
13



l’institutionnalisation d’une rencontre de concertation autour de la laïcité, en
vue de sa consolidation ;



l’inscription de l’éducation à une culture de dialogue interethnique et
interreligieuse dans le système éducatif ;



le renforcement de l’éducation civique avec l’enseignement de la laïcité,
des droits de l’homme et l’éducation à la tolérance ;



la conduite d’une étude sur chaque religion afin d’aider chaque burkinabè à
connaître les aspects doctrinaux, rituels et éthiques authentiques de chaque
religion ;



la nécessité d’éviter les propos haineux de même que la constitution de
partis politiques sur une base religieuse ou ethnique ;



la cessation des immixtions du politique dans la désignation des Chefs
traditionnels, provoquant scissions et divisions dans les familles et les
villages ;



l’esprit d’hospitalité mutuelle et quotidienne à cultiver entre les religions qui
sont comme des étrangers les unes par rapport aux autres, à la manière des
coutumiers qui ont accueilli les musulmans, les catholiques et les
protestants ; chaque religion prône l’accueil de l’étranger comme un accueil
de Dieu. Un tel esprit assurera le respect des uns des autres et l’acceptation
de la différence.



le renforcement du dialogue interreligieux par des actions concrètes à
différents niveaux tels que :
-

le dialogue de la vie : vivre ensemble dans les quartiers, les villages,
les services en partageant les joies, les peines, en laissant les enfants
se réjouir ensemble lors des différentes fêtes…, accepter la différence
de foi et la respecter dans les couples mixtes ;

-

le dialogue dans les œuvres en menant ensemble des œuvres de
charité, en participant ensemble aux travaux d’intérêt commun ;

-

le dialogue au niveau doctrinal : apprendre à connaître les aspects
doctrinaux authentiques de l’autre pour éviter les stéréotypes, la
stigmatisation et dépasser les conflits historiques pour retenir ce qui
fait la grandeur d’une religion et non ses contrefaçons (bassesses)
provenant de pratiques de certains de ses membres et;

-

l’organisation du dialogue sur la base de la règle d’or qui dit que : «ce
que tu veux qu’on fasse pour toi, fais-le pour les autres » ;
14



le rôle de consolidation de la laïcité confié aux média par la réalisation
d’activités d’information et de sensibilisation sur les différentes
communautés religieuses du Burkina Faso sans jeter de l’huile sur le feu et
en n’encourageant pas les violences et les outrances.

IV-2. Les recommandations retenues
A l’issue du travail de sélection, les propositions ci-après ont été retenues.

IV.2.1 : Recommandations à l’Administration
Les recommandations formulées à l’adresse de l’Administration sont les
suivantes :
-

-

-

retenir la définition d’une laïcité qui serait propre au Burkina Faso, telle que
le MATDS l’a abordé ;
réintroduire l’enseignement de la langue arabe au niveau du secondaire ;
introduire l’enseignement de la laïcité dans les écoles professionnelles :
ENEP, ENAM, etc ;
traduire les actes du Forum dans les langues nationales ;
appliquer le programme national dans les écoles franco-arabes ;
privilégier le dialogue interreligieux avec la participation des confessions et
organisations neutres (afin de permettre aux différentes confessions de se
connaître, de se découvrir, de se tolérer et de s’accepter), plutôt que
l’expression « laïcité » qui a besoin d’être murie pour le moment ;
maintenir la trilogie « catholiques, protestants musulmans »;
respecter l’équité entre le Christianisme et l’Islam dans la représentation
des Religions aux différentes structures et entités crées par l’Etat (CENI,
CES, et autre) ;
renforcer l’autorité de l’Etat pour garantir le respect du principe de la
laïcité ;
s’approprier la définition de la laïcité donnée par le MATDS ;
renforcer l’esprit de tolérance dans la pratique de la religion dans les
services publics ;
dynamiser et renforcer les moyens de la commission d’équivalence des
Diplômes ;
établir des relations de Coopération Scientifique et Technique avec les pays
à forte destination d’étudiants burkinabé ;
créer un Institut de langue dans les universités du Burkina Faso ;

15

-

Instituer le Forum tous les deux ans en vue de créer les conditions de paix
religieuse, renforcer la cohésion sociale et favoriser l’émergence effective
d’un Etat laïc ;

-

introduire l’enseignement de la laïcité dans les cours d’éducation civique et
de morale, dans les écoles, collèges et lycées, centres et instituts de
formation au Burkina Faso ;

-

enseigner la Constitution du 02 juin 1991 dans les langues locales et les
autres langues de notre pays ;

-

afficher le Titre I de la Constitution intitulé « Des droits et devoirs du citoyen
burkinabè » dans les écoles, établissements secondaires, universités et
écoles professionnelles de notre pays ;

-

recommander à l’Etat de développer des moyens inédits pour la
connaissance de notre Constitution, afin d’outiller les citoyens sur la laïcité
et corriger les dysfonctionnements et situations qui ébrèchent la laïcité et
empêchent l’implication de tous les citoyens dans la construction de la
démocratie dans notre pays ;

-

garantir à chaque citoyen les droits humains en maintenant la liberté
religieuse, la liberté de croyance, de pratiques religieuses, de
manifestations de la foi sans enfreindre les lois, en maintenant l’égalité dans
le traitement des religions ;
inscrire l’éducation à une culture de dialogue interethnique et
interreligieuse dans le système éducatif ;
renforcer l’éducation civique avec l’enseignement de la laïcité, des droits
de l’homme et l’éducation à la tolérance ;
commanditer une étude sur chaque religion afin d’aider chaque burkinabè
à connaître les aspects doctrinaux, rituels et éthiques authentiques de
chaque religion ;
confier aux média le rôle de consolidation de la laïcité par la réalisation
d’activités d’information et de sensibilisation sur les différentes
communautés religieuses du Burkina Faso sans jeter de l’huile sur le feu et
en n’encourageant pas les violences et les outrances.

-

-

IV.2.2 : Recommandations aux communautés religieuses, coutumières et
traditionnelles
Les recommandations à l’adresse des communautés religieuses, coutumières et
traditionnelles sont les suivantes :

16



privilégier le dialogue interreligieux avec la participation des confessions
et organisations neutres (afin de permettre aux différentes confessions de se
connaître, de se découvrir, de se tolérer et de s’accepter), plutôt que
l’expression « laïcité » qui a besoin d’être mûrie pour le moment ;
donner plus de rôle aux différentes confessions religieuses et coutumières
dans la gestion des questions dites de sorcellerie.




faire contribuer les autorités coutumières et religieuses à l’enseignement,
l’éducation et la pratique de la laïcité dans notre pays.



renforcer le dialogue interreligieux par des actions concrètes à différents
niveaux :
dialogue de la vie : vivre ensemble dans les quartiers, les villages, les
services en partageant les joies, les peines, en laissant les enfants se réjouir
ensemble lors des différentes fêtes et accepter la différence de foi et la
respecter dans les couples mixtes ;
dialogue dans les œuvres en menant ensemble des œuvres de charité, en
participant ensemble aux travaux d’intérêt commun ;
dialogue au niveau doctrinal : apprendre à connaître les aspects doctrinaux
authentiques de l’autre pour éviter les stéréotypes, la stigmatisation et
dépasser les conflits historiques. Retenir ce qui fait la grandeur d’une
religion et non ses contrefaçons (bassesses) provenant de pratiques de
certains de ses membres ;
organisation du dialogue sur la base de la règle d’or qui dit que : « ce que tu
veux qu’on fasse pour toi, fais-le pour les autres ».

-

-



instauration d’un dialogue soutenu entre les autorités coutumières,
traditionnelles et religieuses de notre pays.

IV.2.3 : Recommandations générales
Des recommandations d’ordre général ci-après ont été formulées :


combattre les appréhensions négatives de la laïcité qui se traduisent
par :
- la mauvaise interprétation ou l’incompréhension du concept de
laïcité ;
- le fanatisme religieux ;
- le manque d’information et de sensibilisation et ;
- la stigmatisation.


développer toutes les initiatives pour promouvoir la laïcité, notamment :
17

- définir le concept de laïcité et le traduire dans toutes les langues
nationales transcrites ;
- produire des fascicules à cet effet ;
- inscrire la laïcité dans les programmes d’enseignement avec le
civisme comme discipline d’accueil ;
- inciter les médias, les artistes musiciens et comédiens à promouvoir
la laïcité par leurs activités artistiques (poème et théâtre) ;




créer un cadre de dialogue inter religieux et coutumier ou dynamiser un
cadre existant œuvrant dans ce registre ;
lutter contre la sorcellerie ;
cultiver l’esprit d’hospitalité mutuelle et quotidienne entre les religions
qui sont comme des étrangers les unes par rapport aux autres, à la
manière des coutumiers qui ont accueilli les musulmans, les catholiques,
les protestants ; chaque religion prône l’accueil de l’étranger comme un
accueil de Dieu, esprit qui assurera le respect mutuel et l’acceptation de
la différence.

A la cérémonie de clôture du Forum, il a été procédé à la lecture des
recommandations.
.

18

V-

TEXTES DE RECOMMANDATIONS

19

V.1. RECOMMANDATIONS ADRESSEES A L’ADMINISTRATION

Recommandation sur l’institution du Forum national sur la laïcité
Considérant les objectifs poursuivis par le Conseil Consultatif sur les Réformes
Politiques (CCRP) dont la session a eu lieu en juillet 2011 ;
Considérant les Assises nationales sur les réformes politiques de décembre 2011 ;
Considérant la tenue du premier Forum national sur la laïcité et ses
recommandations consensuelles pour créer les conditions de paix religieuse,
renforcer la cohésion sociale et favoriser l’émergence effective d’un état laïc ;
Le Forum national sur la laïcité tenu à Ouagadougou les 27, 28 et 29 septembre
2012 ;
Recommande :
• l’institution du Forum sur la laïcité comme cadre d’évaluation des pratiques
en matière de laïcité dont la périodicité est laissée à l’appréciation de
l’Administration ;
• la création d’un cadre formel de concertation interreligieux décentralisé
appelé à représenter les régions au forum périodique ;
• la participation au Forum des représentants des communautés religieuses et
coutumières, de la société civile, de l’administration publique, de la
communauté scientifique et universitaire et de personnes ressources et
expertes.
Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012
Le Forum
Recommandation sur la diffusion de la connaissance de la laïcité
Considérant la nécessité de diffuser la connaissance de la laïcité au sein de la
frange jeune de notre population ;

Le Forum national sur la laïcité tenu à Ouagadougou les 27, 28 et 29 septembre
2012 ;

20

Recommande :




l’introduction de l’enseignement de la laïcité à travers la Constitution dans
les écoles professionnelles : ENEP, ENAM, etc.
la traduction des actes du Forum dans les langues nationales.
l’application du programme national par les écoles franco-arabes.
Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012

Le Forum

Recommandation relative à l’accusation de sorcellerie
Considérant que le Burkina Faso est un Etat laïc (Article 31).
Considérant que l’article 3 de la Constitution stipule que « nul ne peut être privé de
sa liberté, s’il n’est poursuivi pour les faits prévus et punis par la loi ;
Nul ne peut être arrêté, gardé, déporté ou exilé qu’en vertu de la loi »
Considérant que dans des nombreuses localités du Burkina Faso, des personnes
sont privées de leurs droits, souvent victimes des coups et blessures volontaires et
même chassées de leur domicile ou déportées pour cause de sorcellerie ;

Nous, participants au Forum national sur la laïcité tenu à Ouagadougou les 27, 28 et
29 septembre 2012 ;


condamnons les mesures punitives dont sont victimes les personnes
accusées de sorcellerie ;
21



félicitons les chefs coutumiers et traditionnels pour leur engagement
en faveur de ces victimes ;



exhortons les chefs coutumiers et traditionnels à redoubler d’effort
dans cette lutte.

Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012

Le Forum

Recommandation sur le dialogue inter religieux
Considérant que les communautés religieuses du Burkina Faso jouent un rôle
reconnu et apprécié dans le façonnement de la citoyenneté au Burkina Faso ;
Notant que les communautés religieuses vivent dans leurs sacerdoces la tolérance
et la paix entre les populations ;
Considérant l’apport inestimable de ces communautés dans l’épanouissement de
nos populations ;
Le Forum national sur la laïcité tenu à Ouagadougou les 27, 28 et 29 septembre
2012 ;
Recommande :


la consolidation du dialogue inter religieux entre les communautés
religieuses ;



la consolidation du dialogue entre les communautés religieuses et l’Etat ;



l’implication des citoyens burkinabè au dialogue interreligieux à travers des
actions de citoyenneté ;
Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012
Le Forum
22

Recommandation sur l’enseignement de la Constitution dans les écoles
Considérant que la Constitution du 02 juin 1991 est la Loi fondamentale du Burkina
Faso ;
Notant qu’elle est le socle de notre démocratie et l’expression de notre peuple dans
la construction d’un Etat démocratique, laïc et républicain ;
Considérant que la Constitution du 02 juin 1991 pose les grands principes
fondateurs de l’espérance de notre peuple dont celui de la laïcité ;
Considérant la nécessité pour notre peuple de connaître et de s’approprier les
principes de la Constitution.
Le Forum national sur la laïcité tenu à Ouagadougou les 27, 28 et 29 septembre
2012 ;

Recommande :


l’enseignement de la Constitution du 02 juin 1991 dans les langues locales et
les autres langues dans notre pays.



l’affichage du Titre I de la Constitution intitulé « Des droits et devoirs du
citoyen burkinabè » dans les écoles, établissements secondaires, universités
et écoles professionnelles de notre pays.
Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012
Le Forum

23

Recommandation sur le dialogue entre les communautés religieuses et les
autorités traditionnelles et coutumières
Considérant que les autorités coutumières et religieuses de notre pays sont
complémentaires de façon générale tant dans leur configuration que dans les
objectifs qu’elles poursuivent ;
Notant que de façon séculaire, une convivialité exemplaire a toujours marqué les
rapports entre les entités dans l’Histoire du Burkina Faso ;
Considérant que de façon pratique, autorités coutumières et autorités religieuses
concourent à l’édification de la paix et de l’harmonie entre les différentes franges
des populations ;
Notant que ces autorités préparent les populations dans des domaines citoyens et
civiques ;
Le Forum national sur la laïcité tenu à Ouagadougou les 27, 28 et 29 septembre
2012 ;


recommande l’instauration d’un dialogue soutenu entre les autorités
coutumières et les autorités religieuses de notre pays ;



exhorte les autorités coutumières et religieuses à s’investir dans
l’enseignement, l’éducation et la pratique de la laïcité de notre pays.
Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012
Le Forum

Recommandation sur une vision partagée de la laïcité au Burkina Faso
Considérant que le concept de laïcité est porteur de principe d’égalité, de liberté
entre les citoyens d’un pays ;
Notant que notre monde actuel et particulièrement la région Afrique connait des
conflits provoqués et alimentés par d’autres nations ;
Insistant sur le fait que les Etats et les peuples du monde, les populations africaines,
toutes croyances partagées se sont donné les moyens de nature à aider ces pays
24

en conflit à résoudre ces problèmes qui grèvent le développement et s’opposent à
la construction de la démocratie et du progrès social dans le monde ;
Tirant leçon des Etats d’exception, de la pratique salutaire de la laïcité au niveau
de nombreux pays et de nombreuses institutions du monde ;
Soulignant que le peuple burkinabè s’est doté d’une Constitution le 02 juin 1991 ;
Notant que de nombreuses dispositions de cette Loi fondamentale, notamment les
articles 7, 5 et 31 donnent une définition partagée de la laïcité ;
Le Forum national sur la laïcité, tenu à Ouagadougou les 27, 28 et 29 septembre
2012 ;


se félicite de l’existence des principes de la laïcité dans notre Loi
fondamentale ;



recommande une connaissance approfondie de la notion de laïcité aux
niveaux de ses cadres institutionnels et des citoyens de notre pays ;



souhaite que la Chefferie coutumière et traditionnelle ainsi que les autorités
religieuses contribuent davantage à la connaissance de la laïcité au niveau
de nos populations ;



recommande à l’Etat de développer des moyens inédits pour la
connaissance de notre Constitution, afin d’outiller les citoyens sur la laïcité
et corriger les dysfonctionnements et situations qui ébrèchent la laïcité et
empêchent l’implication de tous les citoyens dans la construction de la
démocratie dans notre pays.

Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012
Le Forum

25

Recommandation sur l’élaboration d’un document référentiel sur la laïcité au
Burkina Faso
Considérant l’importance du concept de la laïcité dans l’équilibre des rapports
sociaux ;
Considérant l’absence de document sur le concept de la laïcité dans notre pays ;
Le Forum national sur la laïcité, tenu à Ouagadougou les 27, 28 et 29 septembre
2012 ;
Recommande :


l’élaboration d’un document référentiel sur la laïcité qui inclue les contours
de la laïcité au Burkina Faso et les valeurs comprises dans la pratique du
concept de la laïcité au Burkina Faso.
Fait à Ouagadougou, le 29 septembre 2012
Le Forum

26

ANNEXES

1. Les termes de références du Forum national sur la laïcité ;
2. Le règlement intérieur du Forum national sur la laïcité ;
3. La composition du bureau du Forum national sur les réformes
politiques ;
4. La liste des participants au Forum national sur la laïcité ;
5. Discours aux cérémonies d’ouverture et de clôture ;
6. La communication introductive des travaux ;
7. Les exposés des communautés coutumières, traditionnelles et
religieuses.

27

ANNEXES 1
LES TERMES DE REFERENCES DU FORUM
NATIONAL SUR LA LAÏCITE

28

MINISTERE CHARGE DES
RELATIONS AVEC LE
PARLEMENT ET DES
REFORMES POLITIQUES
----------CABINET
-------Secrétariat Permanent
des Réformes Politiques

BURKINA FASO
Unité – Progrès –
Justice

TERMES DE REFERENCE
-=-=-=-=-=-=-

DE L’ORGANISATION D’UN FORUM NATIONAL
SUR LA LAICITE AU BURKINA FASO
OUAGADOUGOU, les 27, 28 et 29 Septembre 2012

29

Juillet 2012
I-

CONTEXTE ET JUSTIFICATION

Le Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP) et les Assises nationales
tenus à Ouagadougou respectivement du 23 juin au 14 juillet et du 07 au 09
décembre 2011, ont abouti à l’adoption de réformes politiques consensuelles. La
mise en œuvre de ces réformes politiques a été confiée au Gouvernement à travers
le Ministère chargé des Relations avec le Parlement et des Réformes Politiques. Un
Comité de suivi et d’évaluation de la mise en œuvre, émanant des Assises
nationales, a été mis en place.
Dans ce cadre, le

Ministère chargé des Relations avec le Parlement et des

Réformes Politiques a élaboré un plan d’action adopté par le Gouvernement dans
lequel figure la mise en œuvre de la proposition relative à l’organisation d’un
« débat national sur la laïcité » au Burkina Faso.
C’est pourquoi, le Gouvernement a décidé de l’organisation d’un forum national
sur la laïcité auquel prendront part les différentes composantes de la vie nationale
(communautés musulmane, catholique et protestante ; chefferie coutumière et
traditionnelle ; organisations de la société civile ; administration de l’Etat ;
communauté scientifique).
L’article 31 de la Constitution stipule que le Burkina Faso est un état démocratique,
unitaire et laïc. De ce fait, le forum national devra permettre de réfléchir sur la
compréhension partagée du concept afin de renforcer la pratique de la laïcité
facteur de paix, de cohésion sociale et de démocratie dans notre pays.
II. OBJECTIFS DU FORUM NATIONAL SUR LA LAÏCITE
Le forum national sur la laïcité vise à consolider les acquis du Burkina Faso en
matière de laïcité, facteur de paix et de cohésion sociale, conformément aux
propositions de reformes consensuelles issues des Assises nationales.
De façon spécifique, il s’agit :
1. de formuler une compréhension partagée du concept de la laïcité, à partir
d’un échange entre les composantes de la vie nationale (communautés
30

musulmane,

catholique

et

protestante ;

chefferie

coutumière

et

traditionnelle ; organisations de la société civile ; partis politiques ;
communauté scientifique ; administration) dans un Etat démocratique
comme le Burkina Faso ;
2. d’identifier et d’analyser les pratiques favorables et les pratiques qui, à
terme, pourraient menacer l’ordre public et toucher aux droits et libertés
dans un Etat laïc, afin de proposer les recommandations à même de
préserver la laïcité comme facteur de paix et de renforcement de la cohésion
sociale dans notre pays ;
3. de proposer les mesures à prendre pour la mise en œuvre et le suivi des
recommandations issues du forum.
III.

RESULTATS ATTENDUS

Les résultats attendus du forum national sur la laïcité sont :
1. une compréhension partagée de la laïcité est dégagée des échanges entre
les représentants des différentes composantes de la vie nationale ;
2. des recommandations sont formulées pour lutter contre les mauvaises
pratiques et préserver la laïcité comme facteur de paix et d’une cohésion
sociale renforcée ;
3. des mesures de mise en œuvre et de suivi des recommandations sont
proposées.
IV.

PERIODE, LIEU ET PUBLIC CIBLE
4. 1. Période et lieu

Le forum national sur la laïcité est prévu pour les 27, 28 et 29 Septembre 2012 à
Ouagadougou, dans l’enceinte de la Salle des Banquets de Ouaga 2000.
4.2. Public cible
Le forum national sur la laïcité réunira environ cent vingt (120) participants
représentant les différentes confessions religieuses (musulmane, catholique et
31

protestante) présentes au Burkina Faso, la chefferie coutumière et traditionnelle,
les organisations de la société civile, les partis politiques, la communauté
scientifique et l’administration.
V. METHODOLOGIE DE TRAVAIL
5.1 . Le déroulement des travaux
Les travaux se dérouleront en séances plénières selon les indications suivantes:


1. Le premier jour :
-

présentation d’une communication introductive portant sur « le concept
de la laïcité : philosophie, fondements et analyse des pratiques au
Burkina Faso » ;



2. Le deuxième jour :
-



débats.

suite travaux et rédaction des différentes recommandations.

3. Le troisième jour :
-

synthèse des travaux, adoption du rapport de synthèse et clôture.
5.2. La conduite et l’animation des travaux

Les travaux seront conduits par un bureau composé comme suit:
-

un président

-

un vice-président

-

un rapporteur général

-

un 1er rapporteur général adjoint

-

un 2ème rapporteur général adjoint

La modération des échanges sera assurée par une personnalité désignée en
fonction de ses qualités (pondéré, neutre, impartial et fédérateur) et compétences
(connaissance du sujet et capacité de synthèse).
VI. LA COUVERTURE MEDIATIQUE
32

En vue de donner une visibilité au forum national sur la laïcité, un plan de
communication (avant, pendant et après le forum) sera élaboré et mis en œuvre
avec la collaboration des structures en charge de la communication.
VII.

L’ORGANISATION PRATIQUE

Un comité d’organisation sera mis en place par le ministère chargé des réformes
politiques à l’effet d’assurer les tâches suivantes :
-

contribution à la préparation des documents de travail (exposé
introductif, documents d’information) ;

-

l’information et l’implication des partenaires dans la préparation du
Forum ;

-

la préparation du cadre de déroulement du forum (salle des travaux,
conditions de séjour) ;

-

la mobilisation et la gestion des moyens matériels et financiers ;

-

le suivi et la capitalisation des résultats des travaux.

VIII. LE BUDGET
La prise en charge des dépenses pour la préparation et la tenue du forum sera
assurée par le budget de l’Etat.

33

34

Tableau indicatif de répartition des participants au forum national sur la laïcité au Burkina Faso


Catégorie de structures

Organisations participantes

Effectifs

Total

Fédération des Associations Islamiques du Burkina
Conférence Episcopale Burkina-Niger
Fédération des Eglises et Missions Evangéliques
et Choix tenant compte d’une représentation des régions

20
10
10
13

40

Associations de jeunes
Association des femmes
Associations des personnes âgées
Syndicats
Associations de Presse
Organisations de défense des droits humains
Ordres professionnels nationaux (Santé, Avocats, etc.)
Partis politiques de la majorité
Partis politiques de l’opposition

01
01
01
02
01
01
05
03
03

01

Communautés religieuses

02

Autorités
coutumières
traditionnelles
Organisations de la société civile

03

04

Ordres professionnels

05

Partis et formations politiques

06

Institutions
publiques

08
07

structures Premier Ministère
Médiateur du Faso
Conseil supérieur de la Communication
Conseil économique et social
Ministères (MATDS, DEF, MAE, MJ, MPDHC, MESS, MENA,
MTPEN, MEF, MC, MRPRP, MFPTSS, MRSI, MS, MCT, MJFPE,
MPF, MASSN, MCIA, MEDD)
Présidence du Faso
Corps de police, de gendarmerie, de défense, des douanes,
des eaux et forêts, de sécurité pénitentiaire.
Communauté scientifique
Universités
Ecoles de formations professionnelles (ENAM, ENAREF)
Collectivités Territoriales
Association des Municipalités du Burkina Faso (AMBF)
Association des Régions du Burkina Faso (ARBF)
Personnes ressources
Bureau du Comité de suivi des Reformes Politiques (CCRP)
et

13

07
05
06

01
01
01
01
20
01
06
03
02
02
03
02
07

38

05
14

Experts (Communicateur, modérateur, autres personnes
ressources)
Invités spéciaux
TOTAL GENERAL DES PARTICIPANTS

05
02
128

PROGRAMME DU FORUM NATIONAL SUR LA LAICITE
HORAIRE

ACTIVITES

OBSERVATIONS
Jeudi 27 septembre 2012

7H 00-8H 30

Accueil et installation des participants

9H00-9H45

Cérémonie d’ouverture des travaux :
• Annonce du programme
• Mot de bienvenue du Ministre d’Etat,
Ministre chargé des Relations avec le
Parlement et des Réformes Politiques ;
• Animation;
• Discours d’ouverture de son Excellence
Monsieur le Premier Ministre.
• Suspension (pour le retrait des invités)

9H45-1OH30

Exposé introductif sur le concept de la laïcité :
Philosophie, fondements et analyse des pratiques
au Burkina Faso

10H30-11H00

Pause café

11H00-13H00

Echanges sur le concept de la laïcité

13H00-14H00

Pause déjeuner

14H00-16H00

Echanges sur les pratiques
(identification et analyse)

16H00

de

la

laïcité

Suspension
Vendredi 28 septembre 2012

8H30-10H00

Propositions et mesures à prendre pour une laïcité
facteur de cohésion sociale : recommandations

10H00-10H30

Pause café

10H30-12H00

Propositions et mesures à prendre pour une laïcité
facteur de cohésion sociale (suite)

12H00-14H00

Pause déjeuner/Suspension

Après midi

Rédaction du rapport de synthèse
Samedi 29 septembre 2012

8H30-09H30



Adoption du rapport de synthèse et des
recommandations

09H30-10H00

Pause café

10H00-11H00




Cérémonie de clôture
Cocktail

37

ANNEXES 2

LE REGLEMENT INTERIEUR DU FORUM NATIONAL SUR LA LAÏCITE

MINISTERE CHARGE DES RELATIONS
AVEC LE PARLEMENT ET DES
REFORMES POLITIQUES

BURKINA FASO
Unité- Progrès- Justice

FORUM NATIONAL SUR LA LAICITE AU BURKINA FASO
Ouagadougou, les 27, 28 et 29 septembre 2012,
Salle des Banquets de Ouaga 2000.

38

Règlement intérieur
Article 1: Le forum national sur la laïcité est un cadre d’échange et de partage pour
une compréhension commune du concept de laïcité.
Article 2 :Le forum national sur la laïcité vise à consolider les acquis du Burkina
Faso en matière de laïcité, facteur de paix et de cohésion sociale.
Article 3 : Le forum national sur la laïcité réunit des représentants :
-

des communautés religieuses ;
de la chefferie coutumière et traditionnelle ;
des organisations de la société civile ;
des ordres professionnels ;
des partis et formations politiques ;
des institutions et structures publiques ;
des collectivités territoriales et;
des personnes ressources.

Article 4 : Le forum national sur la laïcité est chargé :
-

de formuler une compréhension partagée du concept de la laïcité ;
d’identifier et d’analyser les pratiques favorables à l’essor de la laïcité
au Burkina Faso ;
d’identifier les pratiques qui pourraient menacer l’ordre public et
toucher aux droits et libertés dans un Etat laïc ;
de proposer les recommandations à même de préserver la laïcité ;
de proposer les mesures à prendre pour la mise en œuvre et le suivi
des recommandations issues du forum.

Article 5 : Les travaux du forum national sur la laïcité sont dirigés par un bureau
composé comme suit :




un président, Monsieur le Ministre d’Etat, Ministre chargé des
Relations avec le Parlement et des Réformes Politiques ;
un vice-président, Monsieur le Ministre de l’Administration
territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité ;
un rapporteur général issu des représentants de l’administration et
quatre (04) rapporteurs généraux adjoints issus des catégories
d’acteurs suivants :
- la communauté islamique ;
- la communauté catholique ;
- la communauté protestante ;
- des autorités coutumières et traditionnelles.

39

A l’exception du président et du vice-président, les autres membres
sont désignés par les participants en leur sein, sur proposition des
représentants des catégories d’acteurs ciblées pour les postes
indiqués.
Article 6 : Le président dirige et coordonne les activités du forum. A cet effet :
-

-

il assure l’observation du présent règlement intérieur et la police
des débats ;
il assure directement l’animation des séances relatives aux
cérémonies d’ouverture et de clôture, à l’adoption du règlement
intérieur et à l’adoption du rapport de synthèse ;
il supervise l’animation des échanges par le modérateur.

Le vice-président l’assiste dans ses attributions et le supplée en cas
d’empêchement.
Article 7 : Les rapporteurs assurent la synthèse journalière des travaux et la
rédaction du rapport général du forum.
Article 8 : La conduite des débats est assurée par un modérateur désigné par le
ministre d’Etat, Ministre chargé des Relations avec le Parlement et des
Réformes Politiques.
Article 9: Le modérateur est chargé :
de diriger les débats lors des séances relatives à la communication
introductive, aux exposés des communautés religieuses et de la
chefferie coutumière et traditionnelle, aux échanges sur l’analyse des
pratiques, aux propositions et mesures à prendre et à la synthèse des
travaux ;
- de donner la parole ;
- de faire la synthèse des points discutés.
Article 10 : Le modérateur donne la parole aux orateurs dans l’ordre dans lequel
ils ont manifesté le désir d’intervenir.
-

Article 11 : Pour la commodité du débat, le modérateur peut limiter le temps de
parole.
Article 12 : Le forum dure trois jours et se déroule en séances plénières.

Article 13 : La présence de tous les membres est obligatoire pendant la durée du
forum.
Article 14: Pendant les séances, les débats doivent être libres, sincères et
mutuellement respectueux.
40

Article 15 : Les participants au forum adoptent à la fin de leurs travaux un rapport
de synthèse assorti de recommandations.
Article 16 :L’équipe technique d’appui aux réformes politiques est chargée
d’assurer aux participants les meilleures conditions de travail
nécessaires au bon déroulement des travaux.
En outre, elle assiste les rapporteurs dans la finalisation du rapport.
Article 17 : Les recommandations sont adoptées par consensus.
Les participants sont solidaires des recommandations des travaux.

41

ANNEXES 3

LA COMPOSITION DU BUREAU DU FORUM NATIONAL SUR LA
LAICITE

42

ANNEXES 4

LA LISTE DES PARTICIPANTS AU FORUM NATIONAL SUR LA
LAÏCITE

43



NOM ET PRENOMS

COMPOSANTE ET
STRUCTURE

I- COMMUNAUTES RELIGIEUSES

A. MUSULMANE
1.

El Hadj COMPAORE Souleymane

2.

Docteur MAÏGA Boubakari

3.

Hadja TRAORE Aïssata

4.

Monsieur BAMBARA Hamadé

5.

Docteur OUEDRAOGO Séni M

6.

Monsieur TIENDREBEOGO Ismaël

7.

Professeur OUEDRAOGO Abdoulaye

Fédération des

8.

Monsieur SAWADOGO Louqman

Associations Islamiques du

9.

Monsieur SAWADOGO Kadré

Burkina (FAIB)

10.

Monsieur SOUMANO Boubacar

11.

Madame OUEDRAOGO Mariam

12.

Madame KONE/DAO Maïmouna

13.

Imam BAGAYOKO Nouhoun

14.

Monsieur SEMDE Issaka

15.

Monsieur DIAKITE Sériba

16.

Monsieur SAWADOGO Moussa

17.

El Hadj SANA Harouna

18.

Docteur GANAME Oumarou

Fédération des

19.

El Hadj YUGO Abboubacar

Associations Islamiques du

20.

El Hadj BANCE Ousmane

Burkina (FAIB)
B. CATHOLIQUE

21.

Monseigneur ROUAMBA Séraphin François

22.

Monseigneur OUEDRAOGO Philippe. N

23.

Monseigneur OUEDRAOGO Joachim

24.

Abbé KAM Sié Mathias

25.

Abbé SANOU Jean-Baptiste

26.

Sœur ZONGO Rachel

Conférence Episcopale

27.

Madame ZONGO/BOGORE Rosine

Burkina Niger

28.

Madame DALA Félicité

29.

Monsieur SANDWIDI Ignace

30.

Monsieur SONGRE Emile
C. PROTESTANTE

31.

Révérend Dr KARAMBIRI Philippe Mamadou

32.

Révérend Pasteur TRAORE Alpha

33.

Révérend Pasteur RAMDE Simon

34.

Révérend Dr KOUMBEM Elie

35.

Révérend Pasteur YANKINE Dramane

Fédération des Eglises et

36.

Révérend Pasteur TRAORE Thomas

Missions Evangéliques

37.

Honorable Député OUEDRAOGO Jacob

38.

Monsieur NIAMBEKOUDOUGOU Matthias

39.

Monsieur KONTOGOMDE Daniel

40.

Professeur KALKOUMDO Emmanuel

(F.E.M.E)

II. AUTORITES COUTUMIERES ET TRADITIONNELLES
41.

Monsieur TANDAMBA B. Tanguilli

Royaume du Gulmu

42.

Monsieur MINOUNGOU D. Moussa

43.

Monsieur OUEDRAOGO Saïdou

Paspanga Naaba (royaume
de Zoungranetenga)
Chef de Naam-Siguiyan

44.

Monsieur COMPAORE Justin

Poé Naaba

45.

Monsieur TIBO Jean-Paul

Nemn-Naaba Ritaama

46.

Monsieur OUEDRAOGO Saïdou

Goundry Naaba

47.

Monsieur SANOU Soumaïla

Chefferie Supérieure de
Bobo

48.

Monsieur KERE Ousmane Oscar

49.

Monsieur YARI Oussé

Chef de canton de Loango
représentant le Dima de
Tenkodogo
Chef de canton de Gaoua

50.

Monsieur HEMA Yoyé

Chef de canton de Banfora

51.

Monsieur DAYO Albert

Chef de canton de
Dédougou

52.

Monsieur DICKO Boubacari

Chef de Djibo

53.

Monsieur YAGUIBOU A. Guy Michel

Chef de canton de Pô

III.

54.

ORGANISATION DE LA SOCIETE CIVILE
A. ASSOCIATION DE JEUNES
Monsieur OUEDRAOGO W. Apollinaire

Conseil National de la
Jeunesse (CNJ)

B. ASSOCIATIONS DES FEMMES
55.

Madame NIGNAN Marie Louise

Coordonatrice de COAFEB

C- ASSOCIATIONS DES PERSONNES AGEES
56.

Monsieur KY Georges Emmanuel

CNPA/BF
D. SYNDICATS

57.

Monsieur OUEDRAOGO Abdoul Kader

FO/UNSL

58.

Monsieur SAWADOGO Mahamady

ONSL

E. ASSOCIATIONS DE PRESSE
59.

Association des
Professionnelles Africaines
de la Communication
(A.P.A.C)
F. ORGANISATIONS DE DEFENSE DES DROITS HUMAINS

Madame NYAMEOGO Dominique Marie M.

60.

Docteur BIDIMA Bangba Pierre
IV.

Mouvement de la Paix
ORDRES PROFESSIONNELS
A. MEDECINS

61.

Professeur TAPSOBA Théophile Lincoln
B. AVOCATS
C. CHIRURGIENS
D. SAGES FEMMES ET MAÏEUTICIENS

62.

Madame THIOMBIANO Brigitte
V.

PARTIS ET FORMATIONS POLITIQUES
A. MAJORITE

63.

Monsieur YODA Bédouma Alain

64.

Monsieur OUEDRAOGO Ousséni

65.

Monsieur OUEDRAOGO Edouard

C.D.P
B. OPPOSITION

66.

Monsieur SERE Adama

R.D.E.BF

67.

Monsieur BALIMA Issa

U.F.C

68.

Monsieur KABORE Maxime

P.I.B

VI.

INSTITUTIONS ET STRUCTURES PUBLIQUES
A. PREMIER MINISTERE

69.

Monsieur ZEMANE Nicolas

A- MEDIATEUR DU FASO
70.

Madame OUEDRAOGO Sylvie
C. CONSEIL SUPERIEUR DE LA COMMUNICATION (C.S.C)

71.

Monsieur TARBAGDO Sita
D. CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL (C.E.S)

72.

Mlle SAWADOGO Haoua
E. MINISTERES

73.

Monsieur MEDA Sanhour A.

MCT

74.

Monsieur BIRBA Wendsongdo Elisée

MASSN

75.

Monsieur DAO Moussa

MESS

76.

Docteur GOUBA Firmin

MDHPC

77.

Monsieur NABOLE Charles Eugène

MICA

78.

Monsieur OUATTARA Youssouf

MEDD

79.

Monsieur OUEDRAOGO Ayassya

MFPTSS

80.

Madame OUEDRAOGO/BAKAYOKO Aminata

MC

81.

Monsieur RAMDE Somlassida

MRPRP

82.

Colonel NAMA Ouimoin

83.

Docteur MILLOGO/SORGHO Marie Claire

84.

Madame SAWADOGO/ILBOUDO Clémence

Ministère de la Défense
Nationale et des Anciens
Combattants
Ministère de la Promotion
de la Femme
Ministère de la Justice

Ministère des Affaires
Etrangères et de la
Coopération Régionales
MRSI (CNRST)

85.

Monsieur TRAORE Amadou

86.

Professeur GUISSOU L. Basile

87.

Monsieur TRAORE Amadou

88.

Monsieur SAWADOGO Adama

89.

Monsieur MILLOGO Bakary

MJFPE

90.

Monsieur KORBEOGO Sibiri

MENA

91.

Monsieur KOHIO T. Mathieu

Ministère de la Santé

92.

Madame OUANGRAWA/KOUPOULI Lucie

MTPEN

93.

Monsieur DAO Moussa

MESS

94.

Monsieur NIGNAN Ibrahim

MEF

MATDS

F. PRESIDENCE DU FASO
G. CORPS HABILLES (POLICE, GENDARMERIE, DEFENSE, DOUANES, EAUX ET FORETS,
SECURITE PENITENTIAIRE)
95.

Monsieur KINDA Paul Joseph

Eaux et Forêts

96.

Monsieur GUIGMA Eloi

97.

Colonel DABRE Hamado

Garde de Sécurité
Pénitentiaire
Défense

98.

Adjudant-chef KONATE Sinaliou

Gendarmerie

99.

Monsieur DABIRE Grégoire

Douane

100.

Monsieur TALL Barké

Police

H. COMMUNAUTE SCIENTIFIQUE
101.

Docteur OUEDRAOGO Adama

INSS

102.

Madame KONKOBO Charlotte

IRSAT

103.

Monsieur ILBOUDO Dieudonné

INERA
I. UNIVERSITES

104.

Monsieur KABRE Jean

105.

KABORE Auguste Ferdinand

Université Ouaga II
Université Ouaga

J. ECOLES DE FORMATIONS PROFESSIONNELLES (ENAM, ENAREF)
106.

Monsieur TRAORE Yacouba

ENAM

107.

Monsieur ZONGO Mohamed

ENAREF

108.
109.
110.

VII. COLLECTIVITES TERRITORIALES
A. ASSOCIATION DES MUNICIPALITES DU BURKINA FASO (A.M.BF)
Maire de la commune de
Monsieur BAGUEMZANRE Thomas
Kindi
Maire de la commune de
Madame BONOU / TIANOU N. Saly Christine

Maire de la commune de
Thyou
Monsieur BELEM P. Harouna
B. ASSOCIATION DES REGIONS DU BURKINA FASO (A.R.BF)

111.

Monsieur OUEDRAOGO A. J. Léopold

112.

Monsieur HIEN Mathias

Président du Conseil
Régional du Centre-Nord
Président du Conseil
Régional du Sud-Ouest

VIII. PERSONNES RESSOURCES
A. BUREAU DU COMITE DE SUIVI
Président

113.

Monsieur YE Bongnessan Arsène

114.

Monsieur DABO Amadou

115.

Madame BELEM Mamounata

2ème Vice-Présidente

116.

Monsieur SOMDA Marc

Rapporteur Général

117.

Monsieur OUEDRAOGO Sébastien

118.

Monsieur OUEDRAOGO Dim-Songdo Bonaventure

2ème Rapporteur Général

119.

Monsieur KIENTEGA Youssouphe

3ème Rapporteur Général

1er Vice-Président

1er Rapporteur Général

B. EXPERTS (Communicateur, Modérateur, autres personnes ressources)
120.

Madame OUEDRAOGO/TRAORE Amina Mousso

121.

Monsieur DIALLO K. Hamidou

122.

Maître OUEDRAOGO Alidou

123.

Monsieur KIEMDE Paul

Ancien Médiateur du Faso
Modérateur
Directeur Général
des Archives Nationales
Avocat
Université Ouaga II

C. INVITES SPECIAUX
Comptable

124.

Monsieur TRAORE Cheick Oumar

125.

Madame MALGOUBRI/KYENDREBEOGO Marie Eugénie

Invité

126.

Monsieur ZOUNDI K. Wilfried

Juriste

127.

Madame YARO Fanta

Ministère de la Promotion
de la Femme

128.

Monsieur LOMPO Christine

Ministère de la Promotion
de la Femme

ANNEXES 5

DISCOURS AUX CEREMONIES D’OUVERTURE ET DE CLOTURE

54

DISCOURS A LA CEREMONIE D’OUVERTURE

DISCOURS A LA CEREMONIE DE CLOTURE

55

PREMIER MINISTERE
----------CABINET
---------

BURKINA FASO
---------Unité-Progrès-Justice

DISCOURS
De Son Excellence Monsieur Luc Adolphe
TIAO, Premier Ministre, Chef du
Gouvernement à la cérémonie de clôture du
forum national sur la laïcité au Burkina Faso

56

Ouagadougou, le 29 septembre 2012
➢ Monsieur le Président de l’Assemblée nationale ;
➢ Mesdames et Messieurs les Présidents d’Institutions ;
➢ Mesdames, Messieurs les Chefs de Mission diplomatique ;
➢ Mesdames,

Messieurs

les

Représentants

des

organisations

internationales et interafricaines ;
➢ Mesdames, Messieurs les Représentants des partis et formations
politiques, et de la société civile ;
➢ Distingués Représentants des autorités coutumières et religieuses ;
➢ Mesdames, Messieurs les participants au forum national sur la laïcité ;
➢ Honorables invités ;
➢ Mesdames et Messieurs.

Vous voici à la fin de vos travaux. Trois jours durant vous avez échangé autour de
la laïcité au Burkina Faso. Vous avez eu des débats passionnants et passionnés, et
même par moment contradictoires. Mais, en définitive vous êtes parvenus à
l’essentiel dans l’intérêt supérieur de notre Nation. Vous avez su sauvegarder ce
qui nous unis malgré nos différences et la diversité de nos croyances religieuses
et spirituelles.
Dans un esprit de cohésion et de préservation de la paix sociale au Burkina vous
avez donc discuté de la laïcité en ses différentes facettes à travers les axes
suivants :
-

Administration et laïcité ;
Pratiques religieuses et laïcité ;
57

-

Citoyen, espaces, services publics et laïcité.

Mesdames et Messieurs
De la substance de vos riches échanges, il ressort entre autres préoccupations :
-

le respect des spécificités des différentes confessions ;
la nécessité de contextualiser la mise en œuvre du principe de la laïcité
pour une laïcité positive au Burkina Faso ;
la définition du concept de laïcité et sa pratique en conformité avec les
réalités de notre société.

Tout cela traduit le vouloir vivre ensemble de toutes les confessions religieuses de
notre pays.
Votre adhésion à ce fondement de notre volonté de mieux vivre ensemble est à
saluer car les préoccupations soulevées au cours de ce forum sont à mon sens, de
riches contributions pour un Burkina apaisé.
Je voudrais vous féliciter pour ce travail de qualité que vous avez abattu en trois
jours seulement comme l’atteste d’ailleurs votre rapport de synthèse que nous
venons d’entendre.
Vous avez également formulé des recommandations fortes et consensuelles à
l’adresse de l’Etat, des Communautés religieuses, des autorités coutumières et
traditionnelles ainsi qu’à tout citoyen.
Pour ma part, je vous affirme ici que ces recommandations seront examinées par
mon Gouvernement avec la plus grande attention.
Le Gouvernement tout en observant la neutralité de l’Etat s’attachera à
accompagner tous les acteurs dans le sens de la promotion des valeurs qui nous
unissent et qui nous permettront de réserver un meilleur avenir à la prospérité.
Vos avis seront pris en compte dans l’élaboration des textes de lois relatifs à la
laïcité au Burkina Faso.
Mesdames et Messieurs
Je voudrais vous rappeler ici que l’Etat continuera à jouer son rôle régalien dans la
gestion de la cité et la protection de tous les citoyens burkinabè dans leurs
diversités de croyances et de pratiques religieuses et ce, conformément aux lois
de la République.
Les objectifs escomptés par votre forum sont en partie atteints au regard des
résultats auxquels vous êtes parvenus.

58

C’est pourquoi je voudrais que chaque participant de retour à sa base apporte la
bonne nouvelle au peuple burkinabé qu’il est appelé à vivre ensemble dans la
paix, la cohésion sociale, la tolérance et le respect mutuel dans l’unité, le progrès
et la justice comme le veut la devise de notre pays.
En vous souhaitant bon retour dans vos différents foyers, je déclare clos les travaux
du forum national sur la laïcité au Burkina Faso.

Je vous remercie.

ANNEXES 6

LA COMMUNICATION INTRODUCTIVE DES TRAVAUX

MINISTERE CHARGE DES RELATIONS
AVEC LE PARLEMENT ET DES
REFORMES POLITIQUES

BURKINA FASO
Unité- Progrès- Justice

59

FORUM NATIONAL SUR LA LAICITE AU BURKINA FASO
Ouagadougou, les 27, 28 et 29 septembre 2012,
Salle des Banquets de Ouaga 2000.

LE CONCEPT DE LA LAÏCITE : PHILOSOPHIE, FONDEMENTS ET
ANALYSE DES PRATIQUES
AU BURKINA FASO

COMMUNICATION INTRODUCTIVE
Présentée par le Docteur Jérôme BOUGOUMA, Ministre de l’Administration
Territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité

Septembre 2012

60

INTRODUCTION
Nos sociétés sont aujourd’hui une mosaïque de pensées et de croyances qui donne
au principe de laïcité une valeur cardinale, une primauté voire une nécessité
absolue. Les violences qui secouent le monde aujourd'hui suite à un film
ouvertement blasphématoire, ainsi que les caricatures provocatrices pour l'islam
que nous condamnons fermement, plus près de nous la justice d'un autre âge, ainsi
que les actions totalement en déphasage avec les valeurs d'un monde moderne et
de progrès prônées par certains groupes se réclamant d'une certaine vision de
l'islam au Nigeria et au nord Mali, montrent à l’évidence l’actualité de la question
de la laïcité.

C’est le lieu de saluer la clairvoyance du Conseil consultatif sur les réformes
politiques (CCRP) et des Assises nationales tenues à Ouagadougou respectivement
du 23 juin au 14 juillet et du 7 au 9 décembre 2011 d’avoir, au titre des réformes
consensuelles, inscrit la tenue d’un débat national sur la laïcité. Le présent forum
national sur la laïcité sous le thème: « le concept de la laïcité : philosophie,
fondements et analyse des pratiques au Burkina Faso » est la matérialisation de
cette interpellation et vise à permettre à l’ensemble du corps social (représentants
des communautés musulmane, catholique et protestante, de la chefferie
coutumière et traditionnelle, des organisations de la société civile, des partis
politiques, de l’administration publique et de la communauté scientifique) de
réfléchir sur une compréhension partagée du concept et de renforcer la pratique
de la laïcité, facteur de paix, de cohésion sociale et de progrès dans notre pays.
Mais bien qu’actuel, l’abord de la problématique de la laïcité s’avère périlleux et
d’autant plus risqué que le terme ne comporte pas de définition juridiquement
consacrée. Ni en France, considérée comme le berceau de la laïcité1, ni au Burkina
Faso2, les termes laïcité ou laïc n’y sont pas explicités et n’y reçoivent aucune
définition précise. Le seul début de définition, au demeurant une définition par
1

Ni dans la Constitution en vigueur, ni dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789,
pas même dans la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat (le mot laïcité n’y
apparaît même pas), on ne trouve de définition de la laïcité. L’article 1er de la Constitution du 4 octobre
1958 dispose simplement que « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et
sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race ou de
religion. Elle respecte toutes les croyances ». La superposition de la laïcité législative de 1905 ou laïcitéséparation et de la laïcité constitutionnelle instaurée par les Constitutions françaises de 1946 et de 1958
n’aura donc pas réussi à donner une définition claire du concept quand bien même il n’existe pas de
« textes officiels » sur la morale ou l’éthique laïque.
2

L’article 31 de la Constitution et l’article 3 de la loi n°013/96/ADP du 9 mai 1996 portant loi
d’orientation de l’éducation ne comportent aucune définition des termes laïcité ou laïque.
61

ricochet, se trouve dans l’avis juridique N°2004-017/CC du Conseil Constitutionnel
en date du 9 juillet 2004 sur la conformité à la Constitution du Protocole
A/SP1/12/01 du 21 décembre 2001 sur la démocratie et la bonne gouvernance
additionnel au Protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de
règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité. Dans cet avis on
trouve au quatrième considérant un début de définition de la laïcité puisqu’on y lit :
« le caractère laïc de l’Etat qui est et demeure entièrement neutre dans le domaine
de la religion ».
Un recours au dictionnaire Larousse laisse entrevoir laïcité comme : le caractère de
ce qui est laïque, indépendamment des conceptions religieuses et partisanes ;
système qui exclut les Eglises de l’exercice du pouvoir politique ou administratif et en
particulier de l’organisation de l’enseignement laïc ». Il saute aux yeux que cette
définition ne détermine nullement le contenu de ce concept. Il importe donc face à
ce déficit d’interroger la doctrine pour saisir sa substantifique moelle. A cet effet,
Edgard MORIN considère que la laïcité est « au premier regard la constitution et la
défense d'un espace public de pluralisme, de discussion d'idées, de tolérance ».
Quant au philosophe Henri PENÀ RUIZ, il voit en la laïcité « l'affirmation de l'unité
du peuple sur la base de la liberté et de l'égalité des droits des hommes qui le
composent ». Mais s’il fallait, risquer une définition, inspirons nous de celle qui
suggère de voir dans la laïcité « un principe qui établit, sur le fondement d'une
séparation rigoureuse entre l'ordre des affaires publiques et le domaine des activités
à caractère privé, la neutralité absolue de l'Etat en matière religieuse ». Il convient
de retenir surtout que la laïcité est la forme institutionnelle que prend, dans les
sociétés démocratiques, la relation politique entre le citoyen et l'Etat, et entre les
citoyens eux-mêmes.
C’est dire que, bien que largement répandue, la laïcité reste un concept ambigu
qui peut s’interpréter diversement3. Il convient donc de s’attacher, en tout premier
lieu, à la compréhension du concept, puis d’envisager la manière dont il est
transposé dans les faits, avant de s’intéresser aux conditions favorables à son
éclosion et à son épanouissement.
Il en résulte que si dans son principe la laïcité est une (I), elle est plurielle dans son
vécu (II) et que la démocratie est le cadre propice à son épanouissement (III). Tels
sont les trois temps forts qui vont rythmer l’appréhension du concept de laïcité.

I)- LA LAÏCITE EST UNE DANS SON PRINCIPE

3

Philippe SEGUR, « Observations sur la notion de laïcité en droit constitutionnel », document
multigraphié, p.2
62

L’analyse de l’évolution historique du principe de laïcité permet de retenir deux
caractéristiques fondamentales du concept. Née comme séparation des Eglises et
de l’Etat (A), la laïcité est de plus en plus conçue comme neutralité idéologique de
l’Etat (B).
A)- La laïcité comme séparation des Eglises et de l’Etat
« A César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu ». Tel pourrait
se résumer cette caractéristique de la laïcité. En effet, la laïcité est historiquement
attachée en France, à la séparation des Eglises et de l’Etat. La société laïque se
définissant par le fait que le « religieux » qu’il soit individuel ou collectif n’a pas
d’emprise sur la vie civile, mais qu’il est exclusivement du domaine de la vie
privée. Elle induit qu’il n’y a plus de foi d’Etat, ni de religion d’Etat, ni de religion
de la majorité. C’est la perte du pouvoir politique par la sphère religieuse, la
déconfessionnalisation de la vie publique, le refus de toute inféodation du politique
à la religion, le rejet de tout pouvoir théocratique. Désormais « la source de toute
souveraineté réside dans la Nation c’est-à-dire dans le monde terrestre et non plus
dans le plan divin »4. Par le processus de laïcisation, il s’agit d’assurer le
cloisonnement entre le politique et le religieux
Pourtant cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de dialogue possible entre l’État et les
religions, parce que la laïcité n’est nullement antireligieuse et ne se définit pas par
l’athéisme comme certains se plairaient à le dire. On peut être croyant et laïc, tout
comme on peut être libéral ou socialiste et démocrate. La laïcité n'est pas l'antireligion : au contraire, elle offre même la meilleure protection aux confessions
minoritaires, puisque aucun groupe social ne peut être discriminé.
Certains hommes croient en un Dieu Unique ; d'autres en plusieurs ; d'autres encore
sont athées ou agnostiques. Tous ont à vivre ensemble. Cette vie commune, selon
la Déclaration des droits de l'homme de 1789, doit assurer à chacun la liberté de
conscience, qui exclut toute contrainte religieuse ou idéologique, et l'égalité de
droits, incompatible avec la valorisation privilégiée d'une croyance.
Ainsi comprise, la laïcité n'est pas de l'ordre d'une option spirituelle particulière,
mais constitue une condition de possibilité fondamentale du vivre ensemble dans
la citée. On ne saurait en conséquence la renégocier sans cesse ou tolérer le non
respect du principe, notamment au gré des fluctuations du paysage religieux et
des rapports de forces qui les sous-tendent.

4

Philippe SEGUR, « Observations sur la notion de laïcité en droit constitutionnel », op.cit., p.2
63

Indifférent et incompétent en matière de doctrines et de croyances, l'Etat laïc ne
s'occupe que de ce qui relève de l'intérêt public. Il observe et institue une forme
de neutralité vis à vis des convictions religieuses et/ou politiques.
Pour garantir à la fois l'égalité de tous et la liberté de chacun, la laïcité distingue et
sépare les domaines public, où s'exerce la citoyenneté, et privé, où s'exercent les
libertés individuelles (de pensée, de conscience, de conviction) et où coexistent
les différences (biologiques, sociales, culturelles).
Appartenant à tous, l'espace public est indivisible : aucun citoyen ou groupe de
citoyens ne doit imposer ses convictions aux autres. Symétriquement, l'état laïc
s'interdit d'intervenir dans les formes d'organisations collectives (partis, églises,
associations etc.) auxquelles tout citoyen peut adhérer et qui relèvent du droit
privé.
Cette compréhension restrictive de la laïcité (laïcité-séparation) va peu à peu
céder le pas à une compréhension moins négative tendant plus à une neutralité de
l’Etat et qu’exprime à la perfection le 1er amendement à la Constitution américaine
lorsqu’il dispose : « Le Congrès ne pourra faire aucune loi ayant pour objet
l’établissement d’une religion ou interdisant son libre exercice ». Le principe de
laïcité, fruit d’une longue histoire s’affiche au fil des années comme un devoir de
neutralité de l’Etat à l’égard des différentes croyances.
B)- La laïcité comme neutralité idéologique de l’Etat
« La République ne reconnaît aucun culte, mais n'en privilégie ni n'en discrimine
aucun ». De ce principe, dit « de neutralité », qui régit les rapports du politique et
du religieux, se dégagent deux composantes, la liberté de conscience et la liberté
du culte, garanties par l'article 1er de la loi française de 1905. Ce principe postule
que les domaines du politique et du religieux doivent demeurer idéologiquement
étanche. De ce point de vue, la laïcité devient une exigence d’objectivité
applicable à l’Etat. Elle consiste à ce que l’Etat ne priorise aucun culte, mais les
considère tous et respecte les pratiques de la foi de chaque culte. C’est dans ce
sens que André Philip affirmait que : « la laïcité (...) n’est pas une philosophie, ni
une doctrine, c’est simplement la coexistence de toutes les philosophies, de toutes
les doctrines, le respect de toutes les opinions et de toutes les croyances ».5 Cette
laïcité neutralité est synonyme de liberté de conscience et de libre choix de
l’enseignement pour chacun. C’est d’ailleurs le point de vue de la Commission
STASI en France qui, chargée de la réflexion sur l’application du principe de laïcité,
a proposé la définition suivante : « la laïcité, pierre angulaire du pacte républicain,
5

JORF Débats, 2ème séance, 29 août 1946, pp. 342663427.
64

repose sur trois valeurs indissociables : liberté de conscience, égalité en droit des
options spirituelles et religieuses, neutralité du pouvoir politique ». La laïcité
s’interprète donc comme la reconnaissance par l’Etat de toutes les diversités
culturelles. Plus que la tolérance, c’est la laïcité qui permet la possibilité d’une
cohabitation des libertés, c’est-à-dire la garantie et la protection, pour chacun, de
sa « liberté de conscience » : cette coexistence pacifique requiert l’abstention de
la puissance publique, à l’endroit de toute foi comme de toute croyance.
Sur le plan juridique, la notion de laïcité doit être fidèle à la conception d’un espace
public affranchi des immixtions des religions en tant que pouvoirs. Elle interdit
l’intervention de la religion dans le processus de décision politique et dans le
fonctionnement de l’administration. Elle présente trois dimensions essentielles.
La première dimension est celle de la neutralité religieuse des pouvoirs publics.
Ainsi, « Toute considération religieuse est étrangère à la mission de l’État dont les
représentants, des responsables du plus haut niveau jusqu’au plus modeste de ses
agents, doivent observer vis-à-vis du fait religieux en général la plus stricte
neutralité et l’on dira même plus, la plus grande indifférence. L’État ne reconnaît
aucun culte, il n’en salarie et n’en subventionne aucun »6 . La conséquence de ce
qui précède, c’est que rien dans le comportement des fonctionnaires ne doit
pouvoir suggérer une préférence, une faveur ou une défaveur pour une religion
quelle qu'elle soit ou pour une absence de religion. C’est là le principe de la
neutralité du service public. La notion de laïcité interdit aux prescriptions
religieuses d’accéder au statut de règle juridique. L'État n'a pas de religion. Il se
doit d'être neutre, dans son fonctionnement comme dans son rapport aux usagers.
La seconde dimension, elle, est l’expression du principe de non discrimination. Il
s’agit de proscrire toute discrimination, qu’il s’agisse de l’accès au service public
ou bien encore de l’accès à la fonction publique.
La troisième dimension réside dans la nécessité d’aménager des garanties
d’utilisation des droits par l’obligation faite à la puissance publique de garantir la
liberté d’exercice des cultes. Dans un pays laïc, les citoyens quelque soit leurs
croyances ont tous leur place sur la base de l’égalité.
Dans notre pays, le concept de la laïcité trouve son expression légale dans un passé
plus récent à travers la Loi fondamentale.
En effet, le principe de la laïcité a toujours figuré dans les Constitutions successives
du Burkina Faso depuis l’indépendance. L’article 31 de la Constitution du 2 juin
6

Pierre NABET et Jean Guy ERCHAUG, « Peut-on donner une définition juridique de la laïcité »,
document multigraphié, p.
65

1991 stipule notamment que « Le Burkina Faso est un Etat démocratique, unitaire et
laïc. Le Faso est la forme républicaine de l'Etat. ». Cette règle solennellement
affirmée dans notre Constitution est le fruit de la tradition de cohabitation pacifique
des populations de notre pays.
Le Burkina Faso s’est construit autour de la laïcité, pierre angulaire du pacte
républicain des citoyens aux croyances diverses, et comme tout Etat
démocratique, il garantit la liberté de conscience et le principe de nondiscrimination.
Souscrivant à la Déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948 et
réaffirmant la Charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples de 1981, dans
son préambule, la Constitution du 2 juin 1991 traite des attributs de la laïcité à
travers certains articles connexes et complémentaires de l’article 31. Ainsi :
-

l’article 1 pose le principe d’égalité de tous les citoyens et prohibe toute
discrimination fondée sur la religion (« Article 1 : Tous les Burkinabè naissent
libres et égaux en droits. Tous ont une égale vocation à jouir de tous les droits
et de toutes les libertés garantis par la présente Constitution. Les
discriminations de toutes sortes, notamment celles fondées sur la race, l'ethnie,
la région, la couleur, le sexe, la langue, la religion, la caste, les opinions
politiques, la fortune et la naissance, sont prohibées. »).

-

l’article 2 protège les enfants et l’homme de façon générale contre les
sévices corporels («Article 2 : La protection de la vie, la sûreté et l'intégrité
physique sont garanties. Sont interdits et punis par la loi, l'esclavage, les
pratiques esclavagistes, les traitements inhumains et cruels, dégradants et
humiliants, la torture physique ou morale, les sévices et les mauvais traitements
infligés aux enfants et toutes les formes d'avilissement de l'Homme. »).

-

l’article 7 garantit la liberté de croyance et la libre expression du culte
(« Article 7 : La liberté de croyance, de non croyance, de conscience, d'opinion
religieuse, philosophique, d'exercice de culte, la liberté de réunion, la
pratique libre de la coutume ainsi que la liberté de cortège et de manifestation,
sont garanties par la présente Constitution, sous réserve du respect de la loi,
de l'ordre public, des bonnes mœurs et de la personne humaine. »).

-

l’article 23 interdit toute discrimination fondée sur la religion en matière de
mariage et dans la famille (« Article 23 : La famille est la cellule de base de la
société. L'Etat lui doit protection. Le mariage est fondé sur le libre
consentement de l'homme et de la femme. Toute discrimination fondée sur la
race, la couleur, la religion, l'ethnie, la caste, l'origine sociale, la fortune, est
interdite en matière de mariage. »).

-

l’article 27 affirme le principe de laïcité à l’école, lieu privilégié de
d’acquisition et de transmission de nos valeurs communes, instrument par
66

excellence d’enracinement de l’idée républicaine («Article 27 : Tout citoyen
a le droit à l'instruction. L'enseignement public est laïc. L'enseignement privé
est reconnu. La loi fixe les conditions de son exercice. »).
De ce rappel non exhaustif, il apparait qu’au-delà des relations entre l’Etat et les
religions, la laïcité porte d’autres valeurs, en étant à la fois un projet politique et
social : elle est un projet politique car sa finalité est aussi de former des citoyens,
d’émanciper des individus par rapport à leur milieu d’origine (familial,
géographique et social) et de leur donner une liberté de choix ; elle est un projet
social car cette liberté doit permettre à chacun de construire son parcours dans la
société et de faire valoir ses talents.
Au nom de l’égalité républicaine, l’État et les services publics doivent être neutres,
c’est-à-dire qu’ils ne peuvent afficher ou privilégier aucune option politique,
spirituelle ou philosophique. Il leur est aussi interdit de privilégier ou de dénigrer
tout citoyen à cause de ses opinions philosophiques ou spirituelles.
Le principe de laïcité de la République, qui implique la neutralité du service public,
soulève la question de la reconnaissance à accorder à l’expression ou la prise en
compte de la religion dans le fonctionnement des services publics. Le principe
associe la neutralité du service public et la liberté religieuse pour les agents et les
usagers, et cet équilibre doit conduire le personnel à prohiber l’expression de
leurs convictions religieuses dans le cadre du service public.
Le service public doit être neutre à l’égard de toutes les opinions politiques et
croyances religieuses. Il ne peut ni favoriser les uns par rapport aux autres, ni
donner l’impression d’être susceptible de le faire. La neutralité du service
s’impose afin que soit respectées les opinions et croyances de tous les usagers.

Ce faisant, la manifestation ostentatoire de ses croyances (slogans et affiches dans
les bureaux, lieu de travail transformé en lieu de culte, etc.) peut constituer pour
un agent du service public une faute lorsqu’elle s’exerce dans le cadre de ses
fonctions. La situation est en ce domaine identique à celle relative aux
manquements à l’obligation de réserve dont peuvent se rendre responsables des
agents publics. Parallèlement à l’obligation de neutralité, l’administration s’attache
cependant à faciliter l’exercice par l’agent de sa liberté religieuse, hors du cadre
du service public. Tel est le cas concernant les autorisations d’absence sollicitées
par les agents publics pour participer à des cérémonies ou fêtes religieuses dans
la mesure où leur absence reste compatible avec le fonctionnement normal du
service.

67

De manière générale, les usagers du service public doivent se conformer
également aux exigences de fonctionnement du service public. Cependant, ce
régime est et doit être plus souple pour les usagers des services publics, qui
disposent d’un droit à l’expression plus poussé et la prise en compte de leurs
opinions religieuses, sous réserve que cette reconnaissance ne porte en elle des
actes de provocation ou ne trouble le fonctionnement normal du service public.

Comme nous pouvons le constater, agents et usagers du service public peuvent ne
pas disposer du même niveau de liberté d’expression, compte tenu de leur
différence de situation d’un instant.

La laïcité se présente ainsi comme l’expression des droits de communication
sociale reconnus au citoyen, notamment la liberté religieuse 7 qui signifie non
seulement la reconnaissance de la liberté de conscience8, mais aussi la liberté de
culte9 et la liberté de l’enseignement10. La seule condition à la jouissance de ces
libertés que garantit la Constitution est le «respect de la loi, de l’ordre public, des
bonnes mœurs et de la personne humaine ». La laïcité permet ainsi de prendre en
compte la diversité des hommes et la nécessité de les unir pour assurer leur
coexistence. « Elle le fait en conjuguant la liberté de conscience, qui permet aux
options spirituelles de s'affirmer sans s'imposer, l'égalité de droits de tous les
hommes sans distinction d'option spirituelle, et la définition d'une loi commune à
tous visant le seul intérêt général, universellement partageable. »11 La laïcité
contemporaine se définit sous trois aspects : l’État est sécularisé, la liberté de
croyance et de culte est garantie, et les croyances sont égales entre elles12.
Le contenu de la laïcité ainsi exposé est vécu différemment selon les pays.
7

Consacrée par la Constitution (art. 7), la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) (art.18
), la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) (art.2 ), le Pacte international relatif
aux droits civils et politiques (PIDCP) (art 18-1)
8

C’est-à-dire la liberté de croire ou de ne pas croire

9

C’est-à-dire que j’ai la liberté d’extérioriser ma foi ou mes convictions religieuses.

10

Consacrée par la Constitution (art.27), la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH)
(art.26-3), le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) (art 133).
11

http://fr.wikipedia.org/wiki/laicite_note -Ruiz-Histoire-12

12

Jean BAUBEROT, Laïcité 1905-2005, entre passion et raison, Le Seuil, 2004.
68

II)- LA LAÏCITE EST PLURIELLE DANS SON VÉCU
« Si la création du mot de « laïcité » est d’origine française, la réalité que recouvre
ce terme n’est l’apanage d’aucune culture, d’aucune nation, d’aucun continent et la
laïcité peut exister dans des conjonctures où le mot ne se trouve pas utilisé. Il
n’existe d’ailleurs pas de laïcité absolue mais des formes concrètes de laïcité,
différentes suivant les contextes historiques et sociaux »13. Il importe donc de tenter
d’appréhender les diverses déclinaisons de la laïcité dans le monde (A) avant
d’examiner ses modalités d’expression au Burkina Faso (B).
A)- Les pratiques de la laïcité dans le monde
Si en France la laïcité de combat a longtemps été synonyme d’anticléricalisme,
dans d’autres contrées du monde la laïcité est vécue de façon diverse et la
tendance est au développement de la laïcité cohabitation.
Ainsi, l’interdiction faite au Congrès des Etats-Unis par le 1er amendement à la
Constitution américaine de favoriser l’établissement d’une religion ou d’en
interdire la pratique n’empêche pas que la société américaine soit marquée par
une forte imprégnation religieuse qui culmine avec la formule inscrite sur les
billets de banque « In God we trust » (c’est-à-dire, « en Dieu, nous croyons »), et
l’obligation pour le président et les sénateurs de jurer sur un livre saint.
Il en est de même au Bénin où le président doit jurer sur Dieu et les mânes des
ancêtres14 et au Niger15 où le président de la République doit jurer sur le Livre –
Saint de sa confession.
En Turquie, la constitution de 1924 proclame que « l’Etat turc est républicain,
nationaliste, populiste, étatiste, laïque et révolutionnaire ». Cependant la laïcité
turque ne se fonde ni sur le principe de séparation de l’Etat et de la religion ni sur
une réelle neutralité de l’Etat. Elle repose sur l’existence d’un islam national
sunnite, placé sous le contrôle d’organismes directement rattachés au Premier
ministre avec des imams qui sont salariés de l’Etat. Il y a des pays qui
13

Jean Baubérot, « Les trois principes fondamentaux de la laïcité », document mutigraphié, p.1

14

Article 53 de la constitution béninoise : « Avant son entrée en fonction, le Président de la République
prête le serment suivant : »devant Dieu, les mânes des ancêtres, la Nation et devant le Peuple béninois,
seul détenteur de la souveraineté, Nous…., Président de la République, élu conformément aux lois de
la République, jurons solennellement…. »
15

Article 39 de la Constitution du Niger : « Avant son entrée en fonction, le Président de la
République prête serment sur le Livre – Saint de sa confession devant la Cour Constitutionnelle, en
présence des membres de l'Assemblée nationale, en ces termes :
"Devant DIEU et devant le peuple nigérien, Nous …………Président de la République élu
conformément aux lois, jurons solennellement sur le Livre - Saint : … »
69

subventionnent les cultes (Allemagne), les liens sont plus étroits au Royaume -uni
où la Reine est chef de l'église anglicane! Tout est question d'histoire des peuples
dans leur quête souvent mouvementée d'un meilleur vivre ensemble.
B)- La pratique de la laïcité au Burkina Faso
Au Burkina Faso, la religion reste une réalité vivante autant sociale que
personnelle. En effet, le dualisme de la société burkinabè partagée entre une
superstructure moderne et une base traditionnelle influe sur la prégnance du
religieux dans la vie publique. Le système de croyance dans les sociétés
traditionnelles africaines est que le groupe ou la communauté est une succession
continuelle infinie de générations, une personne morale englobant les vivants et
les morts. Le droit coutumier est empreint de mysticisme parce que non seulement
le monde invisible est la source de l’autorité du droit, mais aussi, parce les
sanctions sont supranaturelles. La foi que l’esprit des ancêtres est incarné dans le
droit est un facteur précieux et puissant pour asseoir le caractère obligatoire de la
règle de droit. De même, toute violation du droit est en même temps une violation
de la religion. Ce faisant, la sanction n’est pas seulement civile ou pénale, elle a
une dimension spirituelle par la tenue d’une cérémonie expiatoire car la seule
compensation ne suffit pas. Il faut procéder à des rites purificatoires pour s’allier
les ancêtres.
Cet arrière plan traditionnel de non séparation entre le politique et le religieux
profite aux religions révélées et conduit à ce que l’espace public soit envahi par
les expressions de la foi des uns et des autres (sacrifices rituels dans les rues,
signes religieux ostentatoires dans les bureaux, implication de l’Etat dans
l’organisation du pèlerinage à la Mecque, présence dans quasiment tous les
services publics, d'un espace dédié à la prière, barrages de voies publiques pour
la prière, installation de lieux de prière dans les domiciles, etc.). Les autorités
religieuses et coutumières figurent en bonne place dans le protocole d'Etat et elles
sont sollicitées par les pouvoirs publics pour restaurer et consolider la paix sociale.
Cette collusion du pouvoir politique et du pouvoir religieux culmina avec la
journée nationale de pardon. C’est dire qu’au Burkina Faso, la laïcité est plus vécue
comme un moyen de garantie de la liberté de conscience que comme un
cloisonnement étanche du politique et du religieux. Les religieux toutes tendances
confondues, ont contribué à la construction du Burkina, à la consolidation de la paix
sociale et à accompagner notre peuple dans sa longue quête d'un mieux être et
vivre ensemble. La nation burkinabé est indissociable du fait religieux. Chaque
fois que le politique s'est trouvé confronté à des difficultés menaçant sa survie, il a
fait recours aux religieux et ceux-ci ne se sont jamais dérobés.
La laïcité est donc constitutive de notre histoire collective, mais aucune société n'est
laïque spontanément. La laïcité est en construction permanente et nécessite
souvent des adaptations sans remise en cause des "acquis historiques".
70

Le principe de laïcité ne pourra avancer que si les citoyens se l’approprient, ce qui
nécessite une connaissance exhaustive de la législation et un enseignement des
valeurs que les lois professent.
Il nous faut donc lutter contre « l’ignorance laïque » par l’explication du principe et
la formation des citoyens, l’intellect étant le meilleur rempart contre les ravages
des imaginaires.
Cette formation doit faire appel au droit car la hiérarchie et la portée des règles
sont mal connues pour que le niveau de connaissances générales du grand public
(sur l’histoire et l’actualité de la laïcité mais aussi sur la diversité des traditions
religieuses et des pratiques culturelles qui coexistent aujourd’hui sur le territoire
de la République) progresse à travers des actions d’information et des débats. Le
Conseil Supérieur de la Communication pourrait susciter dans les médias publics
des émissions religieuses et mieux encadrer le temps consacré au passage des
musiques religieuses pour éviter de développer le sentiment de favoritisme au
profit de l'une ou l'autre religion. Cet objectif prioritaire d’égalité entre toutes les
options représente un processus de longue haleine encore inachevé et les cadres
ou associations de promotion du dialogue inter-religieux, surtout chez les étudiants
sont à encourager.
Il apparait donc que la laïcité, dans ses modalités d’expression, est en définitive le
produit d’un rapport de forces entre le politique et le religieux. Ainsi que l’affirme
fort opportunément Jean Michel Ducomte, « Selon les forces nationales, politiques
et religieuses en présence, la laïcité prend des visages très différents et occupe un
espace à géométrie variable ».16

III)- LA DEMOCRATIE CADRE D’EPANOUISSEMENT DE LA LAÏCITE
Pas de laïcité sans démocratie. En effet, le développement de la laïcité est lié à
l’apparition du modèle politique de la démocratie libérale fondée sur la
reconnaissance de l’individu libre d’user des droits dont il dispose à égalité avec
ses semblables et, par ailleurs, citoyen investi, par sa délibération et son vote, de
la faculté de légitimer le pouvoir et de faire la loi. En fait l’histoire de la laïcité
remonte aux humanistes de la Renaissance (XVIème siècle) puis aux philosophes du
siècle des lumières (XVIIIème siècle) et en 1789 à la déclaration des droits de
l’Homme et du citoyen dont l’article 9 dispose: « Nul ne doit être inquiété pour ses
opinions mêmes religieuses pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre
public ».
16

Jean Michel DUCOMTE, « la laïcité dans le monde », document multigraphé, p1
71

La laïcité suppose donc des esprits libres qu’elle protège. Elle exige écoute de
l’autre et respect absolu de sa liberté de conscience. Seul l’Etat démocratique est
capable de pourvoir à cette exigence. En effet, la démocratie peut être perçue
comme le refus de se soumettre aveuglément au pouvoir d’un individu ou d’un
groupe. Les présupposés de l’idéal démocratique sont les suivants :
la limitation organisée du pouvoir confié à un individu ou à un groupe ;
la participation libre et égalitaire des citoyens ;
la protection du citoyen par la loi et l’égalité de tous devant la loi.
Tout cela en vue d’œuvrer à l’éclosion de la liberté et à l’épanouissement de
l’homme. La démocratie se présente comme une forme d’organisation de l’action
politique visant la régulation de la vie collective, la coordination des rapports entre
des individus aux aspirations divergentes dans un ensemble qui est l’Etat. C’est
pourquoi M. Alain de TOURAINE affirme que « la démocratie est le régime qui est
capable de gérer dans le cadre de la loi, le plus haut niveau possible de diversité ».
Elle se présente finalement comme un état d'esprit, de tolérance, d'acceptation de
la différence, de transparence17. Tout comme la démocratie, la laïcité rend possible
la pluralité sans scissions communautaristes de l’espace civique. Elle régule la
pluralité dans l’espace public sur la base de l’égalité et de la liberté.
C’est dire que par nature, les dictatures et les totalitarismes sont réfractaires à la
laïcité. Quelle que soit l’idéologie dont elles se réclament, ils étouffent toute
démarche de laïcisation. De même, les Etats théocratiques ou confessionnels, c’està-dire ceux dont la politique est dominée par l’obligation de se conformer à des
préceptes religieux, sont par nature rebelles à toute pratique démocratique réelle
et partant à toute laïcisation.
Mais, si la démocratie est une condition de développement de la laïcité, elle
n’emporte pas une uniformisation de la pratique laïque. Tout comme la démocratie,
la laïcité est fonction à la fois de la singularité de l’histoire nationale et de la culture
de chaque peuple.
En effet, La laïcité est une pratique vivante. Notre société doit prendre en compte
ses contradictions et les situations conflictuelles qui en résultent. Pour éviter les
risques d’affrontements violents, il est non seulement nécessaire et urgent qu’un
véritable débat démocratique permette de se mettre d’accord sur la société que
nous voulons pour notre postérité tout en rappelant les principes et les pratiques
qui la fondent, mais également que ce débat soit périodique et touche les bases de
notre organisation sociale.
17

Ph. MANGA: op. cit. p.70.
72

A ce propos, les exécutifs des collectivités doivent jouer leur rôle dans
l’organisation du cadre d’expression de la laïcité sur le plan local, corollaire du
partage de compétences politiques, économiques et sociales avec l’Etat central.
Ainsi, il revient aux exécutifs de nos collectivités territoriales de régir l’expression
des libertés des citoyens et de gérer la pratique culturelle qui se trouve au centre
de la laïcité, dans le respect de la légalité et dans une approche dictée par la
proximité et la subsidiarité. Pour cela, les collectivités pourraient se doter de
comités d'éthique afin de permettre un dialogue avec les différentes communautés
religieuses, et de régler les difficultés susceptibles de se poser notamment en
matière de répartition équitable des lieux de cultes.
En tout état de cause, au sortir de ce forum, nous devrions passer de l’égalité
juridique formelle à une égalité pratique substantielle, seule gage d’une laïcité
bien comprise.

CONCLUSION
« Autant qu’une organisation juridique des relations entre les Eglises et l’Etat, la
laïcité s’impose en dernière analyse, comme une conviction sociale partagée »18.
La laïcité au Burkina Faso ne serait-elle pas cet art de vivre ensemble de toutes les
religions confondues, animistes, musulmans, chrétiens, et autres ? Ne serait-ce pas
la perpétuation de cette tradition de partage et d’acceptation de l’autre dans sa
différence longtemps vécu dans nos quartiers ? Il nous faut nous inscrire dans la
logique d’une laïcité « ouverte et intelligente » qui nous permette de gérer au sein
du Burkina Faso la richesse de nos différences, de construire une vraie laïcité de
cohabitation respectueuse de l’esprit républicain et de l’Etat de droit.
Face à la montée des intégrismes et des fondamentalismes, de l’intolérance et du
sectarisme, la seule réponse cohérente et pacificatrice, le seul principe fondateur,
admissible par tous, la seule modalité acceptable qui permette de définir un
vouloir vivre commun pour des peuples pourvus d’attachements ou
d’appartenances singuliers, reste la laïcité, vecteur dynamique d’une cohésion
sociale durable.
Comme pour nous montrer le chemin, l’actualité de ces derniers mois nous a servi,
le samedi 7 juillet 2012, un exemple on ne peut plus admirable, celui de l’ordination

18

Jean Michel DUCOMTE, « la laïcité dans le monde », op.cit., p.8
73

sacerdotale à Ouahigouya d’un abbé issu d’une fervente famille musulmane qui a
accepté d’accompagner leur enfant dans la réalisation de son choix.
Preuve admirable d’une laïcité inclusive où chacun sent bien que ses convictions
sont respectées. Forte interpellation pour une quête d’une laïcité reconnaissance 19
qui, bien que plus exigeante, socialement, éthiquement et politiquement, devrait
être la forme de laïcité vers laquelle nous devons tendre.
Je vous remercie vous souhaite de bons travaux.

19

Ce type de laïcité se caractérise par une reconnaissance de l'autonomie de pensée dont chaque
citoyen est considéré porteur (...) il découle que toutes les conceptions de la vie (hormis celles qui
briment les doits d'autrui) méritent la même protection de la part de l'Etat
74

ANNEXES 7

LES EXPOSES DES COMMUNAUTES COUTUMIERES, TRADITIONNELLES
ET RELIGIEUSES

75

EXPOSE DE LA CHEFFERIE COUTUMIERE
ET TRADITIONNELLE

FORUM NATIONAL SUR LA LAICITE AU BURKINA FASO
76

Communication donnée par la chefferie coutumière et traditionnelle

27, 28 et 29 septembre 2012
Salle des Banquets Ouaga
2000

INTRODUCTION
Le Burkina Faso, comme nous l’enseigne l’histoire a connu des grands royaumes et
différents types d’organisation politiques et sociales qui pendant longtemps, ont
géré le temporel et le spirituel de nos différentes communautés.
Toute la vie sociale est règlementée à partir du pouvoir central. Les croyances
divines et les sacrifices rituels aux ancêtres occupaient une grande place.
Cependant, la vie en communauté requière de chacun de ses membres,
l’acceptation de l’autre et de la différence.
La vie dite moderne menace aux fondations de la société traditionnelle. C’est
pourquoi, une réflexion sur la laïcité pose la problématique du vivre ensemble
dans un état républicain moderne.
Nous nous intéresserons d’abord sur les croyances ancestrales, ensuite aux
évolues des rapports entre ces croyances et les religions dites révélées et enfin
aux rapports actuels entre la chefferie coutumière avec les ministres des cultes.

CHEFFERIE TRADITIONNELLE ET CROYANCES ANCESTRALES

77

Jusqu’à la pénétration coloniale, les populations du Burkina Faso, étaient
intégralement animistes ; aussi chaque famille possédait des autels sacrés dans sa
cour pour des sacrifices à l’occasion des fêtes ou des grands évènements.
Grand prêtre et détenteur du pouvoir spirituel, le chef traditionnel a l’obligation
de procéder à tous les sacrifices rituels pour faire régner la paix. Il doit faire
tomber abondamment les pluies ; écarter les épidémies afin d’assurer le bonheur
et la prospérité de ses sujets. La vie sociale peut être perturbée ou compromise
par des calamités. Dans ce cas, le chef prend toutes les dispositions nécessaires
pour enrayer les conséquences et assurer ainsi à l’ensemble de ses sujets, sans
distinction basée sur la croyance ou toute autre considération, le bonheur et la
sécurité. Tout appartient aux ancêtres qui ont produit, transmis les éléments
nourriciers pour la gloire et la prospérité de la lignée. Les offrandes rendues aux
divinités et aux ancêtres, ont pour rôle de préserver les populations de leur colère
et les prémunir des calamités.
En tant que détenteur du pouvoir temporel, tout chef à la charge d’assurer la
cohésion et la stabilité de la population dont il a la charge. Il est administrateur de
sa cité. En cela, il doit trancher les conflits et les litiges, garantir le respect des
règles établies et des interdits. Bien que fondamentalement animistes, les
populations ont entretenu des relations très profondes avec les religions dites
révélées.
EVOLUES DES RAPPORTS ENTRE CROYANCES ANCESTRALES ET LES
RELIGIONS DITES REVELEES
Dans ces rapports avec les religions importées, le Mogho naaba Saaga imam du
Moghoa intégré dans le protocole de sa cour le Yann naaba (Yarsés, adeptes du
commerce national et international et pratiquant la religion musulmane). Le Yann
naaba a rang de notable dans la Cour du roi. Il prodigue des bénédictions au
mogho naaaba à travers ses prières tous les matins. Il est consulté pour les
différentes nominations dans le royaume. Car cette tradition se rencontre dans
toutes les cours royales à travers le Burkina Faso.
Lorsque la communauté musulmane du burkina décide de la nomination du grand
imam de Ouagadougou, le mogho naaba est consulté pour avis et conseils. Il
intervient pour régler des incompréhensions qui viendraient à naitre à l’occasion
de cette nomination. Lorsqu’il est désigné, le Grand Imam de ouagadougou est
présenté au mogho naaba.
Ainsi, la chefferie coutumière et traditionnelle en tant que garant de la paix sociale
et de la préservation des valeurs promotrices de liberté, a su maintenir avec la
religion musulmane une coexistence pacifique et un respect mutuellement
profond.

78

En 1900, lorsque la congrégation des sœurs de Marie ou sœurs blanches arrivèrent
aux portes de Ouagadougou, elles furent accueillies par une délégation envoyée
par le mogho naaba. Il leur fut gracieusement offert un domaine appartenant au
mogho naaba. La réalité des pouvoirs politique, judiciaire, législatif et même
l’information appartenait aux chefs coutumiers et traditionnels, c’est pourquoi ils
rappellent constamment leur attachement dans la nécessité de la tolérance et du
pardon dans la vie de nos différentes communautés. Depuis plusieurs décennies,
le mogho naaba entretient des relations privilégiées avec les communautés
chrétiennes du Burkina et de la communauté musulmane et autres (...).
CHEFFERIE COUTUMIERE ET TRADITIONNELLE FACE A LA LAICITE
De par son rôle éminemment d’arrière garde, la chefferie coutumière et
traditionnelle apporte constamment sa contribution dans les débats, en vue
d’approfondir la démocratie, l’Etat de droit, la paix et le progrès. Aussi, elle croit
que le Burkina Faso est véritablement une terre de dialogue et que nul n’est de trop
dans des échanges en vue garantir à chacun et à chacune la liberté d’expression
et de culte. Elle marque ainsi sa contribution au dialogue à travers, des audiences
et des concertations avec les plus hautes autorités religieuses, sa participation aux
grands regroupements, tels l’Union des religieux et coutumiers du Burkina pour la
santé et le développement (URCB/SD).
CONCLUSION
La colonisation a trouvé au Burkina Faso et dans la plupart des pays africains de
vastes ensembles structurés et organisés en chefferies avec comme croyance
l’animisme. Les structures politico administratives, répondaient parfaitement au
cadre social existant. A l’avènement des indépendances et à l’instar des pays de
l’Afrique de l’Ouest, le Burkina Faso a accédé à l’indépendance en 1960 consacrant
de même un Etat républicain moderne et laïc.
S’il est vrai que la chefferie coutumière et traditionnelle a pleinement conscience
de la forme républicaine de l’Etat et du profond attachement de nos populations
aux idéaux de paix, de démocratie et de progrès, elle est aussi convaincue que
cette paix ne saurais se réaliser sans la libre expression des croyances et des
cultes. C’est pourquoi, elle exhorte l’ensemble des communautés religieuses et
coutumières à éviter les heurts parfois engendrés par l’incompréhension, les
hostilités et les préjugés. Elle les encourage dans leurs pratiques religieuses et
coutumières, à cultiver le dialogue, le pardon, l’acceptation de la différence et la
nécessité du vivre ensemble.

79

EXPOSE DE LA COMMUNAUTE CATHOLIQUE

INTERVENTION DE LA COMMUNAUTE CATHOLIQUE AU FORUM
NATIONAL SUR LA LAICITE

La laïcité de l’Etat selon l’Eglise Catholique

80

1. La conception de la laïcité, selon l’Eglise Catholique, est fondée sur les
valeurs évangéliques, sur l’enseignement multiséculaire du Magistère et sur
l’expérience historique du rapport entre l’Etat et l’Eglise.
2. Le principe de laïcité est inscrit dans notre Constitution qui consacre, dans
son article 31, le caractère laïque du Burkina Faso. Ce principe constitue
également, pour l’Eglise Catholique, un fondement essentiel de la relation entre
l’Etat et la religion20. Il s’agit d’un principe de différenciation et de respect mutuel
qui implique une légitime autonomie de l’Etat et de la religion dans
l’accomplissement des missions qui leur sont propres21. La conception catholique
de la laïcité la distingue soigneusement du laïcisme qui consiste à exclure les
religions du débat public ou de l’espace de la société civile pour les confiner dans
la sphère privée. Le laïcisme se traduit souvent par des formes d’indifférence, de
mépris ou d’hostilité à l’égard des religions22.
3. Le principe de laïcité, dans la compréhension de l’Eglise Catholique,
garantit et protège la liberté d’opinion, de conscience, de religion et de croyance,
dans le respect de la dignité de chaque personne et de chaque communauté. Dans
un Burkina caractérisé par la diversité culturelle, le pluralisme religieux et le
multipartisme, la laïcité de l’Etat garantit l’égalité des citoyens et des religions et
favorise l’unité, le dialogue et la paix sociale23. Son application requiert, selon la
vision catholique, un certain nombre de conditions que doivent remplir l’Etat
burkinabè, les institutions ou communautés religieuses et toute personne résidant
dans notre pays.
4. La laïcité, pour être effective, exige comme condition fondamentale
l’existence de lois justes qui assurent et protègent efficacement la liberté

20

Cf. Marc 12, 17 : « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu »

21

Cf Vatican II, Constitution pastorale Gaudium et Spes, n° 76 ; cf. aussi Congrégation pour la doctrine de la foi,
Note doctrinale concernant certaines questions sur l’engagement et le comportement des catholiques en politique,
du 24 nov. 2002, n° 6,.
Cf. Compedium de la doctrine sociale de l’Eglise, n° 572 ; cf. aussi, Lettre du pape Jean Paul II aux évêques de
France, du 11 février 2005, n° 2.
22

23

Cf. Benoit XVI, Liberté religieuse, chemin vers la paix. Message pour la célébration de la journée mondiale
de la paix (1er janvier 2011), n° 10, §1.
81

d’opinion, de conscience, de religion et de croyance24. L’exercice individuel et
communautaire de cette liberté ne peut être entravé ni par l’Etat, ni par les
institutions et communautés religieuses, ni par aucune personne ou groupe de
personnes25. Cependant, si cette liberté s’exerce au mépris de la dignité et des
droits fondamentaux de la personne humaine, l’Etat laïque a le droit et la
responsabilité de la soumettre à la rigueur de la loi fondée sur un ordre juste26. En
d’autres termes, l’Etat ne doit tolérer aucun acte ou discours prônant l’intolérance,
la discrimination et la violence au nom de convictions religieuses ou idéologiques.
Il s’ensuit que, par principe, dans l’Etat laïque, personne ne doit être contraint
d’adhérer à telle religion plutôt qu’à une autre ; que personne ne doit non plus être
contraint de n’adhérer à aucune religion et, enfin, que personne n’est tenu
d’adhérer à une religion plutôt qu’à aucune27. En somme, toute adhésion ou nonadhésion à une foi religieuse ou à une doctrine philosophique doit se faire
uniquement sur la base de convictions personnelles et par un choix libre de toute
contrainte. Par conséquent, toute personne en âge d’accomplir des choix libres
peut, dans la recherche de la vérité, exercer légitimement la liberté de choix par
rapport à des croyances et pratiques religieuses reçues, durant l’enfance, par
l’éducation ou par la tradition.
5. La juste application du principe de laïcité garantit l’égalité de tous les
citoyens et des diverses institutions et communautés religieuses, dans la mesure
où ce principe exige, d’une part, que l’Etat ne

puisse revêtir aucune forme

confessionnelle ni favoriser aucune religion au détriment des autres et, d’autre
part, qu’aucune religion ne puisse exercer directement la politique ou le droit
constitutionnel de former les lois de l’Etat28.

24

Cf. Concile Vatican II, Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae, n° 6 §2.

25

Cf. Ibid., n° 2, §1-2 ; n° 6, § 2.

26

Cf. Ibid., n° 7, §3.

27

Cf. Ibid., n° 2, §2, n° 3, §3 n° 6, §5 ; cf. aussi Benoit XVI, Liberté religieuse, chemin vers la paix. Message
pour la célébration de la journée mondiale de la paix (1er janvier 2011), n° 5, § 2.
28

Cf. Lettre du pape Jean Paul II aux évêques de France, du 11 février 2005, n° 3.
82

6. Si, dans la conception catholique de la laïcité, la juste autonomie de l’Etat
et de la religion signifie la non-ingérence réciproque, elle implique cependant la
collaboration des deux institutions dans la défense et la promotion du bien
commun, de l’unité, de la paix sociale, des valeurs universelles et des droits
humains tels que la liberté, l’égalité, la justice et la dignité de la personne humaine.
A ce titre, l’Etat n’a le droit d’intervenir dans la sphère religieuse que lorsque des
individus, des groupes ou des communautés, se réclamant de leur foi ou de leurs
traditions religieuses, portent atteinte à l’ordre public, aux droits fondamentaux ou
à la dignité de la personne humaine29. Dans la même logique, les institutions ou
communautés religieuses n’ont aucune légitimité à agir comme organisations
politiques, mais elles ont le droit d’intervenir pacifiquement dans l’espace public
comme autorités spirituelles et morales dans le but d’offrir leur contribution au
bien commun et au débat démocratique en délivrant des messages de justice, de
solidarité et de paix, et en entreprenant des actions éducatives ou caritatives au
service de tout homme et de tout l’homme30.
7. En tant que puissance publique et organisation rationnelle de la société
fondées sur le droit, l’Etat a la vocation d’offrir à tous les citoyens et à toutes les
communautés - religieuses ou non - le cadre juridique et l’espace de liberté
nécessaires pour vivre selon leur foi et leurs convictions, pour réaliser les finalités
qui leur sont propres, pour autant que celles-ci et les moyens préconisés de leur
réalisation ne violent ni les justes exigences de l’ordre public31 ni les droits
fondamentaux des personnes. En tant qu’autorités morales et communautés
spirituelles à l’intérieur desquelles a lieu la transmission des valeurs et des
traditions, les religions ont la vocation d’exercer une influence positive sur leurs
membres et, plus largement, sur l’ensemble des citoyens en leur offrant des
motivations profondes pour pratiquer la justice, participer au bien commun, vivre
en solidarité avec les plus pauvres et œuvrer pour la paix sociale. La collaboration
entre l’Etat et les religions doit articuler, de la meilleure manière, les impératifs de

29

Cf. Concile Vatican II, Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis Humanae, n° 7, §3.

30

Cf. Ibid., n° 4, §2-4, n° 13, § 2, 4 ; Cf. aussi Lettre du pape Jean Paul II aux évêques de France, du 11 février
2005, n° 6 §2-3.
31

Cf. Concile Vatican II, Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae, n° 4.
83

sécurité, d’efficacité, de concurrence économique et de gestion du pouvoir
politique avec les exigences éthiques de justice, de solidarité, de liberté, d’égalité
et de respect de la dignité de toute personne humaine.
8. Force est de constater, cependant, que certains impératifs qui semblent
s’imposer à l’Etat ne sont pas toujours conciliables avec les exigences éthiques que
les institutions et les communautés religieuses ont particulièrement la mission de
proclamer et d’incarner. Dans ce cas, les personnes, individuellement ou en
associations, ont le droit et le devoir d’agir et d’opposer aux lois injustes le droit
légitime de l’objection de conscience32. Le recours des institutions religieuses à
ce droit contre de graves atteintes aux droits et à la dignité de la personne humaine
est légitime lorsque toutes les voies de recours légales ont été épuisées.
9. L’application du principe de laïcité dans le domaine de l’éducation
scolaire commande une collaboration et un soutien réciproque entre l’Etat et les
religions pour que tous puissent jouir effectivement du droit à l’égal accès à l’école.
Si l’Etat a le monopole public des programmes et diplômes nationaux, il n’exerce
pourtant pas le droit de monopole sur la création et le fonctionnement de certaines
institutions telles que l’école. Les communautés religieuses ont, par conséquent, le
droit de créer et de gérer des écoles dans lesquelles, en plus du programme
officiel d’enseignement, elles peuvent développer un programme complémentaire
d’enseignement religieux. Il reste bien entendu que les communautés religieuses
ont le droit d’enseigner la foi, les dogmes et les traditions qui leur sont propres
dans les structures et espaces adéquatement définis33.

10. L’espace de l’école publique étant celui de l’apprentissage de la liberté,
il ne doit pas être utilisé pour faire de la propagande religieuse, politique ou
idéologique. Cependant, l’enseignement, en régime de laïcité, ne doit pas exclure
les valeurs qui existent dans la société et qui peuvent être partagées par la

Cf. Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 2242 : « Le citoyen est obligé en conscience de ne pas suivre les
prescriptions des autorités civiles quand ces préceptes sont contraires aux exigences de l’ordre moral, aux droits
fondamentaux des personnes ou aux enseignements de l’Evangile ».
32

33

Cf. Concile Vatican II, Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis Humanae, n° 4.
84

communauté nationale dans le but de forger l’identité collective et de favoriser la
cohésion sociale et le progrès moral de leurs membres.
11. En conclusion, il est important de souligner que c’est dans un dialogue
constant, d’une part, entre l’Etat et les religions et, d’autre part, entre les religions
elles-mêmes que le principe de laïcité sera efficacement appliqué en faveur de la
liberté, de l’égalité, d’une véritable démocratie, de l’unité nationale et de la paix
sociale.
Ouagadougou le 27 septembre 2012

+ Séraphin François ROUAMBA
Archevêque de Koupéla

Président de la Conférence Episcopale Burkina-Niger

85

EXPOSE DE LA COMMUNAUTE PROTESTANTE

86

EXPOSE DE LA COMMUNAUTE ISLAMIQUE

PERCEPTION DE LA OUMAH ISLAMIQUE DU BURKINA FASO
DU CONCEPT DE LAÏCITE
----------------------------------

Excellence,
Mesdames et messieurs les participants ;
Mesdames, messieurs.

Permettez-moi, avant toute chose, de dire que nous abordons cette
rencontre dans un esprit de fraternité, de franche et loyale collaboration
pour contribuer, avec chacun de vous, à un mieux vivre ensemble et à une

fraternité toujours plus grande dans notre si .beau et paisible pays.

87

Il n’est point besoin de rappeler que le présent forum national sur la laïcité
est une des recommandations du Conseil Consultatif sur les Réformes
Politiques (CCRP), manifestation de la démocratie consensuelle qui se
construit progressivement dans notre pays.
Il s’agit pour nous tous, acteurs de cette rencontre, de nous accorder sur ce
qui pourrait être le modèle burkinabé de laïcité. Pour être précis, il s’agit de

définir les termes d’une intelligente cohabitation des communautés
religieuses avec l’Etat.
Une telle entreprise n’est possible qu’à travers une bonne compréhension
de la perception que les parties prenantes ont de la laïcité burkinabé et de
ses exigences dans la société plurielle qu’est la nôtre.
Pour la communauté islamique, représentée par la Fédération des

Associations Islamiques du Burkina, F.A.I.B, la laïcité telle que pratiquée
dans notre pays peut être cernée par la réponse à une série de questions
dont les suivantes :
1. Quels sont les fondements de la laïcité burkinabé ?
2. Quel contenu lui est-il donné ?
3. Quelle place est-elle accordée à la religion dans notre pays ?
4. Quelles sont les finalités de la laïcité ?
5. La pratique de la laïcité au Burkina Faso est-elle en phase avec les canons
juridiques qui sont affirmés?
6. La laïcité dans notre pays doit-elle être le reflet ou une projection de la
laïcité propre à d’autres sociétés ?
7. La communauté islamique du Burkina Faso peut-elle être en phase avec
la laïcité burkinabé alors que le système juridico-politique de l’islam
récuse toute idée d’Etat irréligieux ?

88

8. Quels devraient-être les contours de la laïcité appliquée dans notre
pays ?

Voici nos éléments de réponses à ces questions.
1re Réponse : des fondements de la laïcité.
Il est à remarquer qu’ils sont principalement enracinés dans la Constitution et

cela de manière constante depuis la Ière République : Article 2 des constitutions
des Ière et IIe République, Article 1 de la constitution de la IIIe et Article 31 de la
constitution de la IVe République.

2e Réponse : de la définition de la laïcité.
Il n’existe aucune définition officielle de la laïcité dans notre pays. Celle
couramment admise postule la séparation de l’Etat du religieux, marquée par

l’équidistance des gouvernants à l’égard des communautés religieuses. Les
définitions proposées dans les dictionnaires restent laconiques.
Ainsi peut-on lire dans le dictionnaire Larousse que la laïcité est, je cite, « un
principe excluant les Églises de l'exercice du pouvoir politique ou administratif, en
particulier de l'organisation de l'enseignement public » fin de citation.

3e Réponse : de la place de la religion dans notre pays.
La liberté de croyance est reconnue aussi bien dans les textes internes que dans
les textes ’externes internalisés. Au niveau interne, cette liberté est reconnue à
l’Article (7) de la constitution qui dispose que « la liberté de croyance, de non
croyance, de conscience, d’opinion religieuse, philosophique, d’exercice de culte, la
liberté de réunion, la pratique de la coutume ainsi que la liberté de cortège et de
manifestation sont garanties par la présente Constitution, sous réserve du respect de
la loi, de l’ordre public, des bonnes mœurs et de la personne humaine ».

89

En ce qui concerne les textes externes, il faut distinguer ceux qui ont valeur
constitutionnelle de ceux qui ont une valeur infra-constitutionnelle mais supralégislative.

Dans le premier groupe, on retrouve la Charte Africaine des Droits de l'Homme
et des Peuples de 1981 (article 8) ; la Déclaration universelle des Droits de
l'Homme de 1948 ;
le Pacte international relatif au droit civil et politique de 1966 (article 18) et le
Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels de 1966.

Dans le second groupe on retrouve la Déclaration des Nations Unies sur
l’élimination de toutes les formes d’intolérance et de domination sur la base de
la religion et de la croyance du 25 novembre 1981.

4e Réponse, réponse à la question sur les finalités de la laïcité.
Il faut dire qu’elle vise à proscrire le sectarisme, à promouvoir l’esprit de
tolérance entre citoyens, à instaurer une société pacifique, reconnaitre la liberté
de conscience, etc.

Ces valeurs sont partagées par les religions révélées. Le Coran et la Sunna, les

enseignements du Prophète (paix et salut de Dieu sur lui) contiennent des
dispositions normatives dans ce sens. ‘’Point de contrainte en matière de
religion’’ proclame notamment le Coran (Sourate 2 Verset 256).

5èment Réponse à la question sur la conformité ou non de la pratique de la laïcité
au Burkina avec les canons juridiques souscrits.
Cette réponse nécessite un bref voyage au cœur de l’histoire de la colonisation

de la Haute-Volta.

90

Quand le colon français débarque en Haute Volta en 1894, en France l’édit de
Nantes d’avril 1598 déployait en Afrique encore sa toute puissance : elle se
résumait en une maxime : « cujus regio, ejus religio », un roi, une foi. A chaque
territoire politique doit correspondre une religion. La loi de 1905 qui marque la
distance que l’Etat prend avec le fait religieux conformément au régime
juridique des lois métropolitaines n’est pas immédiatement transposable dans
les colonies en raison du dualisme juridique.
Ainsi, dans les colonies françaises, la religion du colonisateur va continuer à
bénéficier d’une protection de prince. Cette situation déroge au principe de la
laïcité postulée, à l’image du «Concordat» - exception du droit français - qui régit
les cultes en Alsace (Haut-Rhin et Bas-Rhin) et dans le département de la Moselle
et qui remonte à l'accord signé entre Napoléon Bonaparte et le pape Pie VII, le
10 septembre 1801.
Ce faisant, cette situation continuait à marquer la discrimination à l’égard de
l’islam qui cohabitait, bien avant la colonisation, avec les religions traditionnelles
africaines. De ce fait, les leaders religieux musulmans n’avaient d’autre choix que
l’un des termes de l’alternative suivante : collaborer avec le colon ou être déporté.
C’est donc dire que l’islam n’a pas bénéficié de la protection de l’Etat.
De ce fait, au lendemain de l’indépendance, la laïcité affirmée au Burkina Faso
comme dans les autres ex colonies françaises est incontestablement une projection
de l’histoire de l’occident en général, de la France en particulier.
Ce constat est quelque fois récusé avec mauvaise foi au motif qu’aucune politique
officielle de l’Etat burkinabé ne fonde une discrimination à l’égard des autres
communautés religieuses. Si cet argument est fondé en droit, certaines pratiques
de l’Etat corrompent le droit positif. On en veut pour preuve l’allocation du
financement public aux confessions religieuses. La communauté islamique n’a
profité de cette ressource qu’en 2011 alors que l’existence de cette source de
financement qui n’était plus qu’un secret de polichinelle était de tout temps
91

contestée. C’est pourquoi notre communauté voudrait qu’à l'image de pays comme
l’Italie, l’Etat fasse passer une loi sur le financement des confessions religieuses
afin de donner une suite crédible à sa volonté de les accompagner dans leur
mission de promotion des valeurs morales et éducatives.

6e Réponse : du caractère endogène ou exogène de notre laïcité.

La laïcité telle qu’appliquée dans notre pays ne saurait être la projection de la
laïcité d’autres sociétés. La communauté islamique pense, avec tous les
spécialistes de l’Etat, que la laïcité est toujours contextualisée à un pays donné ;
c’est-à-dire qu’elle est le fruit de son histoire et de son évolution. Le problème est
que l'invocation intempestive d'exemples étrangers, notamment celui de la France,
est assez périlleuse dans la mesure où elle nie le contexte propre à chaque pays.

7e Réponse : de la capacité de la communauté islamique à être en phase avec la
laïcité burkinabé. Nous disons que si l’islam récuse toute idée d’Etat irréligieux,
rien n’indique dans ses pratiques que la communauté islamique du Burkina Faso
rame à contre courants des principes de l’Etat. Toutefois, elle estime que l’Etat ne
peut être indifférent aux pratiques religieuses et doit même les faciliter. Elle pense
que le concept d’Etat civique convient mieux à l’idée de la neutralité de l’Etat que
le concept d’Etat laïc qui, fruit d’une histoire française ne correspond pas toujours
aux réalités de notre pays.

Du reste, le constat qui s’impose est que les gouvernants au Burkina Faso comme
dans la plupart des pays africains entretiennent des liens privilégiés avec les
pouvoirs religieux, de sorte qu’il n’est pas illogique de dire que la laïcité en Afrique
est devenue une catégorie juridique adaptée aux sociétés du cru.

92

En effet, au Burkina Faso comme dans nombre de pays africains, la conduite des
administrations électorales, des Conférences nationales, ou les organes de
réconciliation comme le Collège de sages, les organes de moralisation de la vie
publique comme le Comité d’éthique ont été confiées aux leaders religieux.
L’enseignement à tirer de cet état de fait est que les corps religieux contribuent
activement à l’édification de l’Etat africain.

Enfin, 8e Réponse : celle relative aux contours de la laïcité.
Cela conduit à reconnaître que le modèle burkinabé de laïcité n'est pas à bout de
souffle. Il faut cependant que les participants au forum prennent conscience des
réalités de notre société dont la principale caractéristique est sa composante
plurielle. En conséquence, le rôle de la religion dans l'espace publique doit être
redéfinit. La laïcité dans notre pays ne doit pas être envisagée à la lumière de celle
développée en France, car comme l’ont montré d’éminents juristes français, le
dogme de la laïcité-neutralité révèle ses limites, fautes de fondements cohérents
d’une part, et des applications disparates, d’autre part. En clair, il est un mythe.

Par conséquent, le service public au Burkina Faso doit pouvoir adopter une
organisation compatible avec le libre exercice des cultes, conformément aux
prescriptions de notre constitution.

En guise d’exemple, l’heure de service le vendredi peut être aménagée, comme
cela est offert aux personnels musulmans à l’ambassade des Etats-Unis au Burkina
Faso, pour permettre aux musulmans de prendre part à la grande prière du
Vendredi. De même les pouvoirs publics devraient rappeler une fois pour toute
qu’aucune loi n’interdit le port du voile au BF ;
et par conséquent prendre des mesures afin que cessent les différentes

tracasseries constatés jusqu’à présent ; discrimination à l’embauche, interdiction

93

d’accès à des salles de classe ou de concours alors que l’indentification de la
personne est possible.

Enfin, il faut inviter l’Etat burkinabè à « créer un cadre permettant de déterminer la
place, les fonctions possibles et le statut des institutions religieuses », conformément
à la loi modèle sur la liberté religieuse de la Déclaration de 1981. En raison du rôle
d’intermédiation sociale joué par les leaders religieux, il faut appeler à un
véritable partenariat entre l’Etat et les confessions religieuses.

Le réalisme voudrait que dans notre laïcité, la langue arabe soit bien prise en
compte comme langue d’enseignement, ceci en conformité avec l’esprit de
l’article 10 de la loi n°013-2997/AN du 30 juillet 2007 portant loi d’orientation de
l’éducation, qui prévoit qu’outre les langues française et traditionnelles « d’autres
langues peuvent intervenir comme véhicules et disciplines d’enseignement dans les
établissements d’enseignement conformément aux textes en vigueur ».

Si la langue arabe, qui entrait dans cette catégorie, n’a pas été officiellement
abandonnée comme langue d’enseignement, le retour de cette langue dans nos
lycées et collèges participerait de la volonté de l’Etat de la redynamiser. Ceci dans
un contexte où les écoles franco arabes représentent 71% des écoles privés au

Burkina. Il est à peine besoin de rappeler, si ce n’est dans un souci pédagogique,
que dans notre pays la langue arabe a été utilisée avant et après l’indépendance
comme langue administrative, commerciale, d’instruction et de communication. En
tant que membre actif de l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI), notre
pays ne peut, et ne doit faire fi de cet excellent élément de coopération qu’est la
langue arabe dans un contexte de globalisation.

94

Une laïcité positive est celle qui tient compte de l’équité dans la représentativité
des confessions religieuses. Si dans la démocratie, toute majorité ne peut pas faire
la loi surtout quand il existe des critères de majorité qualifiée, il est anachronique
que les groupes minoritaires soient mieux représentées que les groupes
majoritaires. Du reste, les gouvernants avaient reconnu que le regroupement des
différents courants de l’islam

(Tidjanites, Sunnites-Wahhabites, Chiites,

Communauté musulmane etc.) au sein de la FAIB offrait à l’Etat un interlocuteur
unique, facilitant la relation avec la communauté islamique.
Si l’injustice faite à l'islam, relativement à sa sous représentation dans les instances
et organes créés par l'Etat, semble avoir trouvé un début de solution avec ce forum,
nous souhaitons de tous nos vœux que le droit soit définitivement aligné sur le fait.
Le partenariat constructif autour de la laïcité est la reconnaissance et la garantie
par les pouvoirs publics des manifestations extérieures de la liberté religieuse, en
particulier la pratique du culte, ce conformément aux prescriptions de la
déclaration de 1982 à laquelle a adhéré notre pays.
Il serait de même souhaitable que l’Etat renforce son accompagnement des
systèmes éducatifs des communautés religieuses, celui de la communauté
islamique en particulier, afin de normaliser les écoles franco-arabes qui sont prises
en compte dans les statistiques sur la scolarisation. Mais déjà, la nécessaire
insertion des étudiants diplômés des instituts arabes se pose comme un impératif
incontournable.
C’est donc par un effort conjugué de l’Etat et de tous ses partenaires que nous
parviendrons à construire une société où cohabitent pacifiquement les différents
corps sociaux.
A cet égard, nous pensons que les confessions religieuses et la chefferie
coutumière et traditionnelle de notre pays ont commencé à intérioriser cette noble
fin suprême à travers la création de l’Union des Religieux et Coutumiers du Burkina
Faso. L’Etat pourrait s’associer utilement à cet élan en favorisant la mise en place
de cet observatoire de la laïcité, organe de veille républicain, dont nous avons
déjà proposé la création au cours des assises du CCRP.

Je vous remercie

95

96
Collections
Documents divers